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Carmel de Saint-Maur P. Maurice Boisson
Chacun de nous sera sûrement content de manger à midi. Il y
aura peut-être des invités, de la famille, des amis, à cette saison. On sera
peut-être nous-mêmes invités.
La Sœur de service à la cuisine aura aussi préparé le repas
pour la Communauté.
Des « Marthe » auront travaillé à préparer le
repas !
Jésus lui-même, et ses amis, seront contents, comme
d’habitude, à Béthanie, d’apprécier le bon repas de Marthe, après avoir parlé
avec Marie.
Un petit brin de jalousie aurait-il agacé Marthe ?
« Tu pourrais quand même dire à ma sœur de me donner un coup de main, si
tu veux manger. Elle est là, assise, à t’écouter ! Moi je fais le
boulot ! Ca ne te fait rien ? »
« Marthe, calme toi, pose-toi un peu. Aujourd’hui, ne
mets pas les petits plats dans les grands » - « Tu t’agites pour bien des choses » (Luc 10,41) – Prends
le temps d’être un peu avec nous, on est tout près de Jérusalem, trois
kilomètres. Les choses ne s’arrangent pas pour moi. J’ai tant de choses à
partager avec vous, comme d’habitude. Et puis, on s’y mettra tous, pour le
repas. Pour les hommes, c’est plus important que tu sois avec nous, avec Marie,
Lazare, moi et les amis ; fais pas la tête. Prions ? »
On a dit tellement de bêtises sur cette scène d’Evangile, en
opposant Marthe et Marie, en opposant action / contemplation – travail /
prière. « Il faut bien magner » - mais « il faut bien
prier », bien sûr. Et on oppose Marthe - au fourneau et à l’épluchage -, à
Marie – au salon ou à l’Eglise. Et on va plus loin en opposant Marie - qui est l’être - et Marthe qui fait le faire ! Non, on est à côté de
l’Evangile.
Sainte Thérèse d’Avila, qui est quand même une référence en
ce lieu, écrivait : « Si elle (Marthe) était demeurée absorbée comme
Madeleine (Marie), il n’y aurait eu personne pour préparer le repas de cet Hôte
divin. (…) Qu’elles ne l’oublient pas, il faut quelqu’un pour préparer le repas
du divin Maître, et qu’elles s’estiment heureuses de servir avec Marthe »
(Chemin de perfection 17, 5-6).
Dans ce petit dialogue, amical, fraternel, entre proches, où
on peut se taquiner, Jésus dit quoi ? A nous : « Où est pour toi
l’essentiel ? Qu’est-ce qui est important ? Tu es tiraillé par toutes
sortes d’activités, même à la retraite ! Tu es très pris, agité, stressé,
soucieux, inquiet, sollicité, occupé – comme on dit qu’un téléphone est occupé,
« pas joignable ». Tu risques d’oublier l’essentiel, le
nécessaire » - dit Jésus à Marthe.
« Pose-toi - dit Jésus à Marthe – pour que tes
activités, qui sont bonnes, je t’en remercie, ne soient pas une source de
tension intérieure, mais au contraire que tes activités et ta vie intérieure
soient unifiées et source de paix. »
C’est sans doute un des grands enjeux de notre temps. Le
Père Chevrier, fondateur du Prado, disait à ses prêtres : « Mettez
l’intérieur, l’extérieur viendra toujours. »
« Où est l’essentiel, qu’est-ce qui compte le plus pour
toi, qu’est-ce qui vaut, qui vaut le coup, qui vaut la peine ? »
En nous, il y a Marthe et Marie ensemble, nous sommes les
deux. Si on est plus Marthe à certains moments, prenons garde à protéger notre
qualité intérieure, c’est la source.
Saint Bernard n’était pas tendre envers son ancien disciple
devenu le Pape Eugène. Il lui écrivait : « J’ai peur qu’au milieu de
vos occupations sans nombre, vous finissiez par vous y faire et vous y endurcir
le cœur au point même de ne plus en ressentir les dangers. Un cœur fermé à
l’amour de Dieu et des hommes, voilà ce à quoi vous vous exposez, si vous vous
laissez absorber entièrement dans ce travail insensé, sans rien réserver de
vous-même. Tout cela n’est propre qu’à vous tourmenter l’esprit, épuiser le
cœur et vous faire perdre la prière » (De la considération).
C’est vrai aussi pour nous, à notre place. On peut
transposer si on n’est pas Pape.
Si on est plus Marie, rappelons-nous que les temps de
proximité avec le Seigneur, de ressourcement, nous sont donnés pour un meilleur
service, un meilleur amour des autres, et pour « trouver Dieu en toutes
choses », dit Saint Ignace.
Merci à Marie de nous rappeler l’importance et la nécessité
vitale de ces temps que nous prenons, comme ce matin - au milieu de nos
occupations et activités - d’écoute, de prière, de nourriture intérieure.
Merci à Marthe de nous rappeler le service de l’accueil de l’autre,
pratiqué par Abraham. C’est la première lecture. Abraham court à la rencontre
des trois voyageurs, à