vendredi 17 août 2012

Thérèse d'Avile, Fondations 18, extraits


Thérèse d'Avila

Fondations, 18 (traduction Marcelle Auclair), extraits

Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte du Livre des Fondations

De la fondation du monastère de Saint-Joseph de Salamanque, en l'année 1570, et de quelques avis d'importance pour les Prieures.

1 … J'étais occupée à tout cela lorsqu'un recteur de la Compagnie de Jésus de Salamanque m'écrivit qu'un de nos monastères y était nécessaire, et il m'en donnait les raisons; j'avais déjà repoussé l'idée d'y fonder un couvent sans revenu car cette ville est pauvre. Considérant cependant qu'Avila l'est tout autant, que jamais Dieu n'a fait ni ne fera défaut à quiconque le sert lorsque les choses sont organisées raisonnablement et que les religieuses, peu nombreuses, s'aident du travail de leurs mains, j'acceptai. De Tolède j'allai à Avila, c'est de là que je m'occupai d'obtenir l'autorisation de l'Évêque….

2 Lorsque j'eus cette autorisation…Je m'occupai immédiatement de louer une maison dont m'avait parlé une dame de ma connaissance, mais il y avait une difficulté: nous n'étions pas à la période où se font les locations, et des étudiants l'habitaient; la propriétaire décida de la leur reprendre à l'arrivée des nouveaux locataires…

3 Lorsque j'eus l'autorisation et l'assurance d'un logement, je me fiai pour le reste à la miséricorde de Dieu, n'ayant sur place personne qui puisse m'aider dans tout ce qu'il y avait à faire pour organiser la maison; je m'y rendis donc avec une seule compagne, pour plus de discrétion, jugeant prudent de ne faire venir des religieuses que lorsque nous aurions pris possession…. Nous arrivâmes à Salamanque la veille de la Toussaint, après avoir fait une longue route la nuit précédente, par grand froid, et couché dans un village, car j'étais bien malade.

4 Dans ces récits des Fondations, je ne parle pas de la grande épreuve des voyages par le froid, sous le soleil ou sous la neige qui parfois ne cessait de toute la journée, le nombre de fois où nous nous sommes perdues, où j'eus de grands maux ou une grosse fièvre; mais, gloire à Dieu, moi qui n'ai d'ordinaire qu'une faible santé je voyais clairement que Dieu me donnait des forces…

5 … une fois en route, pensant à celui que je servais, tout me semblait peu de chose à l'idée qu'en cette maison on louerait le Seigneur, et que le Saint-Sacrement y serait…nous devrions trouver une grande consolation à voir Jésus-Christ, vrai Dieu, vrai Homme, présent dans le Saint-Sacrement en de nombreuses localités…

6 Je m'éloigne du sujet de la fondation dont j'ai commencé à parler, mais il me vient à l'esprit certaines remarques sur la mortification qui peuvent être utiles… La modération est une grande chose dans le gouvernement, elle est fort nécessaire dans ces maisons…

8 La mortification n'est pas d'obligation: voilà ce qu'elles doivent considérer en tout premier lieu. Elle est nécessaire pour que l'âme mérite sa liberté et une haute perfection, mais cela ne s'obtient pas rapidement, il faut les y aider en tenant compte de l'intelligence et de la spiritualité que Dieu leur a données…

9 … La Prieure ne doit pas croire qu'elle a tôt fait de connaître les âmes; qu'elle laisse cela à Dieu, lui seul les pénètre; qu'elle s'efforce plutôt de guider chacune d'elles dans la voie que lui ouvre Sa Majesté, à condition de ne pas manquer à l'obéissance ni aux prescriptions essentielles de la Règle et des Constitutions…

10 Mais revenons à la mortification: la Prieure, pour mortifier une religieuse, lui impose un petit sacrifice qui est en réalité pour elle une grosse épreuve; elle obéit, mais elle reste dans un tel état d'inquiétude et de tentations qu'il eût mieux valu ne rien lui commander. La Prieure doit être sur ses gardes et ne pas chercher à conduire une religieuse vers la perfection à la force du poignet, qu'elle ruse, au contraire, et qu'elle aille petit à petit, jusqu'à que le Seigneur agisse. Ce qu'on fait pour son progrès ne doit pas être de nature à l'inquiéter et à lui troubler l'esprit, ce serait contraire une chose terrible, car sans ce souci de perfection, elle serait une très bonne religieuse. Progressivement, elle se met bien à suivre le train des autres, comme nous l'avons déjà vu, sinon, elle sera tout de même sauvée, sans cette vertu… Certaines endureront de grandes mortifications, elles en seront d'autant plus heureuses que le sacrifice sera plus dur car le Seigneur leur a donné assez de force d'âme pour lui abandonner leur volonté, mais d'autres ne supporteront pas la plus petite épreuve, de même qu'un enfant ne peut charger deux fanègues de blé; non seulement il ne les portera pas, mais il croulera sous le faix. Donc, mes filles (c'est aux Prieures que je parle), pardonnez-moi de m'étendre longuement sur ce sujet, mais ce que j'ai vu m'y oblige.



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