lundi 11 novembre 2013


Homélie 32e dimanche C
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson

En parlant de son papy décédé il y a quelques semaines, un petit garçon demandait à sa maman : « Dis, Maman, le Papy, c’est quand qu’il aura fini d’être mort ? »

Quelle lourde et grande question cet enfant portait dans sa tête, et surtout dans son cœur !

En ces jours de novembre, non seulement on pense plus particulièrement à ceux qui nous ont quitté d’une façon visible, on prie pour eux, on en fait le souvenir - comme demain, onze novembre.

Mais nous sommes renvoyés aux questions de fond qui habitent tout homme, croyant ou non :

- la mort, et après ?

- y a-t-il un après ?

- et puis, après tout, peu importe. Que vais-je devenir ?

- que deviendront toutes ces relations, d’amour, d’affection, partagée ?

Un sondage révélait qu’un pourcentage non négligeable de chrétiens pratiquants ne croyait pas à la résurrection. Ce n’est pas nouveau ! C’est l’Evangile de ce dimanche.

Des Juifs, qui eux aussi pratiquaient la religion, les Sadducéens, prétendaient qu’il n’y a pas de résurrection. Et ils posent la question à Jésus, par une histoire aussi ridicule qu’invraisemblable, pour montrer que la résurrection c’est pas possible et que c’est absurde d’y croire. « Si un homme a un frère marié mais qui meurt sans enfant, qu’il épouse la veuve pour donner une descendance à son frère. » (Luc 20,28) C’était la Loi de Moïse, dans une société où la descendance, c’était primordial.

Mais « il y avait sept frères… » (Luc 20,30) – et ils épousent successivement la même femme devenue veuve à chaque fois. C’est subtil, faut suivre ! Ils moururent successivement les sept sans laisser d’enfant, et la femme, veuve sept fois, mourut elle aussi, bien sûr !

Alors la question est simple : « Comme les sept l’ont eue pour femme, s’il y a une résurrection, de qui sera-t-elle l’épouse ? Ca peut pas marcher. »

Jésus, calmement, prend le temps de répondre. Dessous les apparences d’une histoire, il y a de vraies questions, qui sont encore celles d’aujourd’hui.


Dieu « n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants » - répond Jésus (Luc 20,38). « Ne vous perdez pas en imagination et en phantasmes pour savoir comment ça sera. Si Dieu est le Dieu des vivants, nous serons vivants, ils sont vivants – c’est déjà pas mal. »

Mais - dit Jésus, ce sera différent. C’est pas parce que c’est différent que ça n’existe pas, ce sera autrement, et on peut être vivant de bien des manières, tout en restant nous-mêmes.

C’est un peu comme si je me disais : « Bien sûr, je crois à la résurrection - sinon je ne serais pas là – mais est-ce que je vais ressusciter et passer mon éternité, avec mes pontages, avec mon arthrose, mon mauvais caractère, et en plus avec untel - ou une-telle - qui va continuer de m’énerver pour l’éternité ? C’est long, comme disait quelqu’un – surtout vers la fin ! »

On voit bien, dans nos sourires, que, comme les Sadducéens avec leur histoire, on est dans le délire.

Ce sera toujours moi, vous – autrement – comme Jésus ressuscité se présente à ses amis, lui Jésus, puisqu’ils le reconnaissant ; mais il est autrement, il n’a pas besoin d’ouvrir une porte pour être là.

La chenille ne peut pas s’imaginer qu’elle sera un beau papillon… pourtant ! La belle tulipe qui s’ouvre au printemps, elle n’a pas le même aspect que le bulbe mis dans la terre en novembre… pourtant ! Ce bel épis de blé doré de juillet n’a pas grand-chose à voir avec ce grain qui a pourri tout l’hiver… Pourtant ! C’est la même vie.

Ce sont des comparaisons, bien sûr. « Dieu est le Dieu des vivants » - c’est le message de ce dimanche.

Une femme chirurgienne avait réussi à recoudre le bras arraché d’un jeune garçon. Elle-même avait cinq enfants. Elle en avait perdu un brutalement à quelques mois. On lui demandait : « Pourquoi dites-vous que vous avez cinq enfants ? – Mais Martin (celui qu’elle avait perdu), il existe, il est vivant. »

On lui disait aussi de donner ce prénom de Martin aux garçons nés après lui. « J’ai toujours refusé – dit-elle – parce que Martin existe, il est vivant. »

C’est l’écho à ce beau témoignage de la première lecture : « Nous serons vivants pour une vie éternelle » (cf. 2 Martyrs d’Israël 7,9) – disent les sept jeunes frères martyrs.

On demandait une fois à un prêtre de chez nous : « Qu’est-ce que tu vas dire au Seigneur quand tu le rencontreras ? » Dans un sourire malicieux : « Ah ! Je m’en doutais ! »

C’est un bel écho à ce que disait Sainte Thérèse de Lisieux : « Je ne meurs pas, j’entre dans la vie. » (Lettre 245)

« Notre Dieu est le Dieu des vivants. »

« Choisis la vie. » (Deutéronome 30,19)

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