dimanche 5 mars 2017

Homélie du 1er dimanche de Carême, année A



Homélie du 1er dimanche de Carême, année A

Carmel de Saint –Maur – Père Maurice Boisson

« Vous y croyez, vous, au diable ? Et puis, vous, les curés, vous n’en parlez jamais. Vous ne savez dire que : « Dieu vous aime, aimez-vous ! » mais, ce n’est pas ça la vie ! » Ceci est le début d’une conversation récente avec quelqu’un, énervé des paroles méchantes entendues contre lui.
Et vous, vous y croyez au diable ? J’ai gentiment invité cette personne à venir à la messe au Carmel du 1er dimanche de Carême. On aimerait mieux ne pas avoir à croire à son existence, au diable, mais on est obligé de constater qu’il y a, dans le monde, des forces qui poussent au mal, et que ces forces, elles sont aussi à l’intérieur de nous-mêmes, cette tension que Saint Paul a bien exprimée : « Le bien que je veux, je ne le fais pas, le mal que je ne veux pas, je le fais » (Rm7,19)

            C’est l’expérience des premiers humains, rapportée d’une façon poétique et imagée dans la première lecture : « Vous ne mangerez pas du fruit de cet arbre, l’arbre de vie, sinon, vous mourrez. » (Gn3,3) Le Créateur avait mis un repère dans ce lieu de bonheur de l’origine. « Mais pas du tout, dit le serpent. Au contraire, si vous mangez du fruit de cet arbre, qui est agréable, désirable, vous serez comme des dieux. » C’est quand même tentant… et toujours tentant.

            C’est l’expérience de Jésus, juste après son baptême, attestant qu’il est bien le Fils de Dieu.
Le même Esprit que celui de son baptême, le pousse au désert, pour un temps d’épreuve, pour connaître la solidarité avec ce que vivent ses frères humains, confrontés aux forces du mal. Jésus est confronté au diable, qui veut le pousser à faire d’autres choix que ceux que Dieu, son Père, lui a confiés pour le bien de l’humanité.

            C’est notre expérience : la rencontre, l’affrontement, parfois le combat difficile entre l’attirance vers ce qui est l’orientation fondamentale de notre vie pour le bonheur et ce qui nous tire vers le bas, l’illusoire. On n’échappe pas à ces tensions, ni à ces sollicitations où notre liberté se trouve devant des choix. Le frère Christian de Chergé, prieur de Tibérine, moine assassiné, écrit dans son testament : « J’ai suffisamment vécu pour me savoir complice du mal qui semble, hélas, prévaloir dans le monde, et même complice de celui qui me frapperait aveuglement. »

            Jésus, tenté, non seulement au désert, mais tout au long de sa vie, se rend solidaire de notre condition humaine. En sortant vainqueur de ce combat, il nous rend, avec lui, vainqueurs, au final, de l’esprit du mal.

            Les trois tentations, rapportées dans cet Évangile, résument les grandes déviations proposées par le tentateur, pour détourner notre vie de l’orientation fondamentale inscrite en nous par le Créateur pour notre bonheur. Ces sollicitations  nous conduisent dans des voies sans issue, destructrices.
-            faire croire que la possession des choses, des biens matériels, la possession des autres, comble notre désir de bonheur : Tu as faim, tu  as des cailloux, tu peux en faire des pains, tu es le fils de Dieu. Tu auras de quoi te rassasier. « On ne vit pas seulement de pain. »
-            faire croire que la valeur de quelqu’un se trouve dans les apparences, l’extérieur, le pouvoir : On est au sommet du temple, 70 mètres au-dessus du sol, jette-toi en bas, tu es le fils de Dieu, tu ne risques rien… et tout le monde en bas, t’acclamera, te suivra… « Ne force pas la main de Dieu pour satisfaire ton orgueil et écraser les autres »
-            faire croire que la puissance, le prestige ouvrent les portes à tout : De ce sommet, tu vois tous ces pays. Ils sont à toi, si tu te couches à mes pieds, si tu renonces à la vraie direction de ta vie : « Tu aimeras Dieu et tu aimeras ton prochain ».

À chacun de nous de voir où sont les sollicitations du tentateur qui nous sont adressées personnellement.

« Arrière Satan ! » Le diable quitte Jésus, les anges lui donnent à manger.
En ce temps de Carême, retrouvons et affermissons la vraie direction de nos vies. Prions avec la nouvelle formule du notre Père : « Ne nous laisse pas entrer en tentation ! » Ne laisse pas mes ténèbres me parler.
           

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