Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Actes 10,25-26.34-35.44-48 ; Psaume 97 ; 1
Jean 4,7-10 ; Jean 15,9-17
« Aimez-vous les uns les
autres ! » « Dieu vous
aime ! » « Soyez dans la joie ! » (cf. Evangile de ce
dimanche)

« Regarde :
deux cents ans après, on se bat un peu partout sur la planète, on se tue, on ne
s’accepte pas ! Même autour de nous, en famille, dans les villages, et
même dans les paroisses, on n’arrive déjà pas à s’entendre, alors pour s’aimer,
bonjour ! Tout ça, ce sont de belles paroles du dimanche ! »
J’ai
fait remarquer à cet ami que notre monde, notre société, nos divers groupes,
notre entourage, n’étaient quand même pas un champ de bataille ! De belles
choses se faisaient pour vivre ensemble, se comprendre, s’aider, s’aimer.
« Ces
paroles dont tu me dis qu’elles sont belles, mais irréalisables, elles sont
aussi des réalités, des gestes, des attitudes, des actes. Et toi, moi, nous, on
peut essayer de faire exister réellement, là où on est, ce désir de Dieu sur
nous : s’aimer. »
C’est
le testament de Jésus - paroles avant sa mort – on vient de l’entendre ; Tout
est dit, tout est là et tout est à faire, pour donner chair et corps à ces
paroles.
Ce
testament n’est pas du vent ! Il est signé avec du sang, le sang d’une vie
donnée par Amour, jusqu’au bout.
La
validation du don, c’est la Résurrection du Christ, la raison donnée à l’Amour,
même si le contre-amour est toujours à l’œuvre et semble parfois prendre le
dessus - comme le disait mon ami. Et il est aussi à l’œuvre en nous ; mais
le don de l’Amour qui a eu raison en Jésus ressuscité aura raison sur toutes
les formes du mal.
Ce
que nous faisons quand nous essayons d’aimer bien, vraiment, ne peut jamais
mourir parce que c’est de Dieu, de lui, du cœur, de l’être même de Dieu qui
n’est qu’Amour. C’est la deuxième lecture.
Ces
belles et sûres paroles de Jésus sont l’essentiel de la vie tout court, le noyau
dur de l’existence - et on le sait bien.
« Qu’est-ce
que je ne donnerai pas pour qu’on retrouve la paix, pour qu’on se reparle, pour
qu’on s’entende, pour qu’on s’aime, pour qu’il n’y ait plus jamais la guerre,
même la petite « guégerre » ! »
Jean-Paul
Sartre disait : « L’enfer, c’est les autres. »
L’enfer,
ça peut être aussi moi, mais c’est de ne pas nous aimer les uns les autres. Ne
pas aimer, c’est s’enfer-mer (le même mot).
On
le sait bien aussi : On est qui, on est quoi, on est quoi ensemble, sans amour,
sans liens, sans attention, sans affection ?
Si
personne, jamais, ne nous avait parlé, nous serions des muets.
Si
personne, jamais, ne nous avait touchés, nous serions des momies.
Si
personne, jamais, ne nous avait aimés, nous ne serions personne.
« L’amour vient de Dieu. »
« Dieu est amour. »
« C’est lui qui nous a
aimés. »
« Celui qui aime est né de
Dieu. »
(1
Jean 4,7-8.10.16)
« Comme le Père m’a aimé (c’est la source), moi aussi, dit Jésus, je vous
aime. Aimez-vous les uns les autres » (Jean 15,9.12.17)… et pas
n’importe comment, pas comme on aime le chocolat ou le cinéma, pas pour
posséder, dominer, utiliser, mais en accueillant un don qui nous rend donnant à
notre tour.
Comme
la plus belle fille du monde, on ne peut pas donner ce qu’on n’a pas.
La
capacité et la qualité de bien-aimer, cela se reçoit, de la source, comme un
ruisseau se reçoit d’une source et peut irriguer la terre. Coupé de la source,
il croupit et s’assèche.
« Comme
le Père m’aime, je vous aime ; aimez-vous »… c’est un courant, ça
circule, ça vit - de la source à l’infini des autres et de l’autre.
Pour
battre, notre cœur, notre être, a besoin d’oxygène, d’être irrigué par le sang.
Pour aimer, notre cœur, notre être, a besoin
de recevoir de l’Amour.
On
sait bien aussi que ce que nous demande Jésus, c’est difficile. Il en a fait
lui-même l’expérience. C’est un apprentissage de chaque jour qui se terminera
dans la rencontre de celui qui est Amour et que nous aurons cherché, souvent à
tâtons.
En
nous demandant de nous aimer les uns les autres, Jésus ne nous dit pas :
« Ça y est, vous y êtes, aimez-vous, Alléluia ! Tout le monde il est
beau, tout le monde il est gentil… »
Alors
oui, pour le coup mon ami aurait raison : de belles paroles, de belles
chansons…
Jésus
nous indique le chemin et les moyens : aimer comme lui ; demeurer
dans son Amour et rester connectés à la source.
Sur
la tombe de l’Abbé Pierre, il est écrit : « Il a essayé
d’aimer » - lui qui répondait à une question d’un animateur de
télévision : « Pour vous, c’est quoi la vie ? » – il
disait : « La vie, c’est le temps que Dieu nous donne pour apprendre
à aimer. »
Puisons,
dans cette Eucharistie – la source – cette énergie d’apprendre à réaliser au
quotidien ce que Jésus nous demande aujourd’hui. Cette énergie s’appelle :
la force d’aimer.
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