dimanche 3 novembre 2013

Homélie 31e dimanche C


Homélie 31e dimanche C
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson

Quand deux regards se croisent ! Ca peut changer la vie. C’est vrai entre deux personnes, mais aussi quand Dieu croise notre regard.

Qu’est-il donc arrivé à Monsieur Zachée ? Monsieur Zachée, c’était quelqu’un de riche – dit Luc : le directeur des impôts de la ville populeuse de Jéricho, occupée par les Romains.

Monsieur Zachée ne manquait de rien, sinon de l’essentiel : de la considération et de la bienveillance de ses compatriotes. Il était détesté, lui, le collaborateur, ramassant de l’argent sur le dos du peuple, pour l’occupant. Comme il payait à celui-ci un forfait d’impôt, il pouvait ramasser et garder ce qu’il voulait, et s’enrichir.

Bref, toujours est-il que ce Monsieur Zachée avait un désir secret : il cherchait à voir qui était Jésus. Pourquoi ? On ne sait pas. C’est le mystère de chacun, et de ses désirs profonds. Comme il était petit et qu’il y avait foule, il grimpe sur un arbre - c’est pas très discret !

Il a suffi à Jésus de lever les yeux, et de croiser le regard de ce publicain. Des regards qui se croisent et se rencontrent : et il arrive quelque chose de nouveau à celui dont le désir se réalisait - mais peut-être autrement qu’il l’avait prévu.

Il n’est pas habitué, cet homme, à ce regard bienveillant que Jésus pose sur lui : il n’est pas habitué à la douceur de cette voix qui l’appelle ; ce qui est son pain quotidien, ce sont les yeux qui se détournent sur son passage, les regards méprisants qui le blessent, les paroles de haine – même s’il sait bien pourquoi.

Lui qui était venu pour voir, c’est lui qui est vu - et par quel regard : le regard même de Dieu en Jésus, un regard qui ne rejette et ne condamne jamais, qui va au-delà des étiquettes pour accueillir et aimer ; et, parce qu’il aime, il appelle à plus.

Un regard méprisant est toujours paralysant, bloquant ou révoltant. Un regard aimant est toujours appelant et apaisant.

« Vu, t’est vu ! » - et notre homme entend Jésus l’appeler par son nom : non pas « Monsieur Zachée », mais « Zachée » - ce qu’il est en vérité – « Zachée », qui veut dire : Dieu se souvient.

« Descends vite » (Luc 19,5) – non seulement de ton arbre, mais de ta suffisance, de ta fonction, de tes étiquettes collées à ta peau.

« Aujourd’hui il faut que j’aille demeurer chez toi » (Luc 19,5).

Il n’en croit pas ses yeux et ses oreilles, ce pécheur public, indigne aux yeux de tous, et sans doute aussi à ses propres yeux. C’est toujours étonnant comment une attention, une parole, un regard peuvent réveiller en chacun ce qu’il a de meilleur, et aussi parfois faire l’inverse, si le regard et les paroles sont méchants.

C’est le regard qui nous espère, c’est le regard de Dieu.

Alors c’est la joie qui domine, dans ce cœur coupable et culpabilisé.

Il « reçut Jésus avec joie » - dit Luc (19,6).

Au milieu des récriminations et des jalousies : il est allé loger chez un pécheur. Le regard, la parole et la présence de Jésus transforment le regard et la vie de Zachée ; quelque chose bascule en lui : « Je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens » (Luc 19,8) – « et je vais réparer les torts que j’ai causés. »

Il n’a pas forcément changé de métier, il n’est pas forcément venu dans l’équipe de Jésus – comme Matthieu son collègue – on ne sait pas la suite, mais le regard de Jésus arrivant jusqu’à la branche où il était grimpé l’a atteint au plus profond de lui-même, traversant les étiquettes, la mauvaise réputation et les actions malfaisantes de Zachée. Il est aimé non pas « tel qu’il est » - comme on dit – mais tel qu’il va pouvoir devenir ou redevenir sous le regard aimant de Dieu. Dieu nous aime - pas tant parce qu’on est digne d’être aimé, mais pour qu’on le devienne : aimable, digne d’être aimé.

Cette rencontre de Zachée et de Jésus, c’est aussi notre histoire, notre expérience. Au cœur de nos faiblesses, un désir secret, une recherche intérieure, peuvent nous faire sortir de nous-mêmes, des apparences, de nos enfermements, pour laisser poser sur nous un regard qui fait grandir.

« Bernard, Marie, Jacques, Thérèse, Maurice, … et les autres : descends de ton arbre, je vais demeurer dans ta maison, chez toi, dans ton cœur. »

N’aie pas peur, laisse-toi regarder par le Christ, car il t’aime.

 

1 commentaire:

Sophie a dit…

A l'image du Seigneur, chaque jour soyons attentifs et conscients du regard - de chaque regard - que nous déposons sur l'autre.

Vivre sa foi dans ces petits gestes presque insignifiants du quotidien, aimer en vérité, rayonner de compassion et de tendresse pour tous ceux qui nous entourent.

S'élever dans la fraternité par le regard aimant, exprimer la lumière du Seigneur dans chacun de nos regards.