mardi 18 mai 2010

Saint Paul: Rémy Jobard (5)


« Sur les pas du plus audacieux
des missionnaires … » (5)

Départ pour un 2ème voyage missionnaire :

Après l’assemblée de Jérusalem (premier concile, en 49), Paul et Barnabé regagnent Antioche, accompagnés de deux émissaires désignés pour remettre une lettre aux païens devenus chrétiens, les avertissant qu’on ne les surchargera pas de toutes les obligations propres aux Juifs. Et Paul est officiellement investi pour aller vers les peuples étrangers à Israël. Très vite, il va donc repartir, prenant avec lui un des messagers venus de Jérusalem : Silas (appelé aussi Sylvain). Barnabé préfère retourner à Chypre, son île natale en emmenant le jeune Marc. Paul choisit la voie terrestre et les deux compagnons gagnent Tarse, franchissent la montagne du Taurus et retrouvent les communautés fondées au cours du premier voyage : Derbé et Lystres où Timothée attend. Cette fois Paul accepte de le prendre avec lui et c’est à trois qu’ils poursuivent leur voyage.

Au pays des Galates :

Ils pensaient d’abord continuer vers l’ouest où se situent des villes importantes comme Ephèse, mais des messagers du Christ y sont déjà allés. Paul, poussé par l’Esprit dit Luc, décide donc de se diriger vers le nord. Ils arrivent ainsi au centre du plateau anatolien, chez les Galates. Comme leur nom l’indique, ce sont nos lointains cousins, car ils se sont installés dans la région au IV° siècle avant notre ère, venant de Gaule. Ces tribus qui passaient pour farouches et assez turbulentes réservent néanmoins un excellent accueil aux missionnaires. Paul le rappellera quand, plus tard, il leur écrira (Ga, 4, 14-15). Le succès est rapide et plusieurs communautés sont mises en route. Cependant une maladie de Paul, “ une écharde dans sa chair ” (crise de paludisme peut-être…) oblige à prolonger le séjour en Galatie au cours de l’année 50.
L’Evangile arrive en Europe :

Quittant la région où se trouve aujourd’hui la capitale de la Turquie Ankara, on marche vers l’ouest et on arrive sur la côte à Troas là où la fameuse guerre de Troie a eu lieu bien des siècles auparavant et non loin de ce détroit des Dardanelles où un demie million de soldats français, britanniques et turcs sont morts en 1915…

Là Luc rejoint l’équipe et dans les Actes, le récit emploie dès lors la 1ère personne du pluriel : on passe de l’exposé historique au témoignage vécu. C’est à Troas que Paul, une nuit, a une vision : un Macédonien lui apparaît et lui dit “ viens à notre secours ”. C’est vite décidé : on trouve un bateau et on fait voile vers l’Europe. Deux journées suffisent, avec une brève escale à Samothrace, pour atteindre le port de Neapolis, puis par la via Egnatia, encore bien visible aujourd’hui, la ville de Philippes, peuplée surtout de Romains.
Les Juifs y sont peu nombreux et la cité ne possède pas de synagogue. Mais Paul découvre un groupe de femmes qui se réunissent pour prier à l’extérieur de la ville. L’une d’elles, Lydie, est la première Européenne à être baptisée et c’est dans sa maison que naît et se développe rapidement la première communauté chrétienne d’Europe.



Fin du séjour à Philippes:


Un incident fâcheux va mettre fin à la mission de Paul chez les Philippiens. Paul, agacé par les cris d’une voyante qui les suivait constamment, chasse “ l’esprit de divination ” qui l’habitait. Du coup, elle a perdu son don, ce qui ne plait pas à tout le monde et provoque du désordre dans la ville. Alors on arrête ces étrangers, on les frappe de verges et on les jette au cachot. Mais voici que, dans la nuit, se produit un tremblement de terre qui ébranle les murs de la prison et ouvre les portes. Affolement du gardien qui croit voir la prisonniers lui échapper, mais Paul et Silas qui chantaient les louanges de Dieu le rassurent si bien qu’il est frappé par la grâce et se fait baptiser avec tous les siens. Quand, le lendemain, les magistrats apprennent que ceux qu’ils avaient pris pour des juifs errants, étaient en fait des citoyens romains, ils s’empressent de les libérer officiellement et de s’excuser en leur demandant toutefois de quitter la ville pour éviter de nouveaux incidents : Luc et Timothée restent à Philippes où la foi chrétienne est demeurée bien vivante jusqu’à aujourd’hui avec une église dédiée à Ste Lydie. Grande différence avec le pays des Galates où le christianisme a été supplanté par l’Islam.

Première évangélisation de la Grèce (50-52)


Paul et Silas se mettent donc en route vers le sud-ouest. Passant par Amphipolis et Apollonie dont Luc se contente de citer les noms, ils atteignent Thessalonique où ils vont rester quelques semaines. Paul s’adresse d’abord à la communauté israélite dans la synagogue. Comme d’habitude, certains se laissent convaincre par son discours, y compris des Grecs et des Romains, mais il se trouve encore des traditionalistes qui refusent la nouvelle voie, ameutent la foule et ne trouvant pas Paul, s’en prennent à Jason chez qui logeaient les deux missionnaires. Une fois de plus, Paul et Silas doivent s’en aller, mais ils laissent une communauté solide, qualifiée d’exemplaire dans la lettre qui leur sera bientôt adressée (1 Th.3). Ils s’arrêtent encore à 70 km de là, à Bérée où ils sont bien accueillis et font des adeptes, mais les Juifs de Thessalonique ont vent de l’affaire et viennent encore agiter les foules si bien que les nouveaux chrétiens de Bérée font discrètement partir Paul par la mer, gardant avec eux Silas ainsi que Timothée qui avait rejoint l’équipe en apportant des nouvelles de Philippes.

Paul à Athènes :



Au bout de quelques journées de navigation, Paul débarque près d’Athènes à l’automne de l’année 50. La ville qui a été la lumière des civilisations a connu un déclin constant au cours des siècles précédents. Si on n’élabore plus la politique de la cité sur l’agora, on s’y retrouve toujours pour discuter. Et Paul qui est seul, ce qui est exceptionnel, s’entretient avec des philosophes épicuriens et stoïciens qui ont du mal à le suivre et le conduisent sur la colline d’Arès (ou Aréopage) pour qu’il expose sa doctrine devant le conseil des sages. Là, Paul fait un beau discours rapporté par Luc (Ac, 17, 22-31), mais pour la pensée grecque la notion même de résurrection est inconcevable. Certains pensent même que « l’Anastasis » dont parle Paul (terme grec pour désigner le relèvement du Christ) est une nouvelle déesse ! Quelques Athéniens sont tout de même devenu croyants dont Denys, membre de l’Aréopage, mais face à ce semi-échec, Paul, convaincu qu’il perd son temps quitte Athènes.


Corinthe (fin 50-automne 52)


Quatre journées de marche permettent à Paul d’arriver à l’isthme, percé aujourd’hui par un canal. Mais, à l’époque, on tirait les petites embarcations sur un chemin dallé pour les faire passer d’une mer à l’autre et il est probable que les premiers Corinthiens rencontrés par Paul ont été les esclaves peinant sous les cordages pour faire avancer les bateaux. De fait la population mêlée de cette ville cosmopolite va se révéler plus réceptive à la Bonne Nouvelle que les intellectuels d’Athènes. Paul est rejoint par Silas et Timothée et il rencontre très vite un couple de Juifs convertis, Priscille et Aquilas, chassés d’Italie par un décret de l’empereur Claude en 49. Comme ils font le même métier que lui il travaille avec eux, ce qui lui permet de “ n’être à la charge de personne ” (1Th, 2-9). Il intervient aussi à la synagogue et dans les maisons amies et très vite, malgré quelques incidents, les conversions se multiplient. Paul organise la communauté naissante, envoie Timothée à Thessalonique et écrit à deux reprises aux Thessaloniciens. Ces lettres nous sont parvenues et ce sont les textes les plus anciens du Nouveau Testament.(51)
Après un séjour de 18 mois, à l’automne 52, Paul quitte Corinthe, emmenant avec lui Priscille et Aquilas qu’il laisse à Ephèse, lors d’une brève escale et il navigue jusqu’à Césarée. De là, il monte à Jérusalem, puis regagne Antioche. Ce deuxième voyage missionnaire a duré deux ans et demi et Paul a parcouru près de 5000 km dont 2000 à pied environ, mais il n’a pas dit son dernier mot et songe déjà au prochain départ…
Rémy Jobard

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