Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Quand on fait de la route, de
la randonnée, une excursion, il est recommandé de nous arrêter de temps en
temps… et de repartir, bien sûr !
Quand on fait un chemin
intérieur, comme celui du Carême, ou de la vie religieuse, ou vers des
décisions importantes, il est bon aussi de faire quelques étapes… et de
repartir, bien sûr !
C’est ce que nous faisons ces
dernières semaines de Carême : trois étapes, trois rencontres, jalonnent
notre chemin.
Au bord d’un puits :
Jésus rencontre une femme de Samarie, avec sa vie compliquée et sa soif d’amour
vrai. « Celui qui boira de l’eau que
moi je lui donnerai – dit Jésus - n’aura
plus jamais soif » (Jean 4,14)
Près d’une piscine, à Siloé : Jésus rencontre un
non-voyant et son désir de voir clair, son désir de lumière. « Va te
laver à la piscine de Siloé » (Jean
9,7) « Lave-toi les yeux, et le cœur, et tu verras » - dit Jésus.
Dans la maison de l’amitié, à Béthanie : aujourd’hui,
Jésus redonne vie à son ami Lazare.
Trois rencontres avec nous, sur nos chemins, au bord de nos
sentiers intérieurs, dans nos maisons, dans notre cœur. Il nous offre l’eau
vive, la source, dans nos désirs d’eau pure et fraiche ; la lumière dans
nos aveuglements, nos marches à tâtons dans l’obscurité. Il nous offre, ce
matin, la vie, la liberté intérieure dans nos enfermements, nos tombeaux, nos
pieds et mains liés par les bandelettes qui les empêchent d’aller.
Ça se passe dans la maison de notre cœur, à Béthanie,
village tout près de Jérusalem.
Jésus aime s’y arrêter, accueilli par Marthe, Marie, Lazare.
Il les aimait bien, dit Saint Jean (cf. Jean 11,5).
Lazare, son ami, vient de mourir – et Jésus pleure. Le cœur
de Dieu n’est pas en marbre – c’est dans les statues qu’il l’est. « Il en coûte au Seigneur de voir
mourir les siens » - dit le Psaume (115,15).
Les liens d’amitié, d’amour, sont source de vie. Ils lient
et ils relient, ils libèrent.
Dans cette maison de l’amitié, la vie revient, elle est
redonnée ; comme en nous-mêmes l’eau vive, la lumière, la vie nous sont
données par celui qui est la Vie, la Lumière, la Vérité, si nous consentons à
l’inviter dans notre maison, à nous arrêter près du puits ou de la piscine… sur
nos chemins.
« Lazare, viens
dehors ! » - crie Jésus d’une voix forte (Jean 11,43) ; pour
se faire entendre parmi les voix, les rumeurs de mort, d’enfermement, pour que la
vie se fasse entendre jusque-là où, apparemment, il n’y a plus de voix :
derrière la pierre du tombeau.
Une parole forte qui veut ouvrir la pierre de nos cœurs
fermés : « Viens dehors
- sors de toi-même, de ce qui t’enferme. »
« Déliez-le, et
laissez-le aller » - dit Jésus (Jean 11,44), quand Lazare sort avec
ses pansements, ses bandelettes qui le ligotent, qui l’empêchent d’aller,
d’avancer.
C’est le même appel que nous avons entendu dans la première
lecture : « Je vais ouvrir
vos tombeaux et je vous en ferai sortir » (Ezéchiel 37,12) ; la
même voix à la fois forte et douce dont l’écho résonne jusqu’au fond du puits,
de nous-mêmes.
« Si tu savais le
don de Dieu » (Jean 4,10). Cette voix forte et douce qu’on entend
même si nos yeux ne le voient pas. « Va te laver les yeux et le cœur. » La
même présence d’amitié qui appelle : « Viens
dehors – avec nous. »
« Si tu savais le
don de Dieu » - le don de la source qui jaillit du cœur de Dieu, le
don de la lumière de la vie et de la liberté intérieure. « Tu me
demanderais cette eau, cette lumière, cette vie. Ce don te rendra donnant, à
ton tour, de ce don, de Dieu. »
Et si c’était nous, notre monde : la Samaritaine, le
non-voyant, Lazare… tellement désireux de la lumière, de vie, d’eau fraiche,
d’une source – et en même temps tellement enfermés dans nos obscurités, dans
nos comas intérieurs.
Laissons-nous habiter par cette voix de l’Ami de Lazare,
notre Ami, le Christ : « Viens
dehors – tu verras l’aube, le matin de Pâques. »
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