Homélie Assomption 2012
au Carmel de Saint-Maur
Père Olivier Rousseau, ocd
Femme revêtue de soleil, la lune sous ses pieds et couronnée d’étoiles ou jeune fille courant à travers les montagnes de Judée pour aller se mettre au service de sa vieille cousine Elisabeth, voilà deux images contrastées que la liturgie nous propose en cette fête de Notre-Dame de l’Assomption. La gloire de Marie, c’est le fruit de la résurrection du Christ qui mène à son accomplissement le cheminement humain de celle qui fut sa mère à l’aube du salut. En nous proposant de contempler Marie dans sa participation à la gloire du Christ, l’Eglise ne veut pas nous conduire à adorer Marie. Elle nous fait entrer dans le mystère d’une vocation qui comme toute vocation est décentrement de soi, oubli de soi, don de soi. Aussi, entrer en relation avec Marie, c’est être conduit par elle d’une part au Christ, d’autre part à la communion avec l’ensemble de l’humanité sauvée par le Christ. Marie est tout entière du côté de son Fils par le privilège unique de sa maternité tout en étant par sa condition humaine tout entière du côté de l'humanité rachetée.
L’Assomption de Marie nous conduit au Christ en ce qu’elle est le signe éclatant de la victoire du Christ sur la mort au profit de notre humanité, une victoire qui n’est pas simplement un retour à la vie, mais une entrée dans la gloire de Dieu. Nous contemplons ainsi en Marie notre propre vocation à vivre avec le Christ, par lui et en lui, de la vie des enfants de Dieu. Mais en quoi consiste cette participation de Marie à la gloire de son Fils ? Si Marie est la première ressuscitée dans le Christ, c’est pour devenir par sa communion avec lui pleinement participante de sa mission de salut pour le monde. La glorification de Marie ne l’éloigne pas de notre humanité, pas plus que celle du Christ ne le sépare de nous, lui l’Emmanuel qui demeure avec nous chaque jour jusqu’à la fin du monde...
Le livre de l’Apocalypse nous introduit à ce mystère de la communion de Marie à la vie de l’Eglise à travers la figure de cette femme mise à l’abri au désert. La femme est l’objet d’un combat : la puissance du mal tente de faire avorter le dessein de Dieu. L’histoire humaine est le théâtre d’un drame invisible dont nos conflits ne sont que la face apparente. Pourtant la victoire est assurée, une victoire qui n’est pas à mesure humaine, pas même à la mesure de la femme aux vêtements cosmiques. Elle doit fuir au désert jusqu’à ce que Dieu anéantisse toute puissance maléfique. Le rôle de la femme est de veiller dans la solitude du désert, de prier dans l’attente du salut de Dieu pour son peuple. Telle est la mission de Marie en solidarité avec l’Eglise.
C'est une mission d'intercession qui avait commencé déjà lors des noces de Cana. Elle a conduit ensuite Marie à se tenir debout au pied de la Croix, puis à demeurer au milieu des Apôtres au Cénacle dans l’attente de l’Esprit Saint. Cette mission d’intercession prend désormais une ampleur universelle avec son Assomption dans la gloire du Christ. La mission de Marie est plus intense que jamais dans la vision de Dieu. Elle intercède pour l’Eglise et nous découvre le sens de notre propre mission : nous tenir au désert dans la prière pour ce monde qui ne peut trouver son salut qu’en Jésus-Christ. Ainsi, Marie est-elle la figure de l’Eglise et le signe de la communion des Saints, cette solidarité humaine dans le Christ qui unit par delà la mort et dans un même destin l’Eglise du Ciel et de la terre.
Cette mission, Marie la vit dans la gloire avec la même simplicité, la même humilité, le même effacement qu’elle manifesta en se mettant au service de sa vieille cousine Elisabeth. Sa gloire alors, c’était le chant de son magnificat, lorsqu’elle s’émerveillait de l’amour de Dieu pour son humble servante et proclamait dans un chant de louange la béatitude des pauvres, des humbles, des doux, des pacifiques, des miséricordieux. Cette béatitude est celle de Marie qui contemple dans l’amour du Père le salut de ses enfants dans le Christ. Avec Marie, nous sommes déjà appelés à chanter nous aussi les miséricordes du Seigneur, à veiller dans la prière pour ce monde, à vivre le service de la louange et de l’humble confiance dans l’espérance du jour où Dieu sera tout en tous dans le Christ Jésus.
« Heureuse celle qui a cru à l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur. »
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