mercredi 10 octobre 2012

Thérèse d'Avila Fondations 25, extraits

Thérèse d'Avila Fondations, 25 (traduction Marcelle Auclair), extraits

Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte du Livre des Fondations


De la fondation du monastère du glorieux Saint-Joseph de Séville et ce qui nous en coûta pour acquérir une maison.

1 Nul n'eût supposé que dans une ville opulente comme Séville, habitée par tant de gens riches, j'aurais moins de facilités que partout ailleurs pour une fondation...

2 J'étais donc là depuis l'époque que j'ai dite, et peu avant le Carême il n'était pas question d'acheter une maison, nous n'avions ni l'argent, ni le crédit que nous avions trouvés ailleurs; toutes celles qui avaient dit au Père Visiteur Apostolique qu'elles entreraient au Carmel et l'avaient supplié de faire venir des religieuses trouvèrent sans doute nos rigueurs trop sévères, ou trop dures pour elles; il n'en entra qu'une seule ...Il était temps qu'on me rappelât d'Andalousie, car j'avais affaire en Castille. J'étais extrêmement peinée de laisser les religieuses sans maison, mais je ne leur étais visiblement pas utile...

3 Dieu voulut alors qu'un de mes frères, nommé Laurent de Cepeda, rentrât des Indes, où il était resté plus de trente-quatre ans. Il s'affligea encore plus que moi de laisser les religieuses sans une maison à elles. Il nous aida beaucoup, et travailla en particulier à nous faire prendre celle qu'elles habitent maintenant. J'insistais beaucoup auprès du Seigneur, le suppliant de ne pas m'obliger à partir avant qu'elles aient une maison, je demandais aux soeurs de le prier, ainsi que le glorieux saint Joseph, et nous multipliâmes processions et prières à Notre-Dame. Lorsque je vis mon frère décidé à nous aider, j'entrai en pourparlers pour l'achat de quelques maisons. Mais lorsque tout semblait sur le point de s'arranger, tout échouait.

4 Un jour, en oraison, alors que je demandais à Dieu une maison pour celles qui ne désirent que le contenter, car elles sont ses épouses, il me dit: «Je vous ai entendues; laisse-moi faire.» Cela m'emplit de joie, la maison me semblait déjà là, et il en fut ainsi...

5 Un serviteur de Dieu joua un grand rôle dans cette fondation; ayant appris dès notre arrivée que nous n'avions personne pour dire la messe, il vint la célébrer chez nous tous les jours, bien que sa maison fût très éloignée et le soleil extrêmement ardent. Il se nomme Garcialvarez, homme de bien, connu dans la ville pour ses bonnes œuvres...Mon frère et lui allèrent ensemble voir la maison que nos religieuses habitent actuellement; ils en revinrent, avec raison, si satisfaits, qu'avec l'aide de Notre-Seigneur qui nous la destinait, en deux ou trois jours les contrats furent signés.

6 Nous n'y pénétrâmes pas sans difficultés, les locataires ne voulaient pas s'en aller, et les Frères Franciscains, nos proches voisins, vinrent nous sommer de ne pas nous y installer...

7 Ces difficultés durèrent plus d'un mois. Dieu permit enfin à la Prieure, à deux autres religieuses et à moi-même d'emménager, une nuit, pour que les moines ne soupçonnent rien jusqu'à ce que nous ayons pris possession.... A l'aube, le bon Garcialvarez dit la première messe et il n'y eut plus rien à craindre.

9... Nous vivions enfermées dans quelques pièces au rez-de-chaussée, et mon frère s'occupait tout le jour avec les ouvriers; il nous donnait de quoi manger, comme il le faisait déjà depuis fort longtemps; nous habitions une maison particulière, on ne savait absolument pas qu'il s'agissait d'un couvent, nous ne recevions donc que fort peu d'aumônes, à l'exception de celles du saint vieux Prieur de las Cuevas, Chartreux et très grand serviteur de Dieu...nous devons beaucoup à ce saint homme...

11 Lorsque tout fut terminé, j'aurais voulu qu'on posât sans bruit le Très Saint-Sacrement, car il m'est désagréable de faire de la peine s'il est possible de l'éviter; je le dis au P. Garcialvarez, qui en conféra avec le Père Prieur de las Cuevas: ils ne s'occupaient pas de leurs affaires personnelles plus activement que des nôtres. Il leur parut indispensable de poser le Très Saint-Sacrement en grande solennité pour faire connaître le monastère dans Séville et ils allèrent voir l'Archevêque. Tous décidèrent qu'on apporterait le Très Saint-Sacrement en grande pompe de l'une des paroisses; l'Archevêque donna l'ordre de convoquer le clergé, quelques confréries, et de décorer les rues.

12 Notre cloître, comme je l'ai dit, servait de passage, le bon Garcialvarez l'orna, ainsi que l'église, admirablement; il dressa de très beaux autels et fit des prodiges d'invention. Il y avait entre autres une fontaine d'eau de fleurs d'oranger; nous ne l'eussions pas demandée, ni souhaitée, et pourtant nous en fûmes très édifiées. La solennelle organisation de notre fête nous fut une grande consolation; les rues étaient si bien décorées, il y avait tant de musique et de ménestrels que le saint Prieur de las Cuevas me dit qu'on n'avait jamais rien vu de tel à Séville, c'était visiblement l'oeuvre de Dieu. Il suivit la procession, bien qu'il n'en eût pas coutume; l'Archevêque posa le Très Saint-Sacrement. Vous voyez donc, mes soeurs, les pauvres Déchaussées honorées de tous, et pourtant, auparavant, on n'eût pas cru qu'il y aurait de l'eau pour elles, bien que ce fleuve en roule beaucoup...

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