samedi 1 mai 2010

Thérèse d'Avila Vie 13, extraits


Thérèse d’Avila, Vie 13, extraits


Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte pas à pas de son autobiographie.


Avoir de grands désirs


Ayant vu certaines tentations dans les commençants, en ayant éprouvé moi-même quelques-unes, il m'a semblé utile de les faire connaître, et de donner en même temps quelques avis sur des points nécessaires, selon moi, dans la vie spirituelle.
Dès le début, que l'on tâche de marcher avec joie et liberté d'esprit. Certaines personnes se figurent que leur dévotion va s'en aller, si elles cessent tant soit peu de veiller sur elles-mêmes… En tout, la discrétion est nécessaire.
Il faut aussi ouvrir notre âme à une grande confiance. Il nous est fort utile de ne pas resserrer nos désirs dans d'étroites limites; nous devons croire, au contraire, qu'en nous appuyant sur Dieu, nous pourrons, par de constants efforts, arriver avec le temps à la perfection où sont parvenus plusieurs saints… Dieu demande et aime des âmes courageuses, pourvu qu'elles soient humbles et ne se confient nullement en elles-mêmes
Que l'humilité soit toujours devant nos yeux, afin de nous faire comprendre que les forces ne viendront pas de notre fonds.

L’humilité
Mais il faut avoir une idée juste de cette humilité. Car le démon, je n'en doute pas, nuit beaucoup aux personnes d'oraison et les empêche d'avancer très loin, en leur donnant une notion fausse de cette vertu. Il leur fait croire qu'il y a de l'orgueil à former de grands désirs, à vouloir imiter les saints, à souhaiter d'être martyrs…
Il nous semble, tant nos cœurs sont étroits, que la terre va nous manquer, si nous oublions un instant ce corps pour nous occuper des intérêts de l'âme… Ce n'est pas tout: nous regardons comme très favorable à une vie de recueillement d'avoir le nécessaire en abondance, attendu que le souci du temporel est une source de trouble dans l'oraison. Je gémis de voir en nous si peu de confiance en Dieu et tant d'amour-propre, que de
semblables soins nous jettent dans l'inquiétude…



Nous pouvons encore, à l'exemple des saints, aimer la solitude, le silence, et pratiquer plusieurs autres vertus, qui ne tueront pas ce corps, notre mortel ennemi. Que veut-il, en effet, par tant de ménagements qu'il exige, si ce n'est la ruine de l'âme? De son côté, le démon ne contribue pas peu à le frapper d'impuissance pour le bien…
On voit par là combien il est nécessaire aux commençants de dominer toutes ces vaines terreurs de l'imagination. Je les prie de s’en rapporter là-dessus à mon expérience…


Ne pas s'occuper de la perfection des autres


Voici une autre tentation fort ordinaire chez eux. Venant à peine de goûter la douceur et les avantages de la vie spirituelle, ils voudraient sur-le-champ voir tout le monde l'embrasser. Le désir, est bon, mais le, mode de le réaliser pourrait n'être pas exempt d’inconvénient, si l'on n'use d'une sage réserve et de beaucoup d’adresse, afin de ne point paraître faire la leçon aux autres, Pour leur être utile, il faut des vertus très solides; autrement, on leur devient un sujet de tentation…
C'est un artifice du démon: il se sert en apparence de nos vertus pour autoriser, autant qu'il le peut, le mal qu'il cherche à nous faire commettre....


Une nouvelle tentation pour les commençants, c'est le déplaisir causé par la vue des péchés et des fautes d'autrui; comme toutes les autres, elle se présente à eux sous les apparences du zèle; il importe de la remarquer et de marcher avec précaution. Le démon leur fait croire que s'ils s'affligent, c'est uniquement parce qu'ils désirent ne point voir Dieu offensé, et qu'ils ne sauraient souffrir les outrages faits à sa gloire. Ils voudraient sur-le-champ y porter remède, et leur inquiétude les empêche de faire oraison. Le plus grand mal est de penser que c'est vertu, perfection, zèle ardent pour Dieu. Je ne parle pas ici de la peine que donnent des péchés publics passant en coutume dans une congrégation, ou les ravages causés de nos jours dans l'Eglise par ces hérésies qui entraînent tant d'âmes à leur perte. Cette peine est très légitime; venant d'une source très pure, elle n'inquiète pas…



Efforçons-nous donc d'avoir toujours les yeux ouverts sur les qualités et les vertus des autres, et, pour ne pas voir leurs défauts, considérons la grandeur de nos péchés.



La méditation



M'adressant donc à ceux qui discourent, je leur recommande de ne pas consumer tout le temps de l'oraison à approfondir le sujet qu'ils méditent… Que doivent-ils donc faire? Se mettre, comme je l'ai dit, en présence de Notre-Seigneur, s'entretenir avec lui sans fatiguer l'entendement, et savourer le bonheur d'être en sa compagnie. Là, point de pénibles raisonnements, mais une simple exposition de nos besoins et des motifs qu'aurait le divin Maître de ne pas nous souffrir à ses pieds…



Je reviens à ce que je disais. Nous prenons pour sujet de méditation un mystère de la passion, par exemple, Notre-Seigneur à la colonne. L'entendement considère les grandes douleurs du divin Maître au milieu d'un tel abandon; il en recherche les causes; enfin il creuse ce mystère sous divers points de vue, travail facile à un esprit actif ou exercé par la science. Voilà une voie très excellente et très sûre, et c'est la manière d'oraison par laquelle tous doivent commencer, continuer et finir, jusqu'à ce qu'il plaise au Seigneur d'élever à des états surnaturels. Cette manière est pour tous, comme je viens de le dire. Cependant, il y a un grand nombre d'âmes qui tirent plus d'utilité de quelques autres méditations que de celle de la passion du Sauveur; comme il existe plusieurs demeures dans le ciel, on y arrive aussi par plusieurs chemins… Les commençants ont besoin de discernement pour reconnaître ce qui les fait avancer davantage. C'est pourquoi un maître expérimenté leur est nécessaire.



Sans doute, on ne doit jamais abandonner cette considération de la connaissance de soi, sans doute il n’est point d'âme fut-elle de la taille d'un géant dans la vie spirituelle, qui ne doive souvent revenir à l'enfance et à la mamelle… Oui, cette considération de ses péchés, et la connaissance de soi-même, sont le pain avec lequel doivent se manger tous les autres aliments, quelque délicats qu'ils soient; sans ce pain, on ne pourrait vivre. Mais enfin, on doit le prendre avec mesure.



Il importe donc extrêmement que le maître soit judicieux, j'entends d'un esprit solide et qu'il ait de l'expérience. Si à cela il joint la doctrine, c'est parfait. Mais si l'on ne peut en rencontrer un qui possède à la fois ces trois qualités, il est plus utile qu'il réunisse les deux premières, parce qu'on peut, s'il en est besoin, consulter des personnes savantes...


Seigneur, qui m'avez faite si incapable et si inutile, je vous bénis! Mais je vous bénis bien plus encore de ce que vous excitez tant d'âmes à nous réveiller de notre sommeil. Nous devrions faire monter vers vous une prière incessante pour ceux qui nous donnent la lumière. Et que serions-nous sans eux, au milieu des grandes tempêtes qui de nos jours agitent l'Église? Si quelques-uns n'ont pas répondu à la sainteté de leur mission, la fidélité des autres n'en brillera que davantage. Daigne le Seigneur les tenir de sa main, et protéger ces appuis de notre faiblesse! Amen.

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