vendredi 21 septembre 2012

Thérèse d'Avila
Fondations, 23 (traduction Marcelle Auclair), extraits

Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila), nous vous proposons une découverte du Livre des Fondations


 
De la fondation du monastère du glorieux Saint-Joseph du Carmel dans la ville de Séville. On y célébra la première messe le jour de la Très Sainte Trinité en l'année 1575.

1 Alors qu'en cette ville de Beas j'attendais l'autorisation du Conseil des Ordres pour la fondation de Caravaca, je reçus la visite d'un Père de notre Ordre, un Déchaux, nommé le Maître Fr. Jérôme de la Mère de Dieu, Gracian; il avait pris notre habit à Alcala peu d'années auparavant. Homme de haute science et sagesse, fort modeste, il témoigna toute sa vie de si grandes vertus qu'il semble que Notre-Dame l'ait choisi pour le plus grand bien de cet Ordre primitif...

2 Lorsqu'il fut maître en théologie, il essaya d'entrer à la Compagnie de Jésus, on l'y admit, mais certaines circonstances firent qu'on lui demanda de patienter quelques jours...

3 En ce temps-là, un de ses grands amis, Fr. Jean de Jésus, maître en théologie comme lui, prit l'habit de notre Ordre au monastère de Pastrana; j'ignore si une lettre qu'il lui écrivit sur la grandeur et l'ancienneté de notre Ordre fut à l'origine de l'attrait qu'il lui inspira, ou s'il y eut une autre cause...Oh! Sagesse et Puissance de Dieu! Qu'il nous est donc impossible d'échapper à Sa Volonté! Notre-Seigneur voyait bien qu'un homme tel que lui était nécessaire pour mener à bien l'oeuvre que Sa Majesté avait commencée. Je la loue souvent pour la grâce qu'Elle nous fit en nous l'amenant; car si j'avais expressément prié Sa Majesté de nous envoyer une personne capable d'organiser notre Ordre à ses débuts, je n'aurais pas réussi à demander autant que ce que Sa Majesté nous a donné. Qu'Elle soit bénie à jamais.

4 L'idée de prendre cet habit lui était encore fort étrangère lorsqu'on lui demanda d'aller à Pastrana parler de l'entrée d'une religieuse avec la Prieure du monastère de notre Ordre, qui n'avait pas encore été transféré. Quels moyens la Divine Majesté n'emploie-t-elle pas! Car s'il avait décidé d'aller prendre l'habit là-bas, il aurait trouvé tant de gens pour le lui déconseiller qu'il ne l'aurait jamais fait. Mais la Vierge Marie, pour qui il a une extrême dévotion, l'en récompensa en lui donnant son habit...

6 La Vierge l'amena donc à Pastrana comme par ruse; il croyait n'y venir que pour obtenir l'habit pour une religieuse, alors que Dieu l'y amenait pour le lui donner à lui-même. Ô secrets de Dieu! …

7 A Pastrana, il alla demander à la prieure d'agréer cette religieuse, mais il semble qu'il la pria également d'obtenir de Notre-Seigneur d'entrer lui aussi dans notre Ordre...

8 ... elle souhaita aussitôt vivement qu'il entrât dans notre Ordre; elle dit à ses sœurs d'en considérer l'importance pour elles toutes, ceux qui le valaient n'étaient que peu nombreux, on peut dire qu'il n'y en avait pas, et de prier toutes ensemble Notre-Seigneur de ne pas le laisser repartir sans qu'il ait pris l'habit... Toutes prirent cette cause à cœur, elles ne cessaient d'implorer Sa Majesté par leurs jeûnes, leurs disciplines, leurs prières, et Elle voulut bien nous faire cette faveur. Donc, lorsque le Père Gracian alla au monastère des Carmes déchaux et qu'il vit tant de dévotion et de régularité au service de Notre-Seigneur dans un Ordre consacré à Sa glorieuse Mère qu'il souhaitait servir, son cœur fut saisi du désir de ne pas retourner dans le monde. Le démon cependant suscitait des obstacles, en particulier le chagrin qu'éprouveraient ses parents qui l'aimaient beaucoup et comptaient sur lui pour les aider à élever leurs nombreux fils et filles; laissant ce soin à Dieu pour qui il quittait tout, il décida d'être le sujet de la Vierge et de prendre son habit. On le lui donna à la grande joie de tous; les religieuses en particulier, et la Prieure, louaient Notre-Seigneur; elles pensaient que leurs prières avaient obtenu cette faveur de Sa Majesté...

12...Bien qu'il n'ait pas été des premiers à l'instaurer, il arriva à temps, et j'aurais souvent regretté de l'avoir entreprise si je n'avais eu si grande confiance en la miséricorde de Dieu. Je parle des maisons de religieux, car grâce à sa bonté, celles des religieuses ont toujours bien marché; celles des religieux n'allaient pas mal, elles auraient pu rapidement déchoir; faute d'être érigées Province indépendante, elles étaient gouvernées par les Chaussés... Chaque maison faisait ce que bon lui semblait. Jusqu'à ce qu'ils reçoivent leurs Constitutions et se gouvernent eux-mêmes il y eut bien des difficultés, car si les uns étaient d'un avis, les autres soutenaient le contraire. J'en étais souvent bien lasse.

13 Notre-Seigneur y remédia en la personne du P. Maître Jérôme de la Mère de Dieu; nommé commissaire apostolique, il eut autorité pour gouverner Déchaux et Déchaussées. II donna des Constitutions aux religieux: nous tenions déjà les nôtres de notre Révérendissime Père Général, il n'en fit donc pas pour nous mais pour eux seuls, de par son pouvoir apostolique et grâce aux lumières dont l'a doué le Seigneur. La première fois qu'il les visita il imposa si bien l'accord et la raison qu'on dut admettre que sa Divine Majesté l'aidait et que Notre-Dame l'avait choisi pour sauver son Ordre. Je la supplie d'obtenir de son Fils de lui être toujours favorable et de lui faire la grâce de beaucoup progresser à son service. Amen.


Aucun commentaire: