
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
De tous temps, dans toutes
les civilisations, le repas tient une grande place. Pas de fête sans repas. Ce
n’est pas seulement la nourriture qui est partagée, mais joies et peines, nouvelles,
amitié, confidences, parfois disputes et désaccords – en tout cas, ce qui tient
à cœur.
« Au cours du repas… » (Jean 13,2) – un repas particulier, dont on vient
d’entendre le récit. C’est le denier repas de Jésus avec ses amis, un repas
plein de gravité, d’intimité, de confidences, où se mêlent trahison et Amour,
fête et souffrance.
Ce repas de la Pâque évoquait
le passage du peuple hébreux de l’esclavage d’Egypte à une terre de liberté,
par la puissance de Dieu. C’est le récit de la première lecture.
C’est ce soir le repas de la
Pâque de Jésus lui-même, le repas de notre propre Pâque – passage – c’est le même mot.
« Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le
monde, les aima jusqu’au bout. »
(Jean 13,1)
Le bout : c’est le terme
de l’Amour, le don libre de lui-même en nourriture d’Amour pour tous.
« Au cours du repas » : deux gestes qui traversent les frontières et
les siècles, jusqu’à ce qu’il revienne. Deux actes inséparables,
indissociables, qui disent la présence réelle de Dieu :
-
L’un, rapporté par Paul dans la deuxième
lecture : le partage du pain et du vin. « Ceci est mon corps livré pour vous. » (1 Corinthiens
11,23) « Ceci est mon sang versé, ma vie donnée - faites cela en mémoire de moi. »
-
L’autre geste, rapporté par Saint Jean dans cet
Evangile : Jésus se lève de table et lave les pieds de ses amis. Un geste
habituel à cette époque et dans les pays chauds, où on marchait pieds nus dans
la poussière ; une marque d’hospitalité, de service, d’accueil,
d’attention pour celui qui entrait dans la maison. Ce geste est accompli par le
serviteur et non par le maître. Là, c’est le Maître, Jésus lui-même, qui lave
les pieds ; il est serviteur et nous invite à être comme lui :
« Moi, le maître, je vous ai lavé les pieds. Vous aussi, faites pareil - vous ferez cela en mémoire de
moi. »
L’Eucharistie et l’amour des autres sont inséparables,
indissociables. C’est le même mouvement du don, du don de l’Amour, du don de
soi, qui rend réelle la présence de Dieu parmi nous.
Par l’Eucharistie : « Ceci
est mon corps donné, ceci est mon sang versé » - le Christ est
réellement présent. Par les gestes de charité, le Christ est réellement
présent.
La présence du Seigneur, qui est réelle dans l’hostie qu’on
adore, est réelle aussi dans les gestes de charité, d’attention, de bonté.
Ubi caritas et Amor, Deus ibi est.
« Où sont amour et charité, Dieu est présent » -
nous allons le chanter en refaisant ce geste du lavement des pieds à
quelques-uns d’entre nous. C’est un geste symbolique - on n’est plus au temps
de Jésus -, mais il y a tellement de manières de poser des actes, des paroles,
qui accueillent, qui aiment, qui soutiennent, qui lavent l’intérieur, qui
donnent la paix ; tant de manières d’aimer, de se donner.
En célébrant l’Eucharistie, ensuite, nous accueillerons ce
don de l’Amour du Christ qui nous rendra donnant, à notre tour, de cet Amour –
pour nous laver les pieds les uns aux autres, pour nous aimer comme lui.
« L’homme
qui prit le pain et le vin n’est plus devant nos yeux pour donner en festin
l’amour de Dieu. C’est à nous de prendre sa place aujourd’hui, pour que rien de
lui ne s’efface. » (Claude Duchesneau »
« Vous ferez cela
- l’Eucharistie et le lavement des pieds - en
mémoire de moi. »
Faisons-le maintenant, en mémoire de lui ; accueillir le
don de son amour et le donner.
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