vendredi 29 octobre 2010

Thérèse d'Avila , Vie 37, extraits



Thérèse d'Avila Vie, Chapitre 37, extraits

Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte pas à pas de son autobiographie.

...depuis que Notre Seigneur m'a fait connaître combien grande est l'inégalité qui existe dans le ciel entre la félicité des uns et celle des autres, je vois bien que, sur la terre il n'y a pas non plus, quand il le veut, de mesure à ses dons. Aussi voudrais-je n'en voir mettre jamais dans le dévouement à une si haute Majesté.

Mon désir serait de consumer ma vie, mes forces, ma santé à son service, et de ne point perdre, par ma faute, le moindre degré de jouissance dans le ciel…car je vois que plus on le connaît, plus on l'aime et on le loue. Sans doute, je m'estimerais trop heureuse, après avoir mérité la dernière place en enfer, d'occuper la dernière place du paradis; et plaise à sa divine Majesté de me la donner un jour, sans considérer la grandeur de mes péchés! elle userait envers moi de la plus grande miséricorde; mais j'affirme que, si je le pouvais, et si le Seigneur me donnait sa grâce pour endurer d'extrêmes souffrances, je ne voudrais, quoi qu'il dût m'en coûter, rien perdre par ma faute. Infortunée! J'avais cependant, par mes nombreux péchés, tout perdu pour jamais…
Un simple regard sur la divine image que je porte gravée au fond de mon âme, me rend souverainement libre. Tout ce que je vois, loin de me captiver, excite mon dégoût, quand je le compare aux grâces et aux excellences que je découvre en ce divin Maître. Non, il n'y a ni science, ni félicité sur la terre qui soit de quelque prix a mes yeux, auprès du bonheur d'entendre une seule parole proférée par cette bouche divine…

Plus Notre Seigneur se montrait à moi, plus je sentais croître mon amour pour lui et ma confiance en sa bonté. Ses fréquents entretiens me le faisaient connaître d'une manière plus intime; je voyais qu'étant Dieu et homme tout ensemble, il ne s'étonne pas des faiblesses des hommes; il sait toute la profondeur de notre misère, et à combien de chutes nous sommes exposés, par suite du péché de nos premiers parents, qu'il est venu réparer. Je sentais que je pouvais traiter avec ce souverain Seigneur comme avec un ami, parce qu'il ne ressemble pas à ceux de la terre, qui mettent toute leur grandeur dans l'appareil d'une puissance empruntée. On ne leur parle qu'à certaines heures, et il n'y a que les personnes qualifiées qui les approchent…
O Roi de gloire et Seigneur de tous les rois! votre empire n'est point défendu par de frêles barrières, car il est éternel. Oh! comme, sans introducteur, on peut arriver jusqu'à vous!…nous pouvons traiter avec vous de tous nos intérêts, et vous parler au gré de nos désirs…

Je viens de passer huit jours dans cette obscurité; je ne trouvais plus en moi ni sentiment de mes obligations envers Dieu, ni souvenir de ses grâces; mon esprit était frappé d'impuissance, et absorbé par je ne sais quoi. Je n'avais assurément nulle mauvaise pensée, mais je me sentais si incapable d'en avoir de bonnes, que je riais de moi-même, et prenais plaisir à voir la bassesse d'une âme, quand Dieu suspend en elle son opération…elle a beau mettre du bois, et faire de son côté le peu qui est en son pouvoir pour allumer le feu de l'amour divin, aucune flamme ne monte. C'est déjà une grande miséricorde de la part de Dieu, que la fumée paraisse, et montre qu'il n'est pas entièrement éteint. Notre Seigneur l'allume ensuite de nouveau; mais jusque-là, quand on se romprait la tête à souffler et à arranger le bois, on ne ferait que l'étouffer davantage. Je crois que le meilleur alors est d'avouer franchement que l'on ne peut rien par soi-même, et de s'employer, comme j'ai dit, à d'autres œuvres méritoires. Peut-être Notre Seigneur enlève-t-il à l'âme l'oraison, afin qu'elle se livre à ces œuvres, et connaisse par expérience le peu dont elle est capable par elle-même.

Il est certain qu'aujourd'hui j'ai goûté de grandes délices auprès de Notre Seigneur: j'ai osé me plaindre de lui, et je lui ai dit: Eh quoi! mon Dieu, n'est-ce donc pas assez que vous me teniez dans cette misérable vie; que, pour l'amour de vous, je m'y soumette, et que je veuille vivre dans cet exil où tout m'empêche de jouir de vous, le manger, le dormir, les affaires, les rapports avec le monde? Vous seul connaissez la grandeur de ce tourment; et néanmoins, ô mon Seigneur, je l'endure pour l'amour de vous: faut-il encore que, dans ces rares instants où je pourrais jouir de votre présence, vous vous dérobiez à ma vue? Comment cela peut-il s'allier avec votre miséricorde? Comment l'amour que vous avez pour moi peut-il le tolérer? Seigneur, s'il m'était possible de me cacher de vous, comme vous de moi, votre amour, j'en suis sûre, ne le souffrirait jamais. Mais vous êtes toujours avec moi, et vous me voyez toujours. Mon tendre Maître, une pareille inégalité est trop cruelle; considérez, je vous en supplie, qu'elle n'est pas juste envers celle qui vous aime d'un si ardent amour…

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