mardi 21 novembre 2017

Homélie du 33 ème dimanche - Année A Carmel de Saint-Maur — Père Maurice Boisson



Homélie du 33 ème dimanche - Année A
Carmel de Saint-Maur — Père Maurice Boisson
 Le 1er dimanche de l’Avent, dans 2 semaines, nous prierons le Notre Père avec une nouvelle formule : « Et ne nous soumets pas à la tentation » deviendra « Et ne nous laisse pas entrer en tentation. »
            Je vous propose aujourd’hui une homélie sur ce changement. Car il ne s’agit pas d’une simple modification de mots mais de notre expérience, connue, de tiraillements entre notre désir de faire le bien et nos voix intérieures qui nous chantent que faire le contraire serait bien meilleur !

            Pourquoi changer cette formule ? Qu’est-ce que cela change ?
            C’est Jésus qui nous a appris à prier ainsi : « Quand vous priez, dites Notre Père… » (Lc11,2) Mais Jésus n’a rien écrit, il n’a rien enregistré, il n’a pas même envoyé un mail ! Ses actes et ses paroles se sont transmis oralement, de bouche à oreille parmi ses amis. Ce n’est que quelques 30 ou 50 ans plus tard , voire plus, que ce qui se transmettait au sujet de Jésus a été mis par écrit.
            Jésus parlait l’araméen, la langue des gens de son peuple, l’hébreu étant réservé aux textes religieux et à la liturgie. Les évangiles ont été écrits en grec, la langue de l’époque. 3 siècles plus tard, ils ont été traduits en latin, la langue du peuple de l’empire romain… et plus près de nous, ils ont été traduits en français et dans la plupart des langues du monde.
            C’est dire la difficulté à être le plus fidèle possible aux paroles, aux pensées, aux intentions de Jésus, et pour ce qui nous concerne aujourd’hui, à la prière qu’il nous a donnée : le Notre Père.
             Alors pourquoi changer ? On a toujours dit comme cela ! Non, pas toujours : seulement depuis le concile Vatican II, il y a un peu plus de 50 ans.
             « Ne nous soumets pas à la tentation » peut nous laisser croire que Dieu nous tenterait, qu’il nous soumettrait à une épreuve, à être tentés, pour voir si… La tentation au mal, quel qu’il soit, ne vient pas de Dieu. La sollicitation et le désir de Dieu pour nous ne nous poussent qu’à faire le bien. C’est là notre réussite humaine et éternelle.
             Mais il y a en nous un appel plus ou moins fort qui voudrait nous faire croire que nous serions bien plus heureux si nous coupions le son de la voix du bonheur de Dieu et si nous écoutions les publicités de nos égoïsmes, de nos jalousies, de nos pulsions de violence et de méchancetés en tout genre. C’est ce que  nous propose le tentateur, le diviseur, le malin, comme étant le top de notre existence.
             Notre Père,  Abba, - « Papa bien aimé » dans la langue de Jésus - ne peut pas nous soumettre à ce test, à cette épreuve. « Ne nous laisse pas entrer en tentation ! ». Le mot grec d’origine, entrer, veut dire aussi « Ne nous laisse pas embarquer dans cette épreuve de la tentation », aide-nous à ne pas nous laisser embarquer dans cet engrenage destructeur de ce que nous pouvons être. La tentation, chemin apparemment facile, est une épreuve difficile, c’est un combat intérieur dont on ne peut jamais sortir vainqueur tout seul. Difficile parce qu’il s’agit d’une épreuve, d’un test de nos choix intérieurs pour le bien, le bon, le vrai, le juste, le digne, le respect, l’Amour… pour tout ce qui peut rendre heureux, en vérité, nous, les autres et Dieu.
             Si nous adressons cette demande d’aide à notre Père, c’est que nous connaissons nos fragilités, nos faiblesses, et que nous avons confiance en sa présence, en son aide, avec notre consentement. « Il est malhonnête de prier pour la victoire, si l’on n’a pas envie de se battre. » disait quelqu’un. Ne nous laisse pas embarquer, nous faire arnaquer par les pubs illusoires et mensongères du diviseur, du malin, de satan.
            Dans nos tourments, nos combats intérieurs, nos échecs, nos fragilités, laissons notre Père, Abba, nous prendre dans ses bras. Il ne nous pousse pas au mal pour voir si… mais il nous protège des virus du tentateur.
            « Ne nous laisse pas entrer, embarquer, nous faire arnaquer et détruire par le mal. Délivre-nous du malin ! Et si nous nous laissons avoir, dans notre faiblesse, pardonne-nous nos offenses. » « Donne-nous aujourd’hui ce dont nous avons besoin aujourd’hui pour être heureux avec Toi, avec les autres, avec nous-mêmes. »

            « Il n’est pas de prière plus douce qui ne commence d’une manière plus familière et plus douce que le Notre Père » (St Albert le Grand dans son Commentaire de Saint Matthieu).

            Abba, Papa bien aimé, ne nous laisse pas entrer en tentation, délivre-nous du mal ! 

Aucun commentaire: