mardi 22 novembre 2016

Homélie du Christ Roi



Homélie du Christ Roi
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson  

            « Il faisait nuit sur la colline, en ce temps-là ! » Un certain vendredi. 3 mats dressés, 3 condamnés à mort par crucifixion. 2 malfaiteurs, un troisième homme accusé de laisser croire qu’il est le roi attendu pour libérer le pays de l’occupant. Il se prend pour le Bon Dieu! Les accusateurs et les juges : les notables et les chefs religieux. Les 3 condamnés sont en train de mourir. Affaire classée ! Ce soi-disant Roi n’a pas pris le pouvoir ! … Pas si sûr !!!
            En cet après-midi, c’est vrai, le pouvoir semble aux mains du MAL, de la Bête immonde dont parle Saint Jean dans l’Apocalypse. Toute espérance sera bientôt détruite. Même le ciel, habituellement d’un grand bleu dans ce pays, tire le rideau noir de la laideur du mal et de la méchanceté. Les chefs tournaient le condamné en dérision, les soldats se moquaient de lui, nous dit Luc. « Tu parles d’un roi ! », montrant l’inscription apparemment ridicule : « Celui-ci est le Roi des juifs ».
            Il va le montrer, ce condamné, qu’il est bien roi. Un roi, c’est quelqu’un qui a du pouvoir. Alors que, sur cette colline, le pouvoir semble dans les mains de la nuit, de la violence, de la haine, ce pouvoir va changer de main et surtout changer de cœurs et de sens. C’est juste pas possible que le dernier mot, la finale, le dernier but soient au mal, à l’égoïsme, à ce qui est méchant, mauvais, destructeur… 


            Ils étaient là, ces 3 hommes, cloués au sommet d’une colline mais au creux, aux bas-fonds de l’humanité, de la vie. Nous sommes peut-être sur cette colline, en ce temps-ci… Rappelez-vous… À côté de celui qu’on disait le Roi, il y avait ceux qu’on appelle les larrons. L’un se moque et injurie comme les chefs, les soldats et les accusateurs. L’autre ne hurle pas avec les loups. Il ouvre une brèche, un coup de couteau dans ce décor macabre, une étincelle dans la nuit noire des cœurs, qui ranime un feu jamais éteint. Avec le peu de force et de voix qui lui restait, tout bas : « Jésus ! », un prénom, un mot de tendresse, « Jésus, tu te rappelleras, j’étais à côté de toi, sur la colline, je sais que tu n’as rien fait de mal, je l’ai dit à mon compagnon. » « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume » (Lc 23,35). Dans ton Royaume ?! Tiens ! Il est roi d’un royaume, d’un monde qu’il est en train d’inaugurer… en donnant sa vie par amour pour ses frères et sœurs que nous sommes.

            Il faisait nuit sur la colline, mais l’aube commençait à poindre…
Au plus fort du pouvoir du mal, de la violence, et de toutes les pollutions destructrices - et il y en a aussi en nous - un autre pouvoir se faisait jour : celui d’aimer, de servir, de faire la paix, la justice, le vrai bien de tous, celui qui est dans les cœurs.
            C’est le Christ Roi de cet univers, qui, un jour, sera complètement débarrassé du mal et rempli de l’Amour : « Tout, par le Christ, lui sera enfin réconcilié, faisant la paix par le sang de sa Croix, la paix pour tous les êtres sur la terre et dans le ciel » (Col1, 20). Ce que sera ce Royaume, nous l’entendrons dans la Préface : « Un règne sans limite et sans fin, règne de grâce, de sainteté, règne de justice, d’Amour et de paix. » Cette promesse n’est pas encore réalisée, elle en est encore loin ! On le voit tous les jours, en nous-mêmes aussi. Mais elle germe, elle est déjà là, ici ou là, quand nous posons quelques signes de ce monde de Dieu, déjà là, qui adviendra; quelques signes concrets, ici, maintenant, porteurs d’amour. Notre baptême nous configure au Christ Roi, précisément pour poser quelques pierres, planter quelques fleurs dans ce Royaume d’Amour, tout simplement en aimant. 
            Alors, le larron, dans un soupir de tendresse, a reposé lentement sa tête : « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le paradis ».
            Il faisait nuit sur la colline, en ce temps-là… En ce temps-ci, aurons-nous ces petits gestes et paroles qui indiquent la présence de ce Royaume d’Amour, ébauché à l’ombre de la Croix, mais dont la lumière doit traverser nos vies ?

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