Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte du Livre des Fondations
De
la fondation du monastère du glorieux Saint-Joseph de Séville et ce
qui nous en coûta pour acquérir une maison.
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Nul n'eût supposé que dans une ville opulente comme Séville,
habitée par tant de gens riches, j'aurais moins de facilités que
partout ailleurs pour une fondation...
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J'étais donc là depuis l'époque que j'ai dite, et peu avant le
Carême il n'était pas question d'acheter une maison, nous n'avions
ni l'argent, ni le crédit que nous avions trouvés ailleurs; toutes
celles qui avaient dit au Père Visiteur Apostolique qu'elles
entreraient au Carmel et l'avaient supplié de faire venir des
religieuses trouvèrent sans doute nos rigueurs trop sévères, ou
trop dures pour elles; il n'en entra qu'une seule ...Il était temps
qu'on me rappelât d'Andalousie, car j'avais affaire en Castille.
J'étais extrêmement peinée de laisser les religieuses sans maison,
mais je ne leur étais visiblement pas utile...
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Dieu voulut alors qu'un de mes frères, nommé Laurent de Cepeda,
rentrât des Indes, où il était resté plus de trente-quatre ans.
Il s'affligea encore plus que moi de laisser les religieuses sans une
maison à elles. Il nous aida beaucoup, et travailla en particulier à
nous faire prendre celle qu'elles habitent maintenant. J'insistais
beaucoup auprès du Seigneur, le suppliant de ne pas m'obliger à
partir avant qu'elles aient une maison, je demandais aux soeurs de le
prier, ainsi que le glorieux saint Joseph, et nous multipliâmes
processions et prières à Notre-Dame. Lorsque je vis mon frère
décidé à nous aider, j'entrai en pourparlers pour l'achat de
quelques maisons. Mais lorsque tout semblait sur le point de
s'arranger, tout échouait.
4 Un
jour, en oraison, alors que je demandais à Dieu une maison pour
celles qui ne désirent que le contenter, car elles sont ses épouses,
il me dit: «Je vous ai entendues; laisse-moi faire.» Cela m'emplit
de joie, la maison me semblait déjà là, et il en fut ainsi...
5 Un
serviteur de Dieu joua un grand rôle dans cette fondation; ayant
appris dès notre arrivée que nous n'avions personne pour dire la
messe, il vint la célébrer chez nous tous les jours, bien que sa
maison fût très éloignée et le soleil extrêmement ardent. Il se
nomme Garcialvarez, homme de bien, connu dans la ville pour ses
bonnes œuvres...Mon frère et lui allèrent ensemble voir la maison
que nos religieuses habitent actuellement; ils en revinrent, avec
raison, si satisfaits, qu'avec l'aide de Notre-Seigneur qui nous la
destinait, en deux ou trois jours les contrats furent signés.
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Nous n'y pénétrâmes pas sans difficultés, les locataires ne
voulaient pas s'en aller, et les Frères Franciscains, nos proches
voisins, vinrent nous sommer de ne pas nous y installer...
7
Ces difficultés durèrent plus d'un mois. Dieu permit enfin à la
Prieure, à deux autres religieuses et à moi-même d'emménager, une
nuit, pour que les moines ne soupçonnent rien jusqu'à ce que nous
ayons pris possession.... A l'aube, le bon Garcialvarez dit la
première messe et il n'y eut plus rien à craindre.
9...
Nous vivions enfermées dans quelques pièces au rez-de-chaussée, et
mon frère s'occupait tout le jour avec les ouvriers; il nous donnait
de quoi manger, comme il le faisait déjà depuis fort longtemps;
nous habitions une maison particulière, on ne savait absolument pas
qu'il s'agissait d'un couvent, nous ne recevions donc que fort peu
d'aumônes, à l'exception de celles du saint vieux Prieur de las
Cuevas, Chartreux et très grand serviteur de Dieu...nous devons
beaucoup à ce saint homme...
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Lorsque tout fut terminé, j'aurais voulu qu'on posât sans bruit le
Très Saint-Sacrement, car il m'est désagréable de faire de la
peine s'il est possible de l'éviter; je le dis au P. Garcialvarez,
qui en conféra avec le Père Prieur de las Cuevas: ils ne
s'occupaient pas de leurs affaires personnelles plus activement que
des nôtres. Il leur parut indispensable de poser le Très
Saint-Sacrement en grande solennité pour faire connaître le
monastère dans Séville et ils allèrent voir l'Archevêque. Tous
décidèrent qu'on apporterait le Très Saint-Sacrement en grande
pompe de l'une des paroisses; l'Archevêque donna l'ordre de
convoquer le clergé, quelques confréries, et de décorer les rues.
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Notre cloître, comme je l'ai dit, servait de passage, le bon
Garcialvarez l'orna, ainsi que l'église, admirablement; il dressa de
très beaux autels et fit des prodiges d'invention. Il y avait entre
autres une fontaine d'eau de fleurs d'oranger; nous ne l'eussions pas
demandée, ni souhaitée, et pourtant nous en fûmes très édifiées.
La solennelle organisation de notre fête nous fut une grande
consolation; les rues étaient si bien décorées, il y avait tant de
musique et de ménestrels que le saint Prieur de las Cuevas me dit
qu'on n'avait jamais rien vu de tel à Séville, c'était visiblement
l'oeuvre de Dieu. Il suivit la procession, bien qu'il n'en eût pas
coutume; l'Archevêque posa le Très Saint-Sacrement. Vous voyez
donc, mes soeurs, les pauvres Déchaussées honorées de tous, et
pourtant, auparavant, on n'eût pas cru qu'il y aurait de l'eau pour
elles, bien que ce fleuve en roule beaucoup...
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