mercredi 14 septembre 2011

Homélie de Mgr Patenôtre, Carmel de Saint-Maur 11 Septembre 2011

10ème anniversaire de la Consécration de la Chapelle du Carmel de Saint-Maur (Jura)

Homélie de Mgr Yves Patenôtre, archevêque de Sens-Auxerre, prélat de la Mission de France

- 11 septembre 2011 -

Les textes de cette messe du 10ème anniversaire de la consécration de cette chapelle du Carmel qui nous rassemble aujourd’hui m’invitent à méditer avec vous sur le mystère du Christ, sur l’Église et sur la mission.

L’évangile de Saint Jean oriente nos regards sur le Christ. Il va et vient dans le Temple. Beaucoup s’interrogent à son sujet : « Si tu es le Christ, dis le nous ouvertement ». Ils voient bien tout ce que Jésus réalise avec autorité et ils se demandent qui il est. La réponse vient : « Le Père et moi, nous sommes UN ».

Le cœur de notre foi de chrétien est de croire au Christ ressuscité. Nous croyons qu’il est Dieu lui-même venu nous dire qui Il est. Le pape Benoît XVI le rappelle souvent : « Jésus est le visage humain de Dieu ». Nous ne croyons pas en des idées, notre religion n’est pas d’abord une morale, nous croyons en Quelqu’un qui est là vivant auprès de nous. Nous essayons dans son Souffle d’aimer comme il nous a aimés. La croix est le signe de cet amour qui a aimé jusqu’au bout. À chaque eucharistie, nous croyons que c’est vraiment son Corps que nous tenons entre nos mains. Dans la rencontre de celui qui est nu, étranger, malade ou prisonnier, de celui qui a faim ou qui a soif, nous savons qu’il est là : « C’était moi » ! Prier, c’est lui parler comme un ami parle à son ami. Toute l’Écriture sainte nous parle de Lui.

Quelques fois, je demande aux jeunes confirmands de me dessiner Dieu. Alors ils dessinent deux grandes mains sortant d’un nuage, une colombe, un feu, un cœur, une flamme, ils écrivent AMOUR, mais très rarement ils représentent Jésus. Une fois, un enfant n’a rien dessiné. Il a eu une magnifique expression devant sa feuille blanche : « je ne voudrais pas l’abîmer ! » Mais si, nous pouvons dessiner Dieu en représentant le Christ ! Je nous souhaite en cette fête d’anniversaire, au milieu de nos sœurs qui ont choisi le Christ comme le tout de leur vie, que ce Jésus devienne toujours plus quelqu’un pour nous. Que nous soyons heureux et fiers d’être chrétiens, du Christ ! Il accomplit notre humanité. Il ne détruit pas en nous le meilleur de l’humain, il le transfigure, comme ce pain et ce vin qui vont devenir son Corps et son Sang.

Le texte de la lettre de saint Pierre nous invite à aimer l’Église dont nous sommes les pierres vivantes. « Il est Lui, le Christ, la pierre vivante que les hommes ont éliminée, mais que Dieu a choisie parce qu’il en connaît la valeur. Vous aussi, soyez les pierres vivantes qui servent à construire le Temple spirituel … Vous êtes la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu ; vous êtes donc chargés d’annoncer les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière. »

C’est une grande grâce d’être chrétien. En Christ, nous savons qui nous sommes. Son Esprit nous rend vivants de la vraie vie. Il habite en nos cœurs si bien que par toute notre vie nous rayonnons le Christ et son Évangile. En fait, nous n’avons pas à renvoyer à l’Église, à une institution, mais à Quelqu’un. Et c’est en cela que nous sommes l’Eglise. L’Église est signe, sacrement, du Christ. Elle doit donc renvoyer au Christ, pas à elle-même. Si le signe renvoie à lui-même, il devient insignifiant. Il faudrait qu’en nous voyant vivre, ceux qui nous entourent, pressentent que nous sommes habités par une Présence. Une certaine qualité d’accueil, d’écoute, de partage et d’accompagnement qui dira un peu quelque chose de ce Quelqu’un qui transfigure nos vies. Cette chapelle, ce Carmel, serait inexplicable s’il n’était pas signe d’une Présence. Celle du bon pasteur de l’évangile de tout à l’heure : « Mes brebis écoutent ma voix, moi je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie. » Toute la vie d’une carmélite !

La première lecture, le livre d’Isaïe, nous invitait à envisager la maison de prière de la Nouvelle Alliance comme « une maison de prière pour tous les peuples. » J’y vois comme un appel à la mission. Vous avez remarqué comment cette maison est destinée « aux étrangers qui se sont attachés au Seigneur … Il les rendra heureux dans sa maison de prière. » La maison de Dieu est ouverte à l’universel. L’Église est par essence missionnaire. Elle a été envoyée pour proclamer la Bonne Nouvelle à tous les peuples. C’est bien ici qu’il fait bon nous rappeler que la petite Thérèse de l’Enfant Jésus est la patronne des missions.

Nous sortons d’un monde de chrétienté. De plus en plus d’enfants, de jeunes ou d’adultes ne connaissent plus Jésus. Dans certains villages de l’Yonne, il n’y a plus aucun enfant au catéchisme. Lorsque je fais des confirmations à Auxerre ou à Sens, je me trouve avec une vingtaine de jeunes sur des centaines. Je ne sais pas exactement ce qu’il en est pour le Jura. Je me souviens que je disais volontiers qu’il y avait encore de belles bûches incandescentes dans le foyer, mais qu’il faudra vite penser à remettre du bois sur le feu ! Il va bientôt y avoir un synode à Rome sur la nouvelle évangélisation, je dirais volontiers sur les initiatives nouvelles d’annoncer l’évangile de Jésus. Que cela nous tienne à cœur. Ce serait trop triste que trop de jeunes meurent de soif à côté de la Source ! C’est à chacun de nous, dans la diversité de nos vocations, de transpirer le Christ pour ainsi dire.

Mes sœurs, ici, vous vous êtes lancées à fond, à corps perdus, pour vivre la radicalité de l’amour. Vous êtes un peu les « Formules 1 » qui entraînent les autres à aimer comme Il nous aimés. Vous puisez cette vocation à la source carmélitaine, à la suite de Thérèse d’Avila et de Jean de la Croix. Vous nous rappelez l’importance de la prière et de l’oraison « dans un dialogue d’amour avec celui dont on se sait aimé ». Que le Carmel de Saint-Maur continue de briller comme une lumière sur la montagne. « Alors, en voyant ce que vous faites de bien, les hommes rendront gloire à votre Père qui est dans les cieux ». Souvenez-vous bien, comme nous tous, qu’il ne s’agit pas seulement d’être visible, mais aussi et surtout lisible pour le monde d’aujourd’hui. Avec vous, nous désirons, et particulièrement au cœur de cette Eucharistie « être maison de prière pour tous les peuples ». Amen


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