Homélie 13° dimanche C
Carmel Saint-Maur - P. Maurice Boisson
Cette période d’été qui commence – si on peut dire –
correspond généralement à une ambiance plus « cool », faite de
dépaysement, d’envie de souffler, de voyager, de recharger les batteries.
Pour vous, mes Sœurs, c’est peut-être un temps plus
privilégié d’accueil.
On sent parfois comme un besoin de faire le vide. Cela
suppose un désencombrement, un silence intérieur, un vide intérieur - pour
entendre un appel intérieur.
C’est la Parole de Dieu de ce dimanche - un message murmuré
avec une forte douceur, au plus profond du cœur, au cœur de nos préoccupations
quotidiennes, de notre labour. Ce message nous dit doucement une parole forte.
« C’est en profondeur seulement que les paroles se raccourcissent. »
Un geste sans parole, dans la première lecture. Il faut le
faire ! Le jeune agriculteur Elisée, arrivé à la dernière raie de charrue
du champ qu’il labourait, brûle sa charrue (en bois, bien sûr !), il brûle
ses bœufs avec, pour suivre quelqu’un qui l’appelait - sans paroles non plus - en
jetant vers lui son manteau (cf. 1 Rois 19,19).
Elisée se désencombre, pour un vide intérieur où peut se
faire reconnaître le signe d’un appel.
Chemin faisant, en cours de route, trois hommes dont on ne
dit pas les noms (qui nous ressemblent) disent à Jésus leur besoin de le
suivre. L’enthousiasme passager, l’émotion, l’attrait les animent.
« Où tu iras j’irai », disait une chanson. Jésus
les remet devant la réalité.
Au premier, il dit : « Je n’ai pas de
chez-moi » (cf. Luc 9,58).
Au deuxième : « Laisse les autres enterrer ton
père » (cf. Luc 9,60).
Au troisième : « Si tu regardes toujours dans le
rétroviseur, derrière, tu ne peux avancer, ni me suivre » (cf. Luc 9,62).
Que sont devenus ces trois hommes ? L’histoire ne le
dit pas. Jésus ne fait pas de reproche, ni de menaces. Il les met devant leur
liberté.
Un appel avec beaucoup de douceur, dans des formules
abruptes et radicales qu’il faut bien comprendre et qui nous rappellent
l’Absolu de Dieu. « Dieu seul suffit » - « Dieu seul
compte » - a dit sainte Thérèse d’Avila.
Cet appel se réalise dans les situations très diverses que
nous vivons. Que nous soyons Sœurs carmélites, chefs d’entreprise, retraités,
etc., on a tous un bout de charrue à brûler, un petit confort à laisser,
quelques nostalgies passées à enterrer, quelques encombrants intérieurs à mener
à la benne.
Ce à quoi Jésus nous invite, c’est à prendre un chemin de
liberté.
« Vous avez été
appelés à la liberté », dit Paul dans la deuxième lecture (Galates
5,13) – à libérer en nous ce qui nous empêche de répondre « présent »
à Dieu, aux autres, à nous-mêmes. Ce chemin n’est pas tout tracé d’avance. « Tu m’apprends le chemin de la
vie » (Psaume 15,11) – c’est le Psaume que nous venons d’entendre.
Jésus ne demande pas à tous de brûler sa charrue et son
attelage - son outil de travail, ses relations, les liens familiaux. C’est déjà
pas rien de la tirer, la charrue !
Certains entendent cet appel et y répondent. Ils, elles,
nous rappellent cet absolu de Dieu et témoignent de cette liberté intérieure de
répondre chaque jour au « Suis-moi »
(Luc 9,59).
A tous, cet Evangile nous murmure : « Suis-moi, donne quelques signes du
monde de Dieu, du Royaume, tu es appelé à la liberté ».
En parlant de charrue… Les anciens disaient :
« Pour labourer droit il faut regarder loin » - devant, pas derrière.
Celui qui met la main à la charrue ne regarde pas en arrière ! Le
rétroviseur n’est pas le miroir des chrétiens ! Jésus lui-même nous montre
l’exemple – ce sont les premières lignes de cet Evangile : « Il prit avec courage la route de
Jérusalem » (Luc 9,51).
Le message de ce dimanche paraît dur, contraignant, en
contraste avec cette ambiance estivale et plus « relaxe » dans
laquelle nous entrons. Pourtant c’est un chemin de vie, de liberté, de
désencombrement, d’écoute intérieure, qui nous est proposé.
Bon été !
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