dimanche 11 décembre 2016

Homélie 3°DIMANCHE DU TEMPS DE L’AVENT



Homélie 3°DIMANCHE DU TEMPS DE L’AVENT 
Carmel de Saint-Maur - Père Farel Nance Djembo de Pointenoire, Congo

Bien chers frères et sœurs peuple de Dieu nous célébrons le III dimanche de l’Avent. Le dimanche de la joie. La joie du message de Noël, d’un monde nouveau. Pour méditer avec vous les textes de ce dimanche j’ai choisi de m’appesantir sur trois mots : l’Amour, le temps, les signes. 

Il était une fois sur une ile où vivaient tous les sentiments et les valeurs des hommes : la bonne humeur, la tristesse, le savoir… avec tous les autres inclus l’amour. Un jour on annonça aux sentiments que l’ile devait être engloutie par les eaux et il fallait la quitter immédiatement ; alors ils préparèrent tous les bateaux et partirent et seul l’amour voulut attendre jusqu’au dernier moment. Et quand l’ile fut sur le point de couler, l’Amour décida de demander de l’aide. La Richesse passa près de lui sur un bateau luxueux et l’Amour lui demanda si elle pouvait l’aider, elle répondit que le bateau était plein d’or et d’argent et il n’y avait pas de place pour lui. Et l’amour demanda à l’Orgueil qui répondit que tout était parfait et craignant que son bateau soit détruit par sa présence refusa de lui apporter de l’aide ; et l’Amour demanda à la Tristesse qui répondit qu’elle était si triste et avait besoin de rester seule ; et même la Bonne humeur passa tout près mais comme elle était si joyeuse, elle ne put entendre les cris de l’Amour.  Mais, subitement, une voix lui dit vient je t’emmène avec moi. Et c’était une personne âgée qui avait parlé. L’Amour se sentit si reconnaissant et dans l’euphorie oublia de demander le nom du vieux, et le vieux s’en alla. Et l’Amour alla demander au Savoir le nom de celui qui l’avait donc aidé.  Et le Savoir lui répondit que c’était le Temps. Et l’Amour demanda pourquoi est-ce le Temps l’avait aidé et le Savoir rempli de Sagesse lui répliqua « seul le Temps peut comprendre combien l’Amour est important dans la vie».

