mercredi 14 décembre 2016

Homélie de la fête de Saint Jean de la Croix



Homélie de la fête de Saint Jean de la Croix
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson  

Nous avons eu une belle session sur Saint Jean de la Croix, vous avez lu, médité ses œuvres. La fréquentation de l’expérience spirituelle de Saint Jean de la Croix, dans son approche de Dieu, nourrit notre propre vie spirituelle dans notre recherche d’union à Dieu. Il reste que Saint Jean de la Croix peut apparaître difficilement atteignable dans son expérience et cependant, il nous rejoint sur notre chemin spirituel.
Un peu difficile dans ce que dit de lui  l’oraison d’ouverture : le renoncement total à lui-même et un extraordinaire amour de la Passion. La montée de l’échelle, qui mène à l’union à Dieu, peut nous sembler rude et lente ! Cette échelle, dont le secret pour y monter est de descendre !
            On n’a peut-être pas toujours le cœur à chanter l’expérience de la nuit, ou de la source, que l’on connait dans la foi…nocturne, mais c’est le chemin de qui cherche à s’approcher de Dieu, à être en union avec lui, chemin progressif d’une rencontre, pour laquelle le Seigneur nous invite à ôter nos « sandales », comme Moïse approchant du buisson. C’est consentir à un dépouillement, à une nudité intérieure, sans autre moyen que de nous laisser conduire par l’Esprit, dit Paul dans la 2ème lecture, non pas de guider nous-mêmes l’Esprit là où nous voudrions le faire aller, mais nous laisser guider par lui là où il nous pousse.
            En fait, Saint Jean de la Croix nous est proche : par la vérité, la densité et la sincérité de son expérience humaine et spirituelle, qu’éclairent les lectures de cette fête.

            Le fond commun, la base commune des manières diverses de s’approcher de Dieu et de s’unir au Christ, c’est la réponse que nous donnons, chacun, chacune, réponse concrète, dans nos vies, à la parole fondatrice de notre relation à Dieu et aux autres. Elle est exprimée dans la 1ère lecture et par le psaume : « Je t’ai appelé par ton nom, tu es à moi, je serai avec toi, parce que tu as du prix à mes yeux, parce que tu as de la valeur et que je t’aime. »
            C’est la réponse à cet amour qui fonde notre expérience spirituelle. Rien ne se fait, ne peut se faire sans une relation d’amour, sans aimer… Bien sûr, on peut toujours faire des choses. Il s’agit, selon Saint Jean de la Croix, non pas de faire (ça, ça va encore bien) mais de nous laisser faire, de laisser faire en nous la présence de l’Amour de Dieu, de consentir librement à ce que cette Parole efficace de Dieu, qui fait ce qu’elle dit, nous fasse grandir ou descendre, dans la communion avec Lui. C’est l’expérience de la source, source de l’Amour de Saint Jean de la Croix. La source, on croit la connaître. Quand on est devant une source, on la voit sortir de terre, mais on ne sait pas d’où elle vient, on ne voit pas les petits filets, les quelques gouttes qui se fraient un passage dans l’obscurité et l’inconnu, les obstacles de la terre. Et pourtant, elle coule… de source. C’est ce qui se passe dans les profondeurs de notre être, de nos différentes communautés, exposé aux risques de dessèchement, de la nuit, de l’obstruction par les évènements, par les autres, par nos propres attitudes.
            Ces profondeurs ont besoin d’être réamorcées, réalimentées, re-sourcées c’est un des messages de Saint Jean de la Croix. Il a fait cette expérience dans les années de sécheresse, d’insuffisante ferveur  de l’ordre dans lequel il était entré, et qui l’ont poussé à chercher une autre source, celle des Chartreux…
Dans son cachot de Tolède, où des frères l’avaient rejeté : « Je n’apercevais, pour me guider, dit-il, que la lumière qui brille dans mon cœur. » Cette lumière n’est autre que de se savoir aimé d’un amour qui attend une réponse concrète, dans la vie.  C’est la vérité de toute vie spirituelle. Simplement.
 « Ta main me conduit, ta droite me saisit ». Encore faut-il consentir à se laisser conduire et à monter à l’échelle en la descendant, à la rencontre de celui qui le premier est descendu vers nous à Noël.

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