mercredi 30 novembre 2011

Thérèse d'Avila, Chemin 53, extraits

Thérèse d'Avila
Chemin de perfection 53 extraits (Escorial)


Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte pas à pas du Chemin de Perfection.

Continue à traiter de l’oraison de quiétude. Chapitre très important.


1 Cette oraison de quiétude est celle où, selon moi, le Seigneur entreprend, je le répète, de nous montrer qu’il entend notre demande, et commence déjà à nous donner son royaume ici-bas pour que nous puissions véritablement louer son nom, et pour que nous essayions que les autres le louent

2 C’est quelque chose de surnaturel et, quels que soient nos efforts, nous ne pouvons l’acquérir par nous-mêmes car, dans cet état, l’âme rentre dans la paix, ou plutôt : le Seigneur l’y met par sa présence, comme il fit pour le juste Siméon ; toutes les puissances sont dans le repos. L’âme comprend - d’une façon qui n’a rien à voir avec les sens extérieurs - qu’elle est déjà tout près de son Dieu et que, pour peu qu’elle s’en approchât encore un petit peu, elle ne ferait qu’un avec lui par la grâce de l’union. Ce n’est pas qu’elle le voie des yeux du corps ni de ceux de l’âme. Le juste Siméon, en regardant le glorieux Enfant, ne voyait qu’un petit pauvre … mais l’Enfant lui-même lui fit connaître qui il était. C’est de cette manière qu’il se révèle à l’âme, bien que ce ne soit pas avec cette clarté, car elle ne comprend pas encore ; elle voit seulement qu’elle est dans le royaume …

3 C’est comme un assoupissement intérieur et extérieur, … l’âme est si heureuse de seulement se voir près de la fontaine qu’avant même d’avoir bu elle est déjà rassasiée ; il semble qu’elle n’ait plus rien à désirer : les puissances sont totalement apaisées et ne voudraient pas se remuer ; toutefois, elles ne sont pas suspendues, car elles peuvent penser à celui auprès de qui elles se trouvent ; c’est une pensée paisible… Elles sont dans le palais, près du Roi ; elles sont dans son royaume car le Seigneur commence déjà à le leur donner ici-bas…

4 Quand j’ai parlé de l’oraison de quiétude, j’ai omis de dire ceci : il arrive souvent que l’âme soit dans une quiétude profonde, et l’entendement si élevé, que ce qui se passe ne semble pas avoir lieu dans sa maison. …. lorsque la volonté est dans cette quiétude, elle ne doit pas plus faire cas de l’entendement que d’un fou, car si elle veut l’attirer à elle, il lui arrivera forcément d’être distraite et quelque peu inquiète. Or, à ce degré d’oraison, tout cela se soldera par de la fatigue et aucun gain pour l’âme : elle perdra ce que le Seigneur lui a donné sans aucune fatigue de sa part.

5 … L’âme est comme un enfant qui tète encore, et sa mère, dans sa tendresse, fait couler le lait dans sa bouche sans qu’il ait besoin de remuer les lèvres. De même ici, sans effort de l’entendement, le Seigneur met tout dans l’âme, et il veut qu’elle comprenne qu’il est là, et qu’elle avale le lait qu’il lui donne sans cesser de réaliser qu’il le lui donne, et sans cesser d’aimer. Si elle veut entrer en lutte pour que l’entendement participe à son bonheur et le ramener à elle, elle ne pourra y parvenir ; elle laissera forcément tomber le lait de sa bouche, et perdra cette divine subsistance.

6 C’est en ceci et en d’autres choses que cette oraison est différente de celle où l’âme est unie à Dieu ; dans cette dernière, l’âme n’a pas même à avaler. Elle trouve la nourriture au-dedans d’elle-même sans comprendre comment le Seigneur l’y a mise. Dans l’oraison de quiétude, il semble que le Seigneur veuille encore que l’âme travaille un petit peu, mais ce travail s’effectue dans une telle paix que l’âme ne s’en rend pour ainsi dire pas compte. … Quand l’âme, donc, est élevée à ce degré d’oraison, elle éprouve un contentement paisible et profond dans la volonté, un grand apaisement.

7 Enfin, tant que durent la satisfaction et la jouissance expérimentées par l’âme, on peut affirmer à juste titre que nous sommes dans le royaume, et que le Père Éternel a entendu notre demande puisqu’il est venu à nous. O heureuse requête que celle où nous demandons un si grand bien sans le comprendre ! …

8 Il y a de nombreuses personnes - et j’ai été l’une d’elles - à qui le Seigneur donne de tendres sentiments de dévotion et de saintes inspirations, qu’il éclaire sur la vraie valeur de toutes choses et à qui, enfin, il donne ce royaume en les mettant dans cette oraison de quiétude ; or, elles font les sourdes…

9 N’agissez pas ainsi, mes soeurs, quand le Seigneur vous accordera cette grâce ; considérez que vous perdriez un grand trésor, et que vous faites beaucoup plus en disant de temps en temps une parole du Paternoster qu’en le récitant souvent à la hâte et sans penser à ce que vous dites. Celui que vous priez est tout près de vous ; il ne peut manquer de vous entendre. C’est ainsi, croyez-moi, que vous bénirez véritablement son nom et le sanctifierez car, comme membre de sa maison, vous glorifiez le Seigneur et le louez avec plus d’ardeur et de désir, et vous ne pourrez plus, semble-t-il, cesser de le servir. Ainsi, je vous conseille d’être très vigilantes sur ce point, parce que c’est très important.

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