Homélie 17e
dimanche C
Carmel de Saint-Maur P. Maurice Boisson
En écoutant cet Evangile sur la prière, je suis sûr que nos
amis qui participent avec nous à cette Eucharistie seraient contents que les
Sœurs fassent l’homélie sur cette Parole de Dieu. Pas vrai ?
Vous, mes Sœurs, vous vous y connaissez un peu mieux que
nous dans ce domaine ! Un temps important de vos journées est consacré à
la prière. Vous avez une vraie expérience.
Je ne dis pas que c’est facile pour vous non plus, ni sans
difficultés, mais avec les Frères et Sœurs moines et moniales des diverses
familles spirituelles, la prière, c’est un peu votre spécialité, au bon sens du
mot. Ce qui ne veut pas dire « monopole ».
Si nous sommes là ce matin, c’est que nous prions aussi, que
nous avons envie de prier, que nous essayons de prier, comme nous pouvons,
quand nous pouvons. On n’a pas toujours le temps ! Ni la liberté d’esprit.
Il y a sûrement un point sur lequel on se rejoint : la
demande de cet ami de Jésus – « Seigneur,
apprends-nous à prier » (Luc 11,1). On n’aura jamais fini de
demander : « Apprends-nous à
prier ». A moins que l’on n’ait plus rien à apprendre, si on sait
prier. « Apprends-nous à
prier. » C’est la vraie prière, avant toute autre.
On peut s’égarer dans la prière, comme dans tout ; par
exemple confondre l’activité et la prière : « Travailler, c’est
prier », dit-on. « Chanter, c’est prier » - au moins deux fois…
« Rendre service, c’est prier. » C’est mieux que rien ! C’est
sans doute vrai, tout le monde prie – est-ce suffisant ?
On n’imagine guère des époux ou des amis se dire :
« Moi je travaille, moi je m’occupe de la maison, pas besoin de se causer,
ni de prendre du temps ensemble. Ca suffit pour nous comprendre, nous aimer,
répondre à nos besoins. »
On sait bien que ça ne suffit pas. Entrer en relation avec
quelqu’un, - avec Dieu dans la prière – engage une écoute mutuelle. On voudrait
bien que Dieu nous écoute et nous exauce. Quand on a l’impression qu’il ne le
fait pas, on se demande s’il existe, où il est, s’il n’est pas sourd… Mais
est-ce qu’on l’écoute, lui ? Est-ce qu’on l’exauce ? Dieu aussi nous
prie, il exprime en nous des besoins et nous prie, sans contrainte ni chantage,
ni marchandage – de réaliser ce besoin : que ma volonté soit faite… que
mes besoins soient exaucés. On est tellement préoccupé de réaliser les nôtres –
de besoins, qu’ils soient exaucés !
« Je prie mais je ne suis pas exaucé. » Alors on
se décourage.
On est toujours exaucé, mais pas forcément là où on voudrait
l’être, pas forcément dans les demandes qu’on formule.
« Mon Père, notre Père, ne donne pas de mauvaises
choses à son enfant. » C’est l’Evangile de ce dimanche.
« Seigneur,
apprends-nous à prier ! »
Que répond Jésus à cet ami ?
« Quand vous
priez, dites : Père » (Luc 11,2) – « Notre Père », dit Matthieu (6,9)…
Il y a tout dans cette prière du Notre Père, à la fois nous
tourner vers Dieu, d’abord, avant de nous tourner vers nous-mêmes – ce qui nous
protège des caricatures de Dieu et du bavardage avec nous-mêmes. En même temps,
nous pouvons remettre dans le cœur de Dieu Père toutes nos humbles,
quotidiennes intentions. C’est le pain dont nous avons besoin pour chaque jour,
que nous demandons. Chacun sait bien de quel pain il a besoin. Chacun sait bien
de quel pain le monde a besoin pour chaque jour.
Péguy a écrit : « Mon Fils - dit Dieu - leur a
enseigné cette prière. Il a bien su ce qu’il faisait, ce jour là, mon Fils qui
les aimait tous ! Celui qui a dit son Notre Père peut dormir
tranquille ! Croyez-vous que je vais m’amuser - dit Dieu - à faire des
misères à ce pauvre enfant : ne suis-je pas leur Père ? »
« Seigneur,
apprends-nous à prier. »
« Dites :
Père… »
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