Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Un
beau jour, Jésus range ses outils, à l’atelier où il travaille avec Joseph.
Ensemble, ils mettent en ordre les affaires : les clients, les commandes,
les factures.
Jésus
et sa mère Marie se comprennent sans trop parler ; elle sent bien et
pressent dans son cœur féminin et maternel l’inconnu qui continue, surtout
depuis le jour où le jeune Jésus avait répondu : « Ne saviez-vous pas que je me dois aux affaires de mon
Père ? » ( Luc 2,49)
Alors !
Pour être aux affaires de son Père - à trente ans à peu près -, Jésus quitte
les liens de la tendresse, de l’affection, de l’amitié, de la complicité avec
la famille et les amis. Un désir intérieur l’appelle ailleurs. Il va se poser
au bord du lac - c’est pas mal ! Pas pour faire le touriste, mais c’était
un lieu de passage, de brassage de populations, le « carrefour des
nations » - des païens.
L’annonce
de l’Evangile ne se fait pas dans les sacristies ni seulement à l’intérieur des
églises. C’étaient déjà les « périphéries » dont parle le Pape
François.
Cette
expérience de la famille de Jésus est aussi la nôtre : l’expérience du
détachement, du départ, des ruptures, des déplacements intérieurs aussi, des
séparations pour vivre la vie religieuse.
On
va toujours de commencements en commencements, même quand il nous semble qu’on
finit ! On n’a jamais fini de commencer, de re-naître, d’aller « de
commencements en commencements » pour accomplir ce qui est juste,
c’est-à-dire ajusté au désir de Dieu.
Dieu,
en Jésus, partage notre expérience ; il fait comme tout le monde - c’est
l’Evangile de ce jour (Matthieu 3,13-17). Passant sur les bords du
Jourdain, où Jean baptisait, il prend la file comme tout le monde, pour être
baptisé, comme les pécheurs, lui qui n’en est pas un.
On
comprend la réaction du cousin baptiseur : « C’est toi qui dois me
baptiser, et pas l’inverse ! » C’est Dieu à l’envers !
Oui,
Dieu se dit souvent à l’envers, à l’envers de nos idées, de nos imaginations, à
l’envers de là où on voudrait le mettre. « Tu fais pas partie de ceux qui
se font baptiser ! Tu n’es pas un pécheur. C’est pas ta place, dans
la file, avec eux – avec nous. »
« Mais
oui - dit Jésus à Jean – pour le moment, laisse-moi faire, on doit faire comme
ça. Laisse-moi prendre la file avec ceux qui ont besoin de descendre dans
l’eau, pour les sortir de l’eau. »
On
voudrait tellement mettre Dieu à côté, à côté de la vie, en dehors de la file,
à côté de nos fragilités. « Laisse-moi faire, laisse-moi être avec eux,
avec nous. »
Ouf !
Merci Jésus !
« Pas
pour faire comme eux, nous, mais pour qu’ils sortent de l’eau, l’eau de la
méchanceté, de la violence, pour vivre et aimer. »
C’est
ça, notre Baptême.
Prêtons
l’oreille de notre cœur à cette voix de tendresse : « Tu es mon Fils,
tu es ma fille bien-aimée ; en toi, j’ai mis tout mon amour. »
Une
voix – dit l’Evangile-, qui traverse les cieux, les nuits, les nuages, les
turbulences, les orages, pour atteindre le plus profond de ce que nous
sommes : des fils et filles bien-aimés du Père.
Ouvrons
la porte de notre cœur à la colombe dont nous parle ce récit – pas mille
colombes, mais une colombe, l’Esprit, la même qui, lâchée par Noé depuis
l’Arche pendant le déluge, est revenue avec un brin d’olivier dans le
bec : signe qu’elle avait trouvé un lieu où la vie avait repris dans les
eaux mortelles du déluge.
La
voix de la tendresse de Dieu, la colombe de son Esprit de Vie et d’Amour -, c’est
le message de ce dimanche :
Bien aimé de Dieu, le Père t’a donné tout son
Amour…
…
pour que tu sois à ton tour donnant de cet Amour - dans ce temps ordinaire,
quotidien, que nous n’avons jamais quitté mais dans lequel nous entrons.
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