Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Actes 1,15-17.20a.20c-26 ; Psaume 102 ; 1
Jean 4,11-16 ; Jean 17,11b-19
Il
nous arrive de prier, bien sûr ! Je ne dis pas ça pour nos Sœurs, qui ont
des temps de prière réguliers, rythmant leur journée par la prière
communautaire ou personnelle. Comme Jésus a prié pour ses amis – c’est
l’Evangile de ce dimanche –, les Sœurs prient pour nous, aux intentions qu’on
leur confie, pour le monde, l’Eglise.
Chacune
et chacun de nous prie aussi et essaie de prier à sa manière, à son rythme,
selon son activité, quand il peut et aussi quand le besoin de prier se fait
sentir plus fortement, selon les événements, les soucis, les épreuves, la vie
des proches, les demandes particulières, les grâces reçues. C’est bien normal, Dieu notre Père ne rejette pas celui
qui l’appelle, qui crie vers lui ; dans une ambiance bousculée, rapide, on
ressent aussi le besoin de se reprendre, comme on dit ; on n’a pas
seulement besoin de vitamines pour notre équilibre physique, mais on a beaucoup
besoin de vitamines spirituelles, pour notre intérieur !
L’Evangile
de ce matin nous montre Jésus en prière ; c’est souvent, dans
l’Evangile : il se retire à l’écart, sur la montagne ou dans un endroit
désert, tôt le matin ou dans la nuit. Il rejoint son Père dans le silence et
l’intimité ; lui aussi, comme nous, a besoin de refaire ses forces, de
confier au Père ses amis, de lui parler des gens qu’il a rencontrés, guéris,
remis debout, et d’écouter ce que lui dit le Père.
Quelques
heures avant sa mort, Jésus prie… pour ceux qui lui sont chers, ses amis, ceux
qui croiront en lui. Il sait que ce ne sera pas facile pour eux. Il prie pour
nous, parce qu’il nous aime.
On
prie souvent pour ce / ceux qui nous tient / tiennent à cœur.
« J’ai veillé sur eux », dit-il (Jean 17,12). Il veille sur nous, pas pour
nous sur-veiller ! – mais pour prendre soin. Il veille à ce que nous
tenions dans l’essentiel, dans ce qui est bon pour nous et les autres.
Dans
cette dernière prière, Jésus livre son cœur, son désir, ce à quoi il tient. Ses
recommandations sont un bel héritage, lourd d’avenir, nourri de tendresse. Il
nous confie au soin de Dieu. Dans cet Evangile, que demande Jésus à Dieu son
Père, pour nous, pour ceux qui croiront en lui, et pour ses frères
humains ? Quatre grâces, peut-on dire, quatre dons, qui sont des qualités
de Dieu, qui sont bonnes pour nous.
-
« Garde-les unis (…) Qu’ils soient un comme
nous-mêmes » (Jean 17,11).
Heureux d’être riches (et pas jaloux) de leurs diversités. « Garde-les
unis »…, pas dans un même moule !
« On les reconnaîtra pour mes disciples s’ils
s’aiment, s’ils sont donnant de cet Amour que nous-mêmes leur donnons, toi et
moi. »
« Tu
nous as tellement aimés. Nous devons nous aimer les uns les autres. Si nous nous aimons, tu demeures en nous. »
C’est la deuxième lecture (cf. 1 Jean 4,11-12).
C’est pas rien, quand on y pense, d’héberger Dieu
lui-même en nous, que chacune et chacun de nous soit la demeure, la maison de
Dieu… « Vous êtes le temple de
Dieu », dira Saint Paul (1 Corinthiens 3,16). Quelle dignité de tout
être humain !
-
« Qu’ils aient en eux ma joie, qu’ils en soient
comblés » (Jean 17,13). La joie
est la signature de Dieu sur ce que nous sommes, ce que nous faisons. Il valide
le bien que nous essayons de faire, et le « plus » que nous essayons
d’être, parce que ça lui ressemble. On est content, sans se prendre la tête.
Arrêtons de nous dévaloriser « humblement » ! Cette joie n’est
ni facile, ni bruyante. Elle traverse les interstices des épreuves, de la
tristesse, des larmes, pour pénétrer comme un rayon de caresse, de douceur,
venue tout droit de la présence du Christ ressuscité au plus intime de
nous-mêmes.
« Que ma
joie soit en eux », en nous.
« Il y a des chrétiens qui semblent avoir un air
de Carême sans Pâques », dit le Pape François dans « La joie de
l’Evangile ». La joie s’éveille comme une confiance secrète au cœur même
des soucis et des peines. « Votre
peine se changera en joie », dit Jésus quelques lignes avant (Jean
16,20). « Votre peine mutera par force de la résurrection. »
Notre société multiplie les occasions de plaisir, mais
elle a bien du mal à secréter la joie ; c’est pour ça que Jésus prie pour
que sa joie soit en nous.
Les
deux autres grâces que Jésus demande pour nous dans sa prière :
-
Celle de nous
garder de pactiser avec le mauvais, avec le mal, la méchanceté sous toutes ses
formes.
-
Celle d’aimer et
de nous tenir, de nous fortifier dans et par la vérité. La vérité, c’est la
conformité, c’est d’être aux normes, non pas avec nos principes, nos idées,
mais avec ce que nous sommes et ce que nous sommes appelés à devenir, dans le
désir de Dieu.
La
prière de Jésus pour nous, comme pour toutes nos prières, ça demande
« qu’on y mette du nôtre » - comme on dit - comme nous le pouvons, à
notre manière. Tenons à ces temps même courts de respiration de l’air de Dieu,
d’écoute et de conversation intérieure, sans oublier de prendre régulièrement
des vitamines spirituelles. Nous nous en trouverons toujours bien.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire