FABRICATION DES HOSTIES
Billet n°8 - Dans l’Espérance de la Pâque
Chers frères et soeurs en Christ,
Aujourd’hui, Mercredi des Cendres,
premier jour de ce beau temps donné pour revenir à l’essentiel dans la joyeuse
Espérance de la Pâque, Jésus le Christ nous invite, nous appelle :
« Convertis-toi et crois à la Bonne Nouvelle ! »
Qu’est-ce que cette Bonne Nouvelle
sinon l’Amour infiniment miséricordieux de Dieu ! Ce don qu’Il nous fait
inlassablement est gratuit. Dieu n’attend rien en retour, ou plutôt si… Il
attend que nous ouvrions grand notre coeur : « Déchirez votre coeur et non
pas vos vêtements » nous dit le prophète Joël (la tradition juive voulait
que celui qui faisait pénitence déchire ses vêtements et se couvre de cendres).
Oui, la volonté de Dieu est que nous ouvrions nos coeurs pour accueillir
pleinement son Amour, en nous jetant, comme la petite Thérèse, dans les bras de
Jésus.
Osons ouvrir grand nos coeurs, dans
la confiance, pour accueillir la Bonne Nouvelle de l’Amour de Dieu et qu’à
notre tour, nous soyons « contagieux d’Amour » !
Bon Carême à tous et à chacun dans
la joie et la confiance
Anne, votre petite soeur
Billet d’Anne n°7 - Me re-voici
Chers frères et soeurs en Christ,
Voilà plus d’un
an que je n’ai pas pris la plume… ou plutôt le clavier… pour vous écrire.
Et pour cause, rappelez-vous : j’étais regardante (en
entreprise, on dirait stagiaire). Après 6 semaines passées avec la communauté
des Soeurs du Carmel, je suis repartie en région parisienne et j’ai repris mes
habitudes et mon activité professionnelle.
Cette
« période d’essai » ne m’a pas laissée indifférente, me donnant même
l’impression, dans mon coeur, que ma place pouvait être au Carmel. Mais,
toujours attentive à ne pas précipiter ma décision, j’ai continué mon petit
bonhomme de chemin… jusqu’à ce qu’en février, je participe à une retraite au
centre spirituel jésuite de Manrèse à Clamart (92), intitulée « Choix de
vie ». J’avais besoin de ces 9 jours pour faire valider mon choix par mon
grand ami Ignace (de Loyola, fondateur de la Compagnie de Jésus et de la
méthode de discernement qui porte son nom).
Au sortir de
cette retraite, ma décision était prise. Restait à fixer la date de mon entrée
au Carmel. Je pensais finir l’année scolaire (comme je vous l’avais dit, je
travaillais dans un lycée) et entrer à l’automne. Ma directrice m’a demandé
d’assurer la passation de consignes en septembre. Je suis donc restée au lycée
jusqu’aux vacances de Toussaint et j’ai rejoint le Carmel le mardi 24 octobre
dernier.
Voilà donc un
peu plus de trois mois que je suis « postulante », c’est-à-dire que
je suis toujours habillée en « civil » mais je vis avec la communauté
selon les mêmes règles de vie que mes Soeurs. J’apprends le
« métier » de religieuse contemplative selon le charisme voulu par
Sainte Thérèse de Jésus (d’Avila) pour les moniales déchaussées de l’Ordre de
la bienheureuse Vierge Marie du Mont-Carmel. En tant que postulante, je fais
partie du « noviciat », qui réunit les Soeurs en formation
(postulantes, novices et professes temporaires). À ce jour, nous sommes deux au
noviciat. Soeur Maria-Clara est originaire d’Angola, novice depuis un an et
demi.
Mes journées
sont bien remplies (je vous renvoie au billet n°3 pour le détail des horaires).
Les premières semaines, je ne faisais que courir après le temps : les cloches
de la chapelle ne cessaient de sonner l’heure de la prière… Et petit à petit,
j’ai intégré ce rythme de vie si différent de celui « du monde ».
En dehors des
temps de prière communautaires ou individuels, mes activités sont variées. Je
suis chargée de la découpe des hosties mais pour l’instant, c’est une activité
qui m’occupe peu car durant l’hiver, on ne fabrique pas. Je continue mes études
de théologie (par correspondance bien sûr) et j’apprends la kora (instrument de
musique africain qui se marie bien avec la liturgie, notamment dans
l’accompagnement des psaumes). Je travaille à la bibliothèque (où j’enregistre,
couvre et range les livres - que nous recevons en dons pour l’essentiel). Je
participe aussi à l’entretien des 3 hectares que compte la clôture (un terrain
vallonné et boisé). J’aime arracher les ronces : je me dis que ce sont mes mauvaises
herbes intérieures que j’arrache et il faut voir les ramifications que
produisent ces fichues plantes ! Il m’arrive aussi, armée d’une tronçonneuse,
de couper les branches que le vent a cassées, ou les buis ravagés par les
pyrales. Le samedi matin, après la répétition de chant, c’est le moment du
ménage du monastère. Chacune a son secteur à nettoyer dans les parties
communes. J’ai aussi l’occasion parfois de
faire mon footing en longeant le grillage de clôture.
Bref, vous le
voyez, une vie très différente mais finalement pas si extraordinaire qu’on peut
l’imaginer quand on n’est pas en clôture. En tout cas, une vie bien remplie car
comme le dit la Règle du Carmel : « Vous devez vous livrer à quelque
travail afin que le diable vous trouve toujours occupés et que votre
oisiveté ne lui permette pas d’avoir quelque accès à vos âmes. »
La différence
essentielle entre le travail tel que je le vivais avant d’entrer et tel que
j’essaie de le vivre aujourd’hui, c’est la place de la prière. Car toute la vie
au Carmel est orientée vers le Christ, c’est une vie d’oraison. J’apprends
donc, même dans les tâches les plus simples, à tourner mon regard vers le
Christ. J’essaierai de vous en dire plus sur la vie d’oraison dans un prochain
billet car c’est cela la vie carmélitaine, source de nombreuses grâces.
Je vous
remercie de rendre grâce au Seigneur avec moi pour le don qu’il me fait de
cette vie à la suite du Christ, malgré mes faiblesses et mes manques. Dieu
n'appelle pas des gens capables, mais il rend capable celui qu'il appelle, ce
qui est tout différent et j’en fais l’expérience chaque jour !
Béni soit le Nom du Seigneur !
Billet d’Anne n°6 - « Espérer contre toute espérance »
Décidément, la vie
au Carmel réserve bien des surprises. Je viens d’y vivre une journée tout à
fait extraordinaire : toute la communauté, à l’exception de deux Soeurs âgées,
est sortie du monastère, munie de l’indispensable autorisation de l’Évêque.
C’est un évènement très rare puisque une vie de religieuse contemplative
consiste, par définition, à rester à l’intérieur de ce que l’on appelle la
clôture.
Bien sûr, il
arrive que l’une ou l’autre Soeur sorte de la clôture, jamais seule, pour des
rendez-vous médicaux notamment. Mais cela reste très anecdotique.
Alors qu’est-ce
qui a bien pu motiver le déplacement de toute la communauté ?
Une amitié
fraternelle et le souhait d’un geste jubilaire : passer la Porte de la
Miséricorde.
Cette amitié
fraternelle relie la communauté avec celle des Dominicaines de Béthanie,
contemplatives elles-aussi, implantées à Montferrand-Le-Château près de
Besançon. Certaines d’entre elles sont venues faire une retraite à Saint-Maur
et c’est ainsi qu’est née une fraternelle proximité entre les Carmélites et les
Dominicaines.
La chapelle de
leur monastère ayant été désignée Église de la Miséricorde par leur Évêque pour
le diocèse de Besançon, les Dominicaines ont tout naturellement invité les
Carmélites à venir franchir la Porte Sainte de la Miséricorde.
Voilà comment nous
sommes parties, en convoi de 5 voitures, rendu possible grâce à la gentillesse
et la disponibilité de chauffeurs, amis du Carmel, dont notre aumônier, le Père
Maurice Boisson.
Nous avons
participé à l’Eucharistie dans la chapelle des Dominicaines avant de partager
un déjeuner joyeux avec elles. Après que chacune se soit présentée, nous avons
échangé sur l’histoire de nos communautés.
Les Dominicaines
de Béthanie sont nées de l’inspiration du Père Lataste, dominicain du XIXème
siècle, appelé à prêcher dans une prison de femmes. Il a été boulversé par la
misère de ces femmes, rejetées et bafouées par la société de l’époque.
Comparant leur vie à celle de religieuses cloîtrées (le silence, la vie
communautaire, la pauvreté), la différence essentielle reposant sur la liberté
du choix de cette vie, il leur a redonné l’espérance en leur parlant de la
Miséricorde infinie de Dieu : « Quand Jésus donne aux âmes, il ne regarde
pas ce qu’elles furent mais ce qu’elles sont. » Il les aida à se remettre
debout en regardant le Christ, leur donnant Marie-Madeleine en exemple, elle
« qui a été tant pardonnée parce qu’elle a beaucoup aimé ». Il eut à
coeur d’aller plus loin et se battant contre toutes les oppositions et les a
priori de son époque, il fonda les Dominicaines de Béthanie où l’on ne se
souciait pas de l’histoire des femmes qui souhaitaient y entrer, mais
seulement de leur coeur et de leur désir de s’unir à Dieu, faisant ainsi vivre
ensemble « des réhabilitées » et des jeunes femmes de tous horizons.
Le Père Lataste,
décédé tout juste deux ans après la fondation, n’a jamais cessé, jusqu’à ce
jour, de recevoir par courrier des intentions de prières. Ces lettres sont
déposées par les Soeurs sur sa tombe.
Aujourd’hui, la
congrégation peine à survivre au manque de vocations mais des germes éclosent
dans divers endroits du globe, comme dans cette prison d’hommes de Norfolk aux
États-Unis, où des prisonniers et des personnes du « dehors » ont
fondé une association laïque dominicaine qui vit du charisme du Père Lataste et
se réunit pour prier ensemble au coeur de la prison. Les Soeurs de Montferrand
reçoivent régulièrement des demandes pour fonder de nouvelles communautés
monastiques. Leur nombre insuffisant ne le leur permet pas mais elles proposent
un accompagnement à celles qui souhaiteraient se lancer ainsi dans une
fondation.
Après avoir écouté
l’histoire de ce Bienheureux (béatifié en juin 2012) et dont le procès de
canonisation est en cours d’instruction, nous nous sommes dirigées vers la
Porte Sainte, très joliment décorée par des fleurs en papier, réalisées au
coupe-ongles par les prisonniers de Norfolk. Nous nous sommes ensuite
recueillies sur la tombe du Père Lataste avant de prier dans une grotte,
aménagée dans le parc du monastère, abritant une très belle statue de
Marie-Madeleine. Nous avons terminé notre pèlerinage par l’adoration du
Saint-Sacrement.
C’est le coeur
gonflé de cette Espérance que donne la Foi en Celui qui est Miséricorde que
nous avons regagné Saint-Maur. Notre prière de complies était remplie de notre
action de grâce pour ce beau pèlerinage.
Billet
d’Anne n°5 - « La Nuit Obscure »
Jusque là, je
savais de Saint Jean de la Croix qu’il était Saint, Docteur de l’Église et
poète, qu’il était contemporain et ami spirituel de Sainte Thérèse d’Avila,
qu’il l’aida et la soutint dans sa réforme du Carmel et ses fondations de
monastères.
La simple
évocation de son nom renvoyait immanquablement mon imagination à des
représentations de la foi sinon effrayantes pour le moins peu
attrayantes. Il était pour moi l’homme de « La nuit obscure », titre
de l’un de ses ouvrages. Je l’imaginais un auteur triste et difficile, qui
n’avait traité que de la nuit de la foi. Cette fameuse nuit, dont ont témoigné
de grandes figures de l’Église, dont Sainte Mère Teresa de Calcutta souffrit
pendant tant d’années. Alors, non merci, je n’avais nulle envie de lire cet
auteur qui m’inquiétait.
Mais, c’était sans
compter sur l’humour du Seigneur et l’efficacité de ses dignes servantes que
sont les Soeurs du Carmel de Saint-Maur… Que n’avaient-elles pas imaginé de
faire venir un Frère Carme de Trois-Rivières au Québec, le Frère Marie-Jean,
pour nous parler … de Saint Jean de la Croix et de « La nuit
obscure » !
Me voici donc,
(obéissance oblige !), à me confronter aux fantômes de la nuit… « La peur
existe jusqu’à ce que survienne l’inévitable » dit Paulo Coelho, alors
Yalla, allons-y, Fiat !
Et j’ai, bien
évidemment, découvert que mes a priori étaient totalement infondés.
Le livre débute
par le poème « Noche oscura». Si Jean de la Croix a écrit le livre
qui l’accompagne, c’était en réponse à des carmélites de son temps qui (comme
moi, ne comprenant pas tout) lui demandaient des explications sur ses vers. Le
livre commente essentiellement les deux premières strophes du poème. Dans cet
ouvrage, Jean de la Croix embrasse la totalité de la vie spirituelle, de nos
premiers balbutiements de prière à notre vision en face-à-face de Dieu dans la
béatitude de la vie éternelle.
Je n’ai pas la
prétention de commenter ce livre mais seulement de livrer ici quelques perles
que j’ai recueillies de l’enseignement de Frère Marie-Jean.
Tout d’abord, le
Frère Marie-Jean nous a incité, à chaque fois que nous trouvons dans le texte
le terme de « nuit obscure » ou « nuit » à le remplacer par
le mot « Christ ». En effet, ces notions de nuit, d’obscurité
renvoient tout autant au caractère caché de Dieu, l’Indicible, celui que l’on
ne peut voir, qu’à nos propres zones d’ombre. Lire ainsi le texte lui donne un
tout autre éclairage.
Ensuite, il a
beaucoup insisté sur l’union à Dieu : elle n’est pas réservée à quelques êtres
dotés de grâces extraordinaires mais elle est donnée par la grâce du baptême.
Tout baptisé est appelé à cette union à Dieu et sa vie doit tendre vers cette
union. Le lieu privilégié, mais pas exclusif, de cette relation est la prière
et l’oraison. Notre Mère Sainte Thérèse définit l’oraison comme « un
commerce intime d’amitié avec Dieu ». Et l’on retrouve chez Jean de la
Croix les inspirations spirituelles de la Madre. Il appelle à se défaire des
scories de notre humanité (nos faiblesses, nos pauvretés…) pour faire grandir
en nous notre part divine. Le Frère Marie-Jean a filé une métaphore qui m’a
parlé : Lorsque l’on purge un radiateur, il s’agit non pas de vider les radiateurs
pour ensuite les remplir d’eau mais de faire en sorte que l’eau chasse l’air.
Dans l’être spirituel que nous sommes tous, nous devons laisser de plus en plus
de place à Dieu qui va « chasser » nos pauvretés. Pour cela, il nous
faut « mortifier » nos facultés et nos sens « sensibles »,
non pas pour les faire mourir mais pour les orienter vers l’intérieur de
nous-même, pour les transformer en facultés « spirituelles ». Car
comme Saint Augustin le dit à Dieu : « Toi, tu étais plus intime que l’intime
de moi-même, et plus élevé que les cimes de moi-même. »
Au sujet de
l’élévation, Saint Jean de la Croix fait référence à une échelle qui conduit à
Dieu, lequel est appuyé sur le sommet de l’échelle et veille paternellement et
amoureusement à nos progrès. « Tout homme qui s’élève sera abaissé et
celui qui s’abaisse sera élevé. » (Lc 14,11). Saint Jean de la Croix nous
explique combien le mouvement est continu et réversible : pour s’élever vers
Dieu, il faut s’abaisser pour déposer nos pauvretés et avancer avec humilité et
en s’élevant vers Dieu, en mobilisant nos facultés vers l’union à Dieu, nous
nous abaissons pour abandonner nos « hommeries ».
Que l’Esprit Saint
nous montre ce chemin d’union à Dieu dans l’abandon et l’humilité !
Anne, la regardante
Billet
d’Anne n°4 - Ma journée au Carmel
« Tu ne
t’ennuies pas au Carmel ? Que fais-tu de tes journées ? » me demandait
récemment une amie.
La règle du
Carmel, écrite par Saint Albert de Jérusalem au XIII ème siècle et toujours en
vigueur aujourd’hui, dit : « Vous devez vous livrer à quelque travail,
afin que le diable vous trouve toujours occupés (il s’adressait à l’origine aux
ermites du Mont Carmel) et que votre oisiveté ne lui permette pas d’avoir accès
à vos âmes. »
La tradition a
conservé cette sagesse.
Dès 6h, nous nous
retrouvons à la chapelle pour une heure d’oraison silencieuse. À 7h, nous
récitons l’Angélus, avant d’aller prendre un petit déjeuner. À 7h25, nous
disons l’office de Laudes et l’Eucharistie suit à 8h. Nous avons beaucoup de
chance car nous avons l’Eucharistie chaque jour, ce qui n’est, hélas, plus le
cas dans un certain nombre de monastères, du fait du manque de prêtres.
À la fin de la
messe, nous prenons un temps d’action de grâce et je retrouve mes Soeurs du
noviciat pour un temps de prière sous la houlette de Soeur Marie-Jovite, la
maîtresse des novices. Elle nous conseille de prendre ensuite un temps pour
nous jusqu’à 10h, temps de lecture, d’écriture.
À 10h, je rejoins
la bibliothèque où je suis chargée d’assister Isabelle, la postulante, pour
enregistrer, classer, couvrir et ranger les nombreux livres qui nous sont
donnés. La bibliothèque compte à ce jour environ 15 000 livres (quelques
ouvrages de philosophie ou de littérature côtoient théologie, spiritualité,
liturgie, vie des Saints…).
À 11h45, je dois
interrompre mon ouvrage pour me rendre à la chapelle où, à midi, nous récitons
l’Angélus avant de prier l’office du milieu du jour.
Au réfectoire,
avant de dîner (c’est ainsi qu’on appelle le déjeuner dans le Jura), nous
disons un Benedicite, et nous écoutons un paragraphe des Constitutions
qui régissent l’ordre du Carmel. Données par Notre-Mère Sainte Thérèse (Sainte
Thérèse d’Avila), elles ont été « révisées» en 1991.
Pendant le repas,
une Soeur lit pour la communauté généralement un livre ou un enseignement
spirituel. Dernièrement, nous écoutions un livre sur la vie et le charisme
d’Élisabeth de la Trinité, Carmélites de Dijon du début du siècle dernier,
canonisée dimanche dernier par le Pape François.
Après le repas
préparé par les Soeurs cuisinières, trois d’entre nous font la vaisselle avant
un temps de repos et/ou de lecture apprécié.
L’activité reprend
vers 15h. Si le temps le permet, je vais travailler dans les 3 hectares de
terrain qui entourent le monastère et constituent la « clôture »
(l’espace de vie des Soeurs). Soeur Jean-Véronique est « responsable des
espaces verts » et comme elle sait que j’aime débroussailler, tondre,
tronçonner…, elle m’a donné du travail pour 6 mois…
À 16h45, retour à
la chapelle, pour l’office des Vêpres, suivi d’une heure d’oraison, close par
l’Angélus.
Il est temps
d’aller « souper », comme on dit dans le Jura. C’est le moment, où la
Soeur lectrice nous partage les nouvelles du monde qu’elle a recueillies
généralement dans le journal « La Croix ». Après la vaisselle, nous
avons une heure de récréation, le temps de la journée où nous nous parlons. Car
la vie au Carmel est une vie de silence (sauf nécessité bien sûr), propice au
recueillement de la Grâce de Dieu dans nos vies. Ce moment de récréation porte
bien son nom, il est généralement très joyeux et fraternel. Il se termine par
une prière à Saint Joseph et à la Vierge Marie avant de rejoindre la chapelle
pour mon office préféré : l’office des Lectures et Complies, prévu à 20h30 mais
je dois avouer que nous sommes rarement à l’heure… J’aime beaucoup l’ambiance
de cet office. Il n’a rien de très différent des autres offices de la journée
mais je le trouve apaisant avant la nuit. Il se termine par le très beau Salve
Regina.
C’est alors dans
la paix et la joie que je regagne ma cellule (ma chambre en jargon monastique).
J’ai tout juste le temps de rendre grâce au Seigneur pour la journée écoulée
que le sommeil me prend.
« Merci
Seigneur, Je te rends grâce pour toutes les grâces dont tu m’as comblée ce jour
! »
Anne, la regardante
Billet d’Anne n°3 - La session est finie
J’allais à cette
session avec des pieds de plomb (j’étais venue au Carmel pour vivre la vie du
Carmel et non celle d’étudiante) mais au final, je rends grâce pour ces jours!
La rencontre avec
des Soeurs d’autres communautés fut et très riche et très vivante, on se serait
cru dans la colonie de vacances de notre enfance ! « Si vous ne changez
pas et ne devenez pas comme les enfants, non, vous n’entrerez pas dans le
Royaume des cieux. » (Mt 18, 3). Pas de doute, le Royaume des cieux est
proche pour nous, car, mon Dieu, ce que nous avons ri au cours des pauses et
des repas pris en commun et en bavardant.
Soeur
Marie-Sophie, du Carmel de Plappeville (près de Metz) (à droite sur la
photo) est passionnée par l’étude de la Bible et elle a à coeur de transmettre
sa passion et son savoir. Elle le fait merveilleusement bien et nous a rendu
familier (ou presque) le livre de Jérémie.
Quelques leçons
que nous a données Jérémie au cours de ces 3 jours :
- Dans notre relation aux autres, Jérémie, seul prophète écrivain à livrer ainsi ses propres états d’âme, nous dit : « Ne réponds pas à la violence par la violence, ne te venge pas toi-même de tes ennemis mais confie ta colère à Dieu (Jr 18, 18-23). Cela t’aidera à retrouver la paix, cela t’évitera de commettre des paroles ou des gestes que tu regretteras. Fais confiance à Dieu, il appliquera sa propre justice qui sera plus ajustée que la tienne, car Lui est miséricordieux. » Malgré toutes les épreuves que Jérémie traversera, sa confiance en Dieu demeure.
- « C’est la volonté de Dieu… » Qui sommes-nous pour connaître la volonté de Dieu ? Jérémie nous montre le chemin du discernement dans l’écoute de la Parole de Dieu. Face au prophète Hananya (Jr 28), Jérémie prend le temps de découvrir, dans une posture d’humilité, lequel des deux, Hananya ou lui, est vraiment porteur de la Parole de Dieu.
- Enfin, pour nous chrétiens, ce livre de Jérémie, rapportant des oracles de Yahvé au moment de la chute de Jérusalem et de l’exil à Babylone (587 av. JC), est d’une extraordinaire modernité : il évoque un Dieu qui pardonne, un Dieu qui n’est pas seulement le Dieu d’Israël et de Juda mais le Dieu de toutes les nations, un Dieu qui ne se lasse pas de faire Alliance avec les hommes malgré leurs idolâtries et leurs perversions et surtout un Dieu qui souhaite faire Alliance non pas avec un peuple, mais avec chacun de nous : « Je mettrai ma Loi au fond de leur être et je l’écrirai sur leur coeur. » (Jr 31, 33).
Le prochain billet
sera plus léger mais j’avais à coeur de partager avec vous ces quelques
réflexions nées de notre rencontre avec le prophète Jérémie.
Bien
fraternellement,
Anne, la regardante
Billet d’Anne n°2
J’habite en région parisienne et je
vais chaque lundi soir suivre un cours à l’Institut Catholique de Paris dans un
parcours passionnant de théologie.
Ici, à Saint-Maur, comme je l’ai dit
précédemment, je suis venue vivre avec la communauté afin de découvrir ce
qu’est la vie contemplative et cloîtrée… et non suivre des cours… Or, une Soeur
du Carmel de Plappeville (près de Metz), Soeur Marie-Sophie, vient donner une
session pour le noviciat - comprenez «l’équipe», dont je fais temporairement
partie, composée de Soeur Minaire, professe temporaire, Soeur Maria-Clara,
novice, Isabelle, postulante et la « chef d’équipe », Soeur
Marie-Jovite, maîtresse des novices. Je vous expliquerai les termes une autre
fois… quand j’en saurai un peu plus moi-même. Au noviciat va se joindre Soeur
Anne-Marie, arrivée à Saint-Maur il y a quelques mois maintenant, ainsi qu’une
Soeur du Carmel de Bruxelles, Soeur Theresa, originaire du Vietnam, professe, 1
professe temporaire du Carmel de Jonquières (près de Compiègne, le Carmel des
carmélites martyres de la révolution française en 1794), Soeur Marie-Anne et 1
novice du Carmel de Marienthal (près de Strasbourg), Soeur Irène-Emmanuelle.
Nous serons installées pour 3 jours à l’hôtellerie, comme les retraitants, et
nous suivrons des cours sur le livre de
Jérémie toute la journée. Nous prendrons nos repas ensemble…en bavardant… La
vie monastique telle qu’on l’imagine de l’extérieur ! Exactement ce pour quoi
je suis ici…
Je
découvre avec amusement le voeu d’obéissance…Le Carmel est décidément plein de
surprises.
Bien
fraternellement, à très bientôt
Anne,
la regardante
Le billet d’Anne (à ne pas
confondre avec le bonnet d’âne ! )
Ce
petit billet n’a aucune visée savante (pas plus théologique qu’exégétique ni même
spirituelle) sur la vie du Carmel. Il s’agit simplement de partager avec vous
quelques impressions, anecdotes ou pensées. Tout cela avec un petit brin
d’humour.
Ce
n’est pas que je sois la mieux placée pour parler du Carmel car pour l’instant,
je n’en sais que peu de choses. En effet, je suis « regardante »,
c’est ainsi qu’est nommée toute femme qui éprouve un attrait pour la vie
contemplative (selon le charisme de Sainte Thérèse d’Avila) et qui fait
l’expérience de vivre pendant quelques jours ou quelques semaines avec une
communauté de carmélites.
Je
ne suis là que depuis quelques jours mais qui furent riches d’expériences et de
clins d’oeil du Seigneur :
Je
connais la communauté depuis bientôt 4 ans (oui, je sais, il faudrait que je me
décide à entrer ou pas. Mais vous pensez vraiment que c’est une décision facile
à prendre, vous ? ).
Bref, je connais donc la communauté depuis 4 ans et souvent, Sœur Martine, en charge de la liturgie, vient me demander, avant la messe dominicale, si j’accepte de faire une lecture. C’est toujours pour moi un grand honneur que de pouvoir lire à tous la Parole de Dieu et je n’entre jamais au chœur sans un petit pincement… au cœur… Alors imaginez ! Rentrer au chœur et m’asseoir dans les stalles (c’est comme cela que l’on appelle les chaises des Sœurs) au milieu de ces Sœurs que j’aime tant. Et me voilà pour mon premier soir au Carmel à la veillée de la fête de la petite Thérèse (le hasard du calendrier). Quelle émotion ! Je me suis bien promis de ne pas lire devant l’assemblée avant quelques semaines… Monumentale erreur : Sœur Marie-Sébastienne, chargée de répartir les lectures de la veillée, m’a prévue sur sa liste !!! Elle me le dit avec un si beau sourire, comment lui refuser ? Ça va, il n’y a pas beaucoup de fidèles dans l’assemblée. Et le lendemain matin, avant la messe, revoilà Sœur Marie-Sébastienne qui vient vers moi : « Tu veux bien lire la première lecture ? » Décidément ! Mais que dire ? N’est-ce pas « pour la plus grande gloire de Dieu »?
Bref, je connais donc la communauté depuis 4 ans et souvent, Sœur Martine, en charge de la liturgie, vient me demander, avant la messe dominicale, si j’accepte de faire une lecture. C’est toujours pour moi un grand honneur que de pouvoir lire à tous la Parole de Dieu et je n’entre jamais au chœur sans un petit pincement… au cœur… Alors imaginez ! Rentrer au chœur et m’asseoir dans les stalles (c’est comme cela que l’on appelle les chaises des Sœurs) au milieu de ces Sœurs que j’aime tant. Et me voilà pour mon premier soir au Carmel à la veillée de la fête de la petite Thérèse (le hasard du calendrier). Quelle émotion ! Je me suis bien promis de ne pas lire devant l’assemblée avant quelques semaines… Monumentale erreur : Sœur Marie-Sébastienne, chargée de répartir les lectures de la veillée, m’a prévue sur sa liste !!! Elle me le dit avec un si beau sourire, comment lui refuser ? Ça va, il n’y a pas beaucoup de fidèles dans l’assemblée. Et le lendemain matin, avant la messe, revoilà Sœur Marie-Sébastienne qui vient vers moi : « Tu veux bien lire la première lecture ? » Décidément ! Mais que dire ? N’est-ce pas « pour la plus grande gloire de Dieu »?
Allez,
j’arrête là pour un premier billet, je ne vais pas tout vous raconter d’un coup
! Mais vous aurez déjà compris qu’au Carmel, rien ne se passe comme vous vous y
attendiez.
Bien fraternellement, bonne
semaine
Anne, la regardante
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