Du récit que j’ai raconté aux allures de récits d’enfants, est ce que nous ne le sommes pas pour le Père céleste, on comprend que seul dans le temps on peut comprendre l’amour. Mais quel amour ? et dans quel temps ? Dans le temps et avec le temps notre vie est rythmé. C’est le temps des hommes. C’est le temps d’une rencontre, le temps d’un mariage, le temps d’une vocation, le temps d’une épreuve mais toujours temps de l’histoire des hommes. Toutefois c’est un temps incomplet qui est appelé à se mettre au diapason du temps de Dieu. Le temps de Dieu c’est le temps de l’Amour vrai, un amour qui ne se gonfle d’orgueil, un amour qui se veut joyeux et non triste, un amour des petits. C’est toujours un temps qui reste incompréhensible aux yeux des hommes.  L’amour de Dieu qui vient côtoyer nos chemins et notre histoire ne peut se comprendre qu’avec son temps.
Dans le temps des hommes il nous arrive de se poser des questions, de douter de tout et de rien. C’est le lieu d’une insécurité sans merci. Combien de fois nos préjugés, nos convictions personnelles, nos prérequis nous ont fait passer à côté des choses essentielles ? Combien il nous a fallu du temps pour nous apercevoir que le regard négligé d’un voisin était aimable parce que la haine ou les préjugés avaient obscurci notre jugement ? Combien de fois il nous a été difficile de déceler et accepter le talent d’un autre, la sincérité d’un amour ? Combien de fois nous avons tâtonné à choisir notre chemin ? Combien de fois on a cru s’être trompé après beaucoup d’années de mariage ? Quelle a été l’attitude d’un chrétien après la venue du nouveau curé qui a tout changé ? Combien de questions nous nous posons sur l’Eglise et ses querelles de clochers ?  Et pourtant même le précurseur Jean le Baptiste dans la prison de Macheronte a dû se résoudre à demander si le temps de Jésus était celui du Messie : es-tu celui qui doit venir ? Et si nos doutes sont forts, le Seigneur répond par un Amour qui croit toujours en nous et son témoignage est plus fort. Jésus envoie un message qui respire l’amour de Dieu à travers les signes qui désormais vont accompagner les temps nouveaux inaugurés par lui. Et il ne peut que rappeler la grande prophétie d’Isaïe que je déclinerai en ces réponses de Jésus aux disciples de Jean comme étant les 6 signes du nouveau monde de l’Amour et du temps de Dieu et du Messie. Si ces signes ne sont pas visibles dans la communauté, le Messie n’a pas encore fait irruption dans notre vie, dans nos diocèses, dans nos familles, dans notre histoire. Là où arrive le Messie de Dieu tout change. Nous verrons le changement non avec des raisonnements philosophiques mais avec des signes concrets.
 Les aveugles voient ou mieux ceux qui marchent dans le noir, ceux qui souvent perdent l’orientation se font mal et font mal aux autres, ceux qui sont sur la route et ne sont pas toujours aidés et ne voient pas la réalité, la beauté de la vie, de la création, ceux-là voient désormais et peuvent aller vers leur but, leur idéal. Là où arrive la lumière de l’Evangile les aveuglent voient quel est le destin de l’homme. Les sourds entendent, le sourd c’est celui qui n’a pour seul repère sa propre personne, il vit dans son carcan, il n’écoute personne ou seulement la voix de ses passions, les sourds ne pouvaient pas écouter la parole de Dieu, le cri de celui qui souffre, l’Evangile de la vie, maintenant avec le Messie ils peuvent écouter la Parole du Maitre et peuvent aller sur les routes de la vie. Désormais ils peuvent écouter un message authentique des temps nouveaux.  Les boiteux marchent ou mieux ceux qui vivent des expédients, des subterfuges, des mensonges des gens et ils sont toujours aidés par les autres, ceux qui ne réussissent à rien faire dans la vie, ceux qui se contentent de peu et toujours mendient la charité des autres. Eux aussi peuvent marcher et devenir protagonistes de leur destin, désormais en contact avec la Parole du Messie ils peuvent marcher dans la direction juste. Combien de peuples ne demandent que cela.
 Les lépreux sont purifiés ou mieux ceux qui éprouvent une honte personnelle de leur vie, de leur histoire, ce sont aussi ceux qui sont rejetés par la communauté, ils sont l’image du pécheur qui a pris le mauvais chemin et pour qui tous veulent s’éloigner, ils ne sont pas beaux à voir, mais avec le Messie ils retrouvent aujourd’hui la joie de vivre en communauté, leur beauté et deviennent présentables.
 Les morts ressuscitent, ceux qui vivent seulement de la vie biologique mangent, boivent et se marient comme au temps de Noé et ne pensent pas à la vie de l’Esprit, mais ceux qui sont morts à la vie donnée par Christ, celui qui vit de l’amour pour les autres, celui qui vit cet échange avec les autres et s’éloigne de l’égoïsme, aujourd’hui ils ressuscitent et vivent pour Dieu et pour le ciel. Les pauvres reçoivent l’annonce du Règne de Dieu ceux que personne ne pouvait voir, personne ne pouvait avoir pitié et aujourd’hui le Christ mange avec eux, leur pardonne et ils retrouvent leur dignité. Personne ne doit se sentir refuser de Dieu. Chacun reçoit le soleil de l’amour de Dieu. Et Jésus conclut Heureux celui qui ne se scandalise c’est-à-dire celui qui ne trébuche pas devant la bonté miséricordieuse de Dieu.  Car nous vivons les temps nouveaux, le temps de l’amour vrai.
Et à la fin Jean-Baptiste devient le grand signe qui doit parler à la vie du croyant, du disciple. « Qu’êtes-vous allés voir au désert ? Un roseau agité par le vent ?... ». Eh bien non. Jean le Baptiste est un homme droit et constant, il a les raisons de sa foi, il ne se plie pas à la direction du vent, il n’est pas un opportuniste qui s’adapte à toutes les situations et s’incline devant les puissants. Saint Paul le rappelle dans la seconde lecture Jean Baptiste est un homme cohérent et constant. Certains disent que les temps ont changé on ne vit plus dans le moyen Age.
Chers frères et sœurs, peuple de Dieu, nous devons apprendre à distinguer ce qui vient du Maitre et ce qui vient de nos critères humains de raisonner. Comme chrétiens et père de famille et responsables de communauté quand on est convaincu des choix dignes il faut avoir le courage de les promouvoir même quand tout le monde prend une direction peu digne. Les jeunes en font les frais à l’université, ils sont appelés à rester cohérents. Le Baptiste est loin de ceux qui ne pensent qu’à se divertir. Et quand nous voyons clairs, nous devons être constants et cohérents.
La réponse du Maitre, au final, rassure et reste le témoignage plus beau et éloquent sur Jean-Baptiste et partant sur l’homme. Personne n’est plus grand que jean Baptiste mais celui qui entre dans le Royaume est plus grand que lui. Qui est entré dans le Règne de Dieu se trouve dans une position privilégie. Car qui a accueilli le visage du Christ, le temps de l’amour, le Messie, celui-là voit plus que Jean Baptiste. Ce que nous voyons aujourd’hui Jean avait seulement eu l’intuition, il est resté au seuil. Mais nous, nous avons eu la possibilité de le contempler ; Et aujourd’hui nous pouvons nous réjouir de ce que Jean-Baptiste nous apporte. Voilà le motif de joie de ce dimanche. L’amour de Dieu a un sens seulement dans le temps que le Messie nous introduit à travers les signes qui parlent au cœur du monde. Jean-Baptiste aujourd’hui est la figure du vrai disciple du Christ qui doute pour connaitre mieux. Et pour suivre Jésus il faut voir clair. Et la vie en communion avec la Parole de Dieu est ce voyage d’où la beauté et la profondeur ne consistent pas simplement à voir des nouveaux paysages mais à avoir des nouveaux yeux, des nouveaux regards sur l’homme, l’Eglise et la société.

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