dimanche 11 décembre 2022

Homélie de Mgr Gueneley Philippe au Carmel

Homélie de Mgr Gueneley Philippe au Carmel

3ème DIMANCHE DE L’AVENT    2022

Is 35, 1-6a.10 ; Jc 6, 7-10 ; Mt 11, 2-11

          La première lecture du prophète Isaïe a déjà été proclamée lundi dernier. Elle nous est proposée pour nourrir notre espérance dans un monde qui a besoin de discerner les signes de la présence de notre Dieu Sauveur. Interrogeons-nous sur le regard que nous portons sur notre monde, sur nos proches, sur nous-mêmes. Nous avons bien des sources d’inquiétude. Et dans plusieurs situations nous avons raison de ne pas rester éloignés ou indifférents, de ne pas être satisfaits et de réagir, pour que nos déserts et nos pays arides fleurissent, pour que des territoires dévastés par la guerre retrouvent leurs paysages paisibles, pour que les personnes faibles, dont les enfants promis à la naissance et les pays bafoués dans leurs droits fondamentaux et leur liberté soient respectés dans leur dignité et que justice soit faite et que la vie l’emporte sur la mort.

         Le prophète Isaïe, parlant au lendemain du retour d’exil de ses compatriotes, les encourage à être forts, à ne rien craindre, car Dieu est là, « il vient lui-même vous sauver. » Il évoque même une « vengeance qui vient, une revanche de Dieu. » Termes forts qui révèlent un changement radical. A ceux que le Seigneur a libérés et qui entrent à Sion avec des cris de joie, le prophète promet allégresse et joie, alors que la douleur et la plainte s’enfuiront. On a du mal à croire à de telles perspectives aujourd’hui. Pourtant, au cœur des grandes souffrances et des pires épreuves existent des gestes, des actions, des paroles de réconfort, des actes de solidarité, de soutien, entre proches et, grâce à divers réseaux, liens et organismes, des personnes loin de chez nous peuvent être aidées. Je pense en particulier aux actions de l’ACAT, bien connues de vous, mes sœurs, à et à l’œuvre d’Orient, au CCFD-Terre solidaire, à l’Aide à l’Église en détresse. Dans votre mouvement Foi et Lumière, l’accompagnement des personnes en situation de handicap sollicite l’attention, la tendresse et le soutien des uns et des autres, chacun se sentant responsable de son frère.

 

         Saint Jacques indique que nous sommes dans l’attente du Seigneur, de son retour dans la gloire et il nous invite à prendre patience, comme le fait le cultivateur qui attend que vienne la moisson et que surgissent les fruits pour la récolte. Le mot patience revient cinq fois dans le passage que nous avons entendu. C’est dire l’importance de cette attitude dans la vie spirituelle, qui n’est ni résignation, ni défaitisme. Patience pour grandir dans la foi, pour laisser germer en nous la parole de Dieu qui a été semée. Il faut du temps pour nous laisser transformer par la parole du Seigneur, pour qu’elle produise du fruit en nous. Patience pour accueillir les dons de l’Esprit Saint. D’ailleurs, la patience est l’un des dons de l’Esprit Saint. « Ne nous lassons pas de faire le bien, dit saint Paul aux Galates, car, le moment venu, nous récolterons, si nous ne perdons pas courage. » (Ga 6, 9) Patience dans nos relations les uns avec les autres. Supporter avec patience fait partie des œuvres de miséricorde (cf. le CEC) Il faut du temps pour vivre avec amour ensemble et s’accepter différents, pour travailler ensemble, pour construire quelque chose en commun. « Le pape François a dit dans une homélie à Sainte Marthe : « L’attitude des parents à l’égard d’un enfant malade ou handicapé dit beaucoup sur la patience comme vertu en chemin. « Mais, c’est grâce à Dieu qu’il est vivant », disent ceux qui sont patients. » (février 2018). Parfois on veut aller vite, mais au risque de laisser quelqu’un au bord du chemin ou de manquer de respect. On se met en colère, quand cela ne va pas dans le sens que l’on voudrait. Il faut de de la patience dans notre lutte contre le mal. Souvenez-vous de la parabole de Jésus sur le bon grain et l’ivraie : « Vous risqueriez, en ramassant l’ivraie, d’arracher en même temps le blé. Laissez l’un et l’autre croître ensemble, jusqu’à la moisson. » Mt 13, 29-30). Souvenons-nous que Dieu est lui-même lent à la colère, plein de tendresse et de miséricorde.

          Nous retrouvons dans l’évangile la personne de Jean-Baptiste que nous avions déjà rencontrée dimanche dernier. Il est en prison et a entendu parler des œuvres réalisées par Jésus. Il se met à avoir des doutes, lui qui a baptisé Jésus dans le Jourdain. « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » La réponse est donnée par Jésus qui s’adresse aux envoyés de Jean-Baptiste. Il leur montre les œuvres qu’il accomplit et qui  sont celles annoncées par le prophète Isaïe et qui caractérisent l’ère messianique, œuvres de salut, de bienfaits, de merveilles, et non pas des œuvres de violence et de châtiment.

          Puis Jésus se met à évoquer la personnalité prophétique singulière de Jean : un messager pour préparer le chemin devant lui, Jésus. Jean est un des plus grands prophètes. « Et cependant le plus petit dans le royaume des Cieux est plus grand que lui. » En parlant ainsi, Jésus n’exclut pas Jean-Baptiste du royaume de Dieu. Il n’oppose pas les personnes. Il souligne des époques différentes. Jean-Baptiste est un précurseur, il appartient à l’époque qui a précédé la venue du Sauveur, du Messie Jésus. Les disciples de Jésus sont d’une autre époque. Avec Jésus s’ouvre un autre temps : c’est ce que veut dire saint Matthieu. Il est d’ailleurs à remarquer que pour l’évangéliste existe un lien entre ces époques. En effet, les premières paroles de la prédication de Jean-Baptiste comme celles de Jésus sont les mêmes : « Repentez-vous, car le royaume des cieux est tout proche. » (Mt 3, 2 ; 4, 17) L’un et l’autre sont au service du royaume de Dieu. Leur prédication a été un appel à la conversion vers Dieu, à la rémission des péchés et à la sanctification de l’homme intérieur.

          Avec le prophète Isaïe, ayons foi en la présence de Dieu qui vient nous sauver.

Avec l’apôtre Jacques, soyons patients en faisant le bien sans nous décourager. Avec Jean-Baptiste, préparons le chemin du Seigneur, préparons-nous à l’accueillir Puisse aussi notre monde lui laisser une place !

 Carmel de Saint-Maur, dimanche 11 décembre 2022                         + Philippe GUENELEY

 

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