Homélie 2ème dimanche de Carême année A

Homélie 2ème dimanche de Carême année A

5 mars 2023

P. Maurice Boisson Carmel de Saint Maur

  Gn 12, 1-4 ; 2 Tm 1, 8-10 ; Mt 17, 1-9.

  La transfiguration de Jésus, ou « les clins d’œil de Dieu ».

C’est le titre et le sens que nous pourrions donner à cet événement dont nous venons d’entendre le récit.

Nous assistons ces jours à l’éclosion des petites fleurs de printemps : clin d’œil de la nature, après l’hiver, qui annonce les beaux jours. Quand dans le flot marécageux des informations, on nous rapporte des témoignages positifs de bien, de bon, de solidarité, comme ces jours dans le monde viticole proche d’ici, ce clin d’œil nous dit que tout n’est pas perdu, que le bien se fait, que l’avenir n’est pas bouché… Régis, le visage rayonnant, me disait récemment qu’enfin il sortait d’une galère difficile. Il était transfiguré : clin d’œil de l’espérance, de la vie…

 La transfiguration de Jésus est un clin d’œil de Dieu annonçant que la mort programmée de Jésus ne serait pas la fin, mais un passage vers la lumière, un clin d’œil pour redonner courage aux apôtres accablés et révoltés par cette annonce de Jésus lui-même. Clin d’œil pour nous-mêmes, pour le monde : le mal, l’épreuve, la mort n’auront pas le dernier mot sur la vie et la lumière.

 Jésus vient d’annoncer à ses amis qu’il allait être rejeté et tué. Ceux-ci n’acceptent pas, en particulier Pierre qui se révolte : « Pas toi, Seigneur ! ». Jésus sentait bien la déception, la révolte, la tristesse de ses proches…Alors qu’il marchait avec eux, il quitte la route, il prend avec lui Pierre, Jacques et Jean et se dirige sur un sentier vers la montagne.

Il y a des moments où il faut prendre de la hauteur, respirer l’air pur, trouver le calme et la beauté.

 Arrivé là-haut, c’est le clin d’œil de Dieu : Jésus est transfiguré devant eux. Il rayonne de lumière. Il vit une expérience intérieure forte qu’il veut transmettre à ses amis. Quand on vit quelque chose de fort à l’intérieur de soi, ça se voit sur le visage : « Qu’est-ce qui t’arrive ? T’es plus le/la même ! ». Jésus, rayonnant de lumière, n’est plus le même mais c’est bien lui. Il est transfiguré : son être et son visage sont transformés, en présence des grands témoins de Dieu dans l’histoire : Moïse et Elie. Pour authentifier cet événement, la voix de Dieu le Père se fait entendre : « Ce Jésus, c’est bien mon fils, je l’aime, il fait mon bonheur ; comment pourrais-je le laisser tomber dans les mains du mal et de la mort ? ».

 C’est le grand clin d’œil de Dieu aux amis de Jésus dans la peur, une peur qui les a mis à terre. Jésus s’approche d’eux, les touche, les relève avec tendresse : « Relevez-vous, n’ayez pas peur ». Jésus nous relève nous aussi de nos peurs. Jésus transfiguré de lumière sur cette montagne sera bientôt défiguré sur une autre colline, mais il deviendra, un beau matin, visage et corps ressuscité, pour toujours, dans la lumière. Cet événement d’espérance s’adresse non seulement aux témoins qui ont vu, mais à nous tous. Il indique le terme, l’aboutissement par delà les passages par les croix, les souffrances, les morsures du mal. Quand on connaît le bout du chemin, le trajet n’est plus le même. Jésus transfiguré l’espace d’un moment, avec la caution de Dieu son Père, est un réconfort pour la suite.

 C’est un appel à la confiance, comme pour Abraham dans la première lecture : « Va ! vers le pays que je te montrerai ». Abraham s’en alla. Il partit sans savoir où il allait mais dans la confiance de Dieu. Il était dans la bonne direction.

 Sur les chemins de nos vies, ne manquons pas les clins d’œil de Dieu. Ils sont discrets. Ils nous indiquent le terme de la route. Ils sont des signes d’espérance. Ils nous donnent rendez-vous dans la paix et la lumière intérieure, dans une auberge à Emmaüs, là où le visage défiguré du Crucifié se fait reconnaître visage ressuscité annoncé par le visage transfiguré de lumière sur la montagne.

 Ainsi nos vies, semées de croix et de joies. Elles seront transfigurées de lumière pour toujours. Accueillons en nous cette lumière de Dieu pour que nous en donnions quelques reflets.