mardi 2 novembre 2021

Homélie Toussaint. 1er novembre 2021

Homélie Toussaint. 1er novembre 2021

Père Maurice BOISSON - Carmel de Saint Maur

 Ap 7, 2-4, 9-14 ; 1Jn 3, 1-3 ; Mt 5, 1-12a

 On l’appelait Gaby. Un beau jour de cet été, il avait quitté les siens après une courte maladie.

Ce samedi avant la Toussaint, quelques membres de sa famille se sont retrouvés sur sa tombe pour un moment de recueillement et déposer quelques fleurs. A la tête de cette tombe, seule, se dressait une croix en chêne vernie.

Je les avais accompagnés. Ils étaient là, en silence. Un beau-frère osa dire : “Le Gaby, c’était un saint !”. Tous le pensaient : un saint, ça doit être un peu comme le Gaby. Qui n’a pas pensé ou dit la même chose lors du décès de telle ou telle personne ? “C’était une sainte, c’était un saint”. Avec raison. La sainteté n’est pas un état d’exception, réservé à une élite religieuse. Devenir saint se réalise dans les gestes les plus humbles de la vie la plus ordinaire. Comme l’écrivait Madeleine Delbrel, dans “Nous autres gens de la rue” : “La sainteté est vécue par ceux qui trouvent dans l’amour une occupation suffisante”.

 Il y a en nous comme une intuition très forte, qui nous souffle que ce qu’il y a vraiment de beau, de grand, de vrai, de droit, de juste, de bon, d’amour, de charité…dans l’ordinaire de la vie, demeure par delà la mort. Parce que cela ressemble à Dieu qui est Amour. Ça vient de Lui et ça ne peut retourner qu’à Lui. Le Gaby avait été un peu comme ça, sans même le savoir. Oh ! Il n’était pas parfait. La perfection n’est pas la sainteté, et la sainteté n’est pas la perfection, d’ailleurs les deux ne vont pas toujours ensemble. En rentrant à la maison, autour d’un gâteau et d’un café, les sourires et les souvenirs gentils rappelaient quelques petits travers du Gaby...Pourtant il avait pris ce chemin qui conduisait au bonheur, au cœur de Dieu. Ce petit sentier des béatitudes qui conduit à un grand bonheur. Heureux est-il. Heureux sont-ils.

 Dans cette foule immense, vêtue de lumière, dont nous parle Saint Jean dans la première lecture, bien plus nombreuse que les jours du calendrier où sont indiqués des noms, nous apercevons des visages connus et aimés. Nous les reconnaissons : Tiens ! C’est lui, c’est elle...N’ayons pas peur de les laisser venir à notre souvenir en ce moment. Ils ont laissé dans nos vies, dans le village, le quartier ou le monastère où ils vivaient, quelques traces et quelques graines de bonté, de paix, de justice, de compassion, de droiture, d’amour...ces graines des béatitudes que nous venons d’entendre. Ils sont heureux : heureux les doux, ceux qui ont le cœur gros de la peine des autres, qui font la paix, la justice, la miséricorde...Souvent sans le savoir, ils ont ressemblé à Dieu. Comment Dieu ne les reconnaîtrait-Il pas ? Ils ont vécu “la sainteté des gens ordinaires”, dit encore Madeleine Delbrel. Et ils sont nombreux, ces bienheureux, qui n’ont jamais fait parler d’eux. Ils ne sont pas allongés dans la terre ! Ils se tiennent debout, dit Saint Jean dans la première lecture, l’attitude des ressuscités, des vivants.

 On devient saint, ça peut faire sourire, mais c’est l’appel de notre être, de notre humanité.

C’est l’appel à ressembler au modèle sur lequel on a été fait. Si nous essayons de ressembler au modèle, Dieu terminera de nous ajuster à Lui. Si les béatitudes sont la carte d’identité du Chrétien, c’est parce qu’elles sont l’exact portrait du Christ dont nous portons le nom. Le Pape François résume sa méditation sur les béatitudes par quelques points :

    

             Être pauvre de cœur, un cœur ouvert, aimant, c’est cela la sainteté.

             Réagir avec humble douceur, rechercher la justice avec faim et soif, c’est cela, la sainteté.

             Regarder et agir avec miséricorde, se garder le cœur pur de toute participation à des magouilles mensongères,

             Semer la paix autour de nous, accepter le chemin de l’Évangile, même si cela crée des problèmes et des tensions, c’est cela la sainteté.

La mort, la vraie, ce n’est pas de cesser de vivre, c’est de quitter la route des béatitudes, c’est de cesser d’aimer.


 En continuant de parler du Gaby, une nièce plus jeune dit : “Le Gaby, c’est quand-même une belle vie !”. Et son frère d’ajouter : « Il y avait un “plus” chez lui. Ça va nous aider”.

Et si les béatitudes étaient ce “plus” qui rend la vie plus belle ? C’est bien à cela que nous sommes appelés et c’est ce que nous rappelle cette fête de Toussaint.

 

 

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