mardi 1 novembre 2016

Homélie de la Toussaint



Homélie de la Toussaint
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson  

                Dans le cimetière d’un village, au Nord du Jura, j’ai trouvé sur une tombe, au pied d’une croix en bois, une plaque avec une inscription, que j’ai recopiée : « À toi, notre oncle, pauvre type mais riche gars ! »
                Il vivait seul, l’oncle Bernard, chahuté et moqué gentiment par les gens du village, comme « pas bien malin ». Mais, il avait un coeur « gros comme ça », toujours prêt à donner le coup de main, sans histoire avec les autres… Quelques personnes l’avaient accompagné à son enterrement, avec ses deux neveux, la seule famille qui lui restait, qui avaient posé cette plaque : « Pauvre type mais riche gars ».

                On est au coeur de cette fête de la Toussaint, fête de celles et ceux qui sont heureux, dit Jésus, parce qu’ils étaient de riches gars, de riches femmes dans leur coeur. Le même regard aimant de Jésus, regard de Dieu, - qui a croisé celui de Zachée, dimanche dernier -, croise le regard de ces gens, sur la pente du mont, en attente d’une parole d’espérance. 
                « Voyant les foules », nous voyant, Jésus rejoint nos coeurs, nos vies, nos aspirations, notre désir profond d’être heureux. Non pas d’un bonheur de quatre sous ou à des fortunes, mais de ce qui peut simplement remplir le coeur de ce pour qui et pour quoi nous sommes fait : pour Aimer. De ce regard de Jésus jaillissent les plus beaux secrets du désir de bonheur que chaque être humain porte en lui.
                Heureux êtes-vous les pauvres de coeur, assez désencombrés de vous-mêmes pour faire place à l’essentiel, aux autres, à Dieu.

                Heureux vous qui pleurez, non pas qui pleurnichez pour rien, mais à qui les morsures de la vie, des autres, de vous-mêmes donnent des raisons de pleurer, souvent en secret. Dieu essuiera toutes larmes de vos yeux !
                Heureux les doux, c’est-à-dire les forts à l’intérieur d’eux-mêmes pour refuser la violence. Heureux si tu peux rester droit dans les détours des injustices, des mensonges ou des magouilles… les coeurs droits.
                Heureux si vous avez le coeur gros de la peine des autres… les miséricordieux. Vous ressemblez à Dieu ! Heureux les raccommodeurs et les dépanneurs d’existences déchirées par la méchanceté ou la bêtise… Ceux qui font la paix, pas seulement qui la chantent…
                Vous êtes sur un chemin de bonheur, dès maintenant, dit Jésus, parce qu’en agissant ainsi, vous ressemblez à Dieu, à votre Père. Dieu est comme ça, c’est le portrait des Béatitudes.
                Devenir le portrait de notre Père, c’est ce que nous dit Saint Jean dans la 2ème lecture : « Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu… et nous lui serons semblables… quand nous le verrons tel qu’Il est. » Ces traits du visage et du coeur du Dieu Amour, que peu à peu nous laissons marquer sur nos propres visages et dans nos propres coeurs. Ils nous feront reconnaître de Lui, comme étant de sa famille, ses enfants bien-aimés, c’est notre ticket d’entrée. 
                Le brave oncle ne figure pas sur la liste des Saints du calendrier, comme beaucoup. Il est sur la liste de celles et de ceux que nous fêtons aujourd’hui, celles et ceux à qui nous pensons, que nous avons connus, aimés, parfois pas assez, avec qui nous avons fait un bout de route, d’une route qui continue au-delà du visible, par des liens impérissables, parce que l’Amour, la bonté, la paix, ça ne meurt pas. C’est la communion des Saints, ces liens invisibles mais réels, qui nous relient dans l’Amour du Père. Ils font partie de cette foule immense, décrite par Saint Jean dans la première lecture. « Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? » demande l’Ancien. Ils viennent de la traversée de la vie, par tempêtes et brises légères. Ils ont accosté dans le pays du coeur de Dieu, au rivage de Dieu, ce bonheur auquel ils ont essayé, tout simplement, de mettre quelques touches, souvent sans le savoir. Ils n’étaient certes pas parfaits, d’ailleurs être saint et être parfait, ce n’est pas pareil, ça ne va même pas toujours ensemble. 
                « Pauvre type, mais riche gars ! » Laissons-nous enrichir de la richesse de Dieu. C’est le chemin du bonheur, il passe par les Béatitudes. Avec Saint Augustin, nous pouvons dire : « Tu nous as fait pour Toi, Seigneur, et notre coeur est sans repos, tant qu’il ne demeure en Toi. » 
                Saints et Saintes de Dieu, riches gars, riches femmes par votre coeur, priez pour nous !

Aucun commentaire: