Homélie 1° dimanche de Carême C
Père Maurice Boisson
Qui pourrait dire facilement que "la vie est un long fleuve tranquille" sur lequel on
se laisserait porter sans effort ?
C’est vrai que la vie est faite aussi de bonheurs et de
joies simples qu’on ne sait pas toujours goûter... Elle est faite aussi
d’affrontements, à ce qui arrive, aux événements, aux morsures de la vie, qu’on
ne maîtrise pas toujours. On le dit souvent : il faut se battre... C’est
vrai aussi à l’intérieur de nous-mêmes, où nous sommes tiraillés entre nos désirs
de bien, de bon, de vrai, et ces forces obscures qui travaillent en nous en
sens contraire. Cette expérience de combat intérieur est inscrite dans le cœur
humain dès l’origine. Le Christ lui-même l’a vécue. C’est l’Evangile que nous
venons d’entendre.
Jésus vient d’être baptisé, il est habité par l’amour du
Père. Nous aussi. Aussitôt, l’Esprit le pousse au désert, et lui fait
pressentir que ce ne sera pas facile de faire partager cet amour et toutes
les richesses du cœur de Dieu. C’est vrai aussi pour nous. Le désert n’est pas
seulement un lieu géographique d’aridité, c’est ce que nous ressentons lorsque
nous passons, nous traversons -, comme on parle d’une traversée du désert -
quand nous traversons l’épreuve, la solitude, le vide, l’aridité intérieure.
Jésus est tenté par Satan, au désert, quand on est moins
fort et moins protégé. Il rencontre une autre puissance que celle de l’amour
dont il est rempli, un Contre-Amour auquel il doit s’affronter. C’est aussi
notre expérience. Cette autre énergie que celle de l’Amour, elle a un
nom : la force du mal, nommée ici Satan, ou démon, ou diable :
diable vient d’un mot qui veut dire le diviseur, celui qui divise, qui écartèle
à l’intérieur de nous-mêmes.
On le voit bien à travers les trois tentations de Jésus. Le
tentateur fait trois propositions à Jésus, trois propositions qui n’ont rien
perdu de leur actualité.
« Dis à ces
pierres de devenir du pain » : la tentation de se suffire à
soi-même, où on croit que des choses peuvent combler notre faim, nos désirs,
alors qu’on sait bien qu’on a aussi besoin d’autre chose dans nos vies, nos
relations, nos professions. L’homme ne vit pas seulement de pain.
« Tu auras alors
le royaume de la terre » : cette tentation du pouvoir pour
dominer, pour écraser, pour régner. Tu seras le maître devant qui on se mettra
à genoux, qu’on adorera comme une idole. C’est Dieu seul que tu adoreras, ne te
prends pas pour lui.
« Allez,
jette-toi en bas », tout le monde est sur la place. En moins que rien
tu arriveras en douceur et tout le monde t’applaudira. Tu seras quelqu’un. Jésus
connaît cette tentation du paraître, des apparences, de l’orgueil. Il aurait pu
le faire... Une proposition qui est forte dans notre société.
Le tentateur avait épuisé toutes les formes de tentation,
dit la fin de l'Evangile. Toutes les grandes tentations - je ne parle pas de
manger un morceau de gâteau - se résument à ces trois grandes tentations,
toujours actuelles : la possession qui enferme, le pouvoir qui peut
écraser s’il n’est pas service, l’orgueil qui rabaisse les autres et ne les
reconnaît pas comme semblables.
Le Carême est ce temps favorable pour mettre à jour
nos GPS intérieurs afin de suivre
les bonnes directions de nos vies, brouillées par le diviseur qui voudrait nous
entraîner sur d’autres chemins, sans issue.
Saint Augustin, qui s’y connaissait en tentations et en
égarements dans la première partie de sa vie priait en s’adressant au
Christ : « Jésus le Christ,
lumière intérieure, lumière de mon cœur, ne laisse pas les ténèbres me
parler. »
Ecoutons aussi ces versets du psaume 90 : « Quand je me tiens à l’abri du très
haut… le malheur ne pourra te toucher, ni le danger approcher de ta
demeure : il donne mission à ses anges de te garder sur tous tes
chemins. »
Bon Carême
1 commentaire:
Merci, mes Sœurs, de nous faire partager ainsi les homélies du Père Boisson, toujours parlantes à nos cœurs.
Bon Carême à vous toutes
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