Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Il
s’appelait Quentin ! Un garçon d’un groupe de cathé, à qui j’essayais,
avec beaucoup de mal, d’expliquer la fête de l’Ascension. Je demande au groupe
de faire un dessin qui représenterait, pour eux, l’Ascension.
Chacun
montre et explique son dessin : un Jésus qui monte comme la fusée dans le
ciel, des apôtres qui regardent les nuages ; pour deux petits
malins : un pont, avec des voitures - le pont de l’Ascension. Quentin
montre le sien : Jésus au milieu de ses amis ; il décolle un peu du
sol, et, à côté de lui, il y a une silhouette, les pieds bien par terre. Et il
explique : « Les amis de Jésus s’imaginent qu’il les quitte, mais en
fait il reste avec eux, seulement ils ne le voient plus. »
Tout
est dit… ou presque, sur l’Ascension. Jésus n’est plus devant les yeux de ses
amis, devant nos yeux, de façon visible et palpable ; il est avec eux,
comme avec nous « tous les jours
jusqu’à la fin du monde » - c’est la dernière ligne de l’Evangile
(Matthieu 28,20).
Alors,
« pourquoi restez-vous là, le nez en l’air, à regarder vers le ciel »
- dit le récit de la première lecture (cf. Actes 1,11) – « alors qu’il est
au milieu de vous ? »
Ce
que chantait le Père Duval : « Si vous chercher Jésus dans les nuages,
vous manquerez encore son dernier passage ! »
L’absence
apparente peut être plus présente que la présence physique. On peut être côte à
côte, se voir, et être absent. « Tu as l’air absent aujourd’hui. Tu n’es
pas là… » La présence dans l’absence conduit à la confiance. Au retour
d’une opération militaire dans un pays du Moyen Orient, un couple ami, à qui je
demandais si la séparation n’avait pas été trop dure – Bernard me dit :
« Ça a été dur, super dur, mais je crois que je n’ai jamais été aussi près
d’elle. » Et Nathalie d’ajouter : « Pour moi aussi, mais tu
étais là, avec moi. »
C’est
l’Ascension !
La
présence du Christ ressuscité au milieu de nous, en nous, dans l’absence
physique, permet de vivre, de tenir ; une présence infiniment plus intense
que la présence physique, quand Jésus était avec Pierre, Jean ou
Marie-Madeleine, et les autres. Il était avec eux et pas avec d’autres, il
était dans un endroit précis : le bord du lac, Béthanie, Capharnaüm – et
pas ailleurs ; dans un temps donné, il y a deux mille ans.
Aujourd’hui,
quand Jésus dit : « Il est bon
que je parte » - visiblement (Jean 16,7), c’est vrai : il est
présent à tous, partout, tout le temps, en Inde et au Carmel, aujourd’hui, dans
le cœur de chacune et de chacun. Il demeure, il reste. Il réalise sa promesse
d’être cette force d’en haut qui nous habite, par l’Esprit Saint.
« Je ne vous laisserai pas
orphelins. » (Jean 14,18) – une
promesse de tendresse.
Un
poète brésilien rêve qu’il marche sur la plage en compagnie de Jésus, en revoyant
tous les moments de sa vie. En se retournant, il voit deux paires de traces de
pas sur le sable. A certains endroits, il ne voit qu’une trace de pas. Ça
correspondait aux moments d’épreuve de sa vie. Il dit à Jésus :
« Pourquoi m’as-tu laissé seul, à certains endroits, quand j’avais le plus
besoin de toi ? » Jésus lui dit : « Là où tu ne vois qu’une
trace de pas, quand ça n’allait pas pour toi, c’est moi qui te portais. »
« Je suis avec vous tous les
jours » - pour toujours.
L’Ascension
n’est pas l’anniversaire du décollage de la fusée Jésus à destination de
l’infini des mondes. La Préface nous le dira tout à l’heure : « il ne
s’évade pas de notre condition humaine » - mais il nous donne d’entrer
avec lui dans le cœur de Dieu.
C’est
une plongée dans la source de l’Amour – où il nous entraîne avec lui.
Alors,
pourquoi, Galiléens que nous sommes, regarder vers les nuages, le nez en
l’air ? Tournons nos regards vers les Galilée de nos vies, c’est là que
nous le verrons. Allez ! non pas dans les nuages, mais dans ce qui fait
nos vies.
Je
me permets de citer le beau chant de Claude Duchesneau pour cette fête : « L’homme qui prit
le pain et qui prit le vin n’est plus devant nos yeux pour donner en festin
l’amour de Dieu. C’est à nous de prendre sa place aujourd’hui, pour que rien de
lui ne s’efface. »
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