mardi 14 septembre 2010

Thérèse d'Avila, Vie 27, extraits


Thérèse d'Avila Vie, Chapitre 27, extraits

Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte pas à pas de son autobiographie.


Je reviens à la relation de ma vie. J'étais, comme je dit, sous le poids de cette affliction causée par tant de peines, et l'on priait beaucoup pour moi, afin qu'il plût au Seigneur de me conduire par un autre chemin, puisque celui où je marchais était, disait-on, si suspect…



Or, au bout de deux ans, pendant lesquels je n'avais cessé, de concert avec d'autres personnes, de demander au Seigneur ou qu'il me conduisît par un autre chemin, ou qu'il daignât, puisqu'il me parlait si souvent, faire, connaître la vérité, voici ce qui m'arriva.
Le jour de la fête du glorieux saint Pierre, étant en oraison, je vis, ou pour mieux dire, car je ne vis rien ni des yeux du corps ni de ceux de l'âme, je sentis près de moi Jésus-Christ, et je voyais que c'était lui qui me parlait. Comme j'ignorais complètement qu'il pût y avoir de semblables visions, j'en conçus une grande crainte au commencement, et je ne faisais que pleurer. A la vérité, dès que Notre Seigneur me disait une seule parole pour me rassurer, je demeurais, comme de coutume, calme, contente, et sans aucune crainte. Il me semblait qu'il marchait toujours à côté de moi; néanmoins, comme ce n'était pas une vision imaginaire, je ne voyais pas sous quell
e forme. Je connaissais seulement d'une manière fort claire qu'il était toujours à mon côté droit, qu'il voyait tout ce que je faisais, et, pour peu que je me recueillisse ou que je ne fusse pas extrêmement distraite, je ne pouvais ignorer qu'il était près de moi.
J'allai aussitôt, quoiqu'il m'en coûtât beaucoup, le dire à mon confesseur. Il me demanda sous quelle forme je le voyais. Je lui dis que je ne le voyais pas. « Comment donc, répliqua-t-il, pouvez-vous savoir que c'est Jésus-Christ? » Je lui dis que je ne savais pas comment, mais que je ne pouvais ignorer qu'il fût près de moi; je le voyais clairement, je le sentais; le recueillement de mon âme dans l'oraison était plus profond et plus continuel; les effets produits étaient bien différents de ceux que j'éprouvais d'ordinaire: la chose était évidente…


Notre Seigneur se montre présent à l'âme par une connaissance plus claire que le soleil. Je ne dis pas qu'on voie ni soleil ni clarté, non; mais je dis que c'est une lumière qui, sans qu'aucune lumière frappe nos regards, illumine l'entendement, afin que l’âme jouisse d'un si grand bien…
Dans ces paroles dont j'ai traité précédemment (cf. chap. 25), Dieu rend l'entendement malgré lui attentif à ce qu'il lui dit. Donnant à l'âme comme une faculté nouvelle d'entendre, il la force à écouter et l'empêche de se distraire. Elle est à peu près comme une personne d'une ouïe excellente, à laquelle on parlerait de très près et à haute voix, sans lui permettre de se boucher les oreilles; bon gré mal gré, il faudrait qu'elle entendît. Toujours serait-il vrai qu'elle fait quelque chose, puisqu'elle est attentive à ce qu'on lui dit. Mais ici l'âme ne fait rien, elle ne prête même plus ce petit concours qui consiste à écouter. Sa nourriture s'est trouvée préparée et incorporée en elle, de sorte qu'elle n'a qu'à jouir. C'est comme si quelqu'un, sans apprendre, sans même avoir rien fait pour savoir lire, et sans avoir jamais rien étudié, trouvait en lui toute la science déjà acquise, ignorant de quelle manière et d'où elle lui serait venue, puisque auparavant il n'avait jamais travaillé même à connaître l'A b c. Cette dernière comparaison explique, ce me semble, quelque chose de ce don céleste. L'âme se voit en un instant savante; pour elle, le mystère de la très sainte Trinité et d'autres mystères des plus relevés demeurent si clairs, qu'il n'est pas de théologien avec lequel elle n'eût la hardiesse d'entrer en dispute pour la défense de ces vérités. Elle en demeure saisie d'étonnement. Une seule de ces grâces suffit pour opérer en elle un changement complet. Dès lors, elle ne saurait rien aimer si ce n'est Celui qui, sans exiger d'elle aucun concours, la rend capable de si grands biens, lui révèle de si profonds secrets, et lui prodigue les témoignages d'un amour si tendre qu'on renonce à les décrire…
Ici-bas, deux personnes intelligentes et qui s'aiment beaucoup, se comprennent, même sans signes, seulement en se regardant. C'est apparemment ce qui se passe entre Dieu et l'âme; mais il ne nous est pas donné de voir de quelle manière ils portent l'un sur l'autre leur regard, comme l'Epoux le dit à l'Épouse dans les Cantiques…
O âmes qui avez commencé à vous appliquer à l'oraison, et vous qui avez une véritable foi, pouvez-vous, car je ne vous parle pas de ce que vous gagnez pour l'éternité, pouvez-vous, dans cette vie même, aspirer à des biens comparables au moindre de ces biens? Oui, cela est certain, Dieu se donne lui-même à ceux qui abandonnent tout pour son amour. Il ne fait pas acception des personnes; il aime tout le monde. Nul n'a d'excuse, quelque misérable qu'il soit, puisqu'il agit ainsi avec moi, en m'élevant à une si haute oraison…

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