dimanche 6 avril 2014

Homélie 5e Carême A 2014

Homélie 5e Carême A 2014
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson

Quand on fait de la route, de la randonnée, une excursion, il est recommandé de nous arrêter de temps en temps… et de repartir, bien sûr !

Quand on fait un chemin intérieur, comme celui du Carême, ou de la vie religieuse, ou vers des décisions importantes, il est bon aussi de faire quelques étapes… et de repartir, bien sûr !

C’est ce que nous faisons ces dernières semaines de Carême : trois étapes, trois rencontres, jalonnent notre chemin.

Au bord d’un puits : Jésus rencontre une femme de Samarie, avec sa vie compliquée et sa soif d’amour vrai. « Celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai – dit Jésus - n’aura plus jamais soif » (Jean 4,14)

Près d’une piscine, à Siloé : Jésus rencontre un non-voyant et son désir de voir clair, son désir de lumière. « Va te laver à la piscine de Siloé » (Jean 9,7) « Lave-toi les yeux, et le cœur, et tu verras » - dit Jésus.

Dans la maison de l’amitié, à Béthanie : aujourd’hui, Jésus redonne vie à son ami Lazare.

Trois rencontres avec nous, sur nos chemins, au bord de nos sentiers intérieurs, dans nos maisons, dans notre cœur. Il nous offre l’eau vive, la source, dans nos désirs d’eau pure et fraiche ; la lumière dans nos aveuglements, nos marches à tâtons dans l’obscurité. Il nous offre, ce matin, la vie, la liberté intérieure dans nos enfermements, nos tombeaux, nos pieds et mains liés par les bandelettes qui les empêchent d’aller.

Ça se passe dans la maison de notre cœur, à Béthanie, village tout près de Jérusalem.

Jésus aime s’y arrêter, accueilli par Marthe, Marie, Lazare. Il les aimait bien, dit Saint Jean (cf. Jean 11,5).

Lazare, son ami, vient de mourir – et Jésus pleure. Le cœur de Dieu n’est pas en marbre – c’est dans les statues qu’il l’est. « Il en coûte au Seigneur de voir mourir les siens » - dit le Psaume (115,15).

Les liens d’amitié, d’amour, sont source de vie. Ils lient et ils relient, ils libèrent.

Dans cette maison de l’amitié, la vie revient, elle est redonnée ; comme en nous-mêmes l’eau vive, la lumière, la vie nous sont données par celui qui est la Vie, la Lumière, la Vérité, si nous consentons à l’inviter dans notre maison, à nous arrêter près du puits ou de la piscine… sur nos chemins.

« Lazare, viens dehors ! » - crie Jésus d’une voix forte (Jean 11,43) ; pour se faire entendre parmi les voix, les rumeurs de mort, d’enfermement, pour que la vie se fasse entendre jusque-là où, apparemment, il n’y a plus de voix : derrière la pierre du tombeau.

Une parole forte qui veut ouvrir la pierre de nos cœurs fermés : « Viens dehors - sors de toi-même, de ce qui t’enferme. »

« Déliez-le, et laissez-le aller » - dit Jésus (Jean 11,44), quand Lazare sort avec ses pansements, ses bandelettes qui le ligotent, qui l’empêchent d’aller, d’avancer.

C’est le même appel que nous avons entendu dans la première lecture : « Je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai sortir » (Ezéchiel 37,12) ; la même voix à la fois forte et douce dont l’écho résonne jusqu’au fond du puits, de nous-mêmes.

« Si tu savais le don de Dieu » (Jean 4,10). Cette voix forte et douce qu’on entend même si nos yeux ne le voient pas. « Va te laver les yeux et le cœur. » La même présence d’amitié qui appelle : « Viens dehors – avec nous. »

« Si tu savais le don de Dieu » - le don de la source qui jaillit du cœur de Dieu, le don de la lumière de la vie et de la liberté intérieure. « Tu me demanderais cette eau, cette lumière, cette vie. Ce don te rendra donnant, à ton tour, de ce don, de Dieu. »

Et si c’était nous, notre monde : la Samaritaine, le non-voyant, Lazare… tellement désireux de la lumière, de vie, d’eau fraiche, d’une source – et en même temps tellement enfermés dans nos obscurités, dans nos comas intérieurs.

Laissons-nous habiter par cette voix de l’Ami de Lazare, notre Ami, le Christ : « Viens dehors – tu verras l’aube, le matin de Pâques. »

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