dimanche 28 avril 2013

Homélie 5° dimanche de Pâques C


Homélie 5° dimanche de Pâques C

Carmel de Saint-Maur -  Père Maurice Boisson

C’est assez courant de porter un signe distinctif d’appartenance à un groupe : un T-shirt aux couleurs d’un club de foot, un pin’s représentant un logo au revers de la veste, un autocollant sur la voiture, un habit religieux, le portrait d’un chanteur sur la casquette… On pourrait allonger la liste des signes qui indiquent une appartenance à tel ou tel groupe. On a besoin d’un signe qui rassemble, qui permet d’être reconnu parmi des gens qui partagent les mêmes intérêts, les mêmes convictions, la même adhésion à une cause, à une religion, un pays. On en est. Tu en es. On est connu et on se reconnaît à ce signe, à ce logo, à cet habillement, à ce langage.

A quel signe reconnaît-on les chrétiens, ceux qui adhèrent au Christ et à son message ? Spontanément, on dirait : à une croix, à des rites, à une doctrine…

« Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres. » (Jean 13,35)

Voilà le signe de reconnaissance, nous dit Jésus dans cet Evangile : la qualité de nos relations. Jésus prononce ces paroles quelques heures avant de mourir, c’est dire leur importance : un Testament, alors que Jésus est pris d’un profond cafard de quitter ses amis, de pressentir l’abandon de Pierre et des autres, et de voir Judas sortir dans la nuit. Paroles pleines de gravité et de tendresse : mes petits enfants, voici l’ultime recommandation : vous aimer les uns les autres. Souvent on s’arrête là, sans dire la suite. Alors c’est vraiment banal, « aimez-vous », un peu gnangnan : Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, Alléluia ! 

On sait bien que la réalité est toute autre, qu’il faut se coltiner le caractère, les défauts, les manies de ses proches et réciproquement, qu’il faut s’affronter aux idées, aux comportements différents. Le signe distinctif que nous propose Jésus n’est pas « seulement »  « aimez-vous », mais « comme je vous ai aimés » (Jean 13,34). C’est le comme qui fait signe. S’aimer comme Dieu nous aime : dans la gratuité du don de l'amour donné et reçu comme le Christ l’a vécu.

Aimez-vous comme je t’aime, Pierre, toi qui vas me renier tout à l’heure.

Comme je t’ai aimé, Matthieu, toi le percepteur sans scrupule.


Comme je t’ai aimé, Judas, dans un dernier geste de tendresse avant que tu ne t’enfonces dans la nuit…

Comme j’ai aimé la Samaritaine en lui proposant l’eau vive de l’amour vrai, Marie Madeleine à qui j’ai ouvert la porte du pardon de Dieu, le lépreux, le sourd-muet et les autres.

Comme je vous aime, vous tous, mes amis, dans le don de ma vie, pour qu’à votre tour vous soyez donnants de l’amour dont vous êtes aimés. Ce sera le signe distinctif que vous êtes mes disciples, si vous vous aimez « à la chrétienne ». C’est « ce qui montrera à tous que vous êtes mes disciples. »

Cette ultime recommandation de Jésus est un chemin : on n’est pas arrivé! « Qu’il est difficile d’aimer » dit la chanson. L’important, c’est de prendre le chemin, de puiser la force d’Aimer à la source.

L’Abbé Pierre, qui s’y connaissait dans ce domaine, a voulu que soit écrit sur sa tombe : « Il a essayé d’aimer. » A un journaliste de la télévision qui lui demandait : « C’est quoi, la vie ? », ce même Abbé Pierre répondit : « La vie, c’est le temps que Dieu nous donne pour apprendre à aimer. »

Prendre ce chemin, c’est participer à faire advenir, ici et maintenant, ce « ciel nouveau » et cette « terre nouvelle » dont parle Saint Jean dans la deuxième lecture (Apocalypse 21,1). C’est faire disparaître du quotidien le premier ciel, la première terre ; c’est-à-dire tout ce qui peut nuire aux relations fraternelles, enrayer le vivre ensemble et ainsi rendre peu crédible notre annonce de l’Evangile.

On nous reconnaîtra à quoi ? A « l’amour que vous aurez les uns pour les autres ». Pourquoi ? Ubi caritas et amor, Deus ibi est (où sont amour et charité, Dieu est là).

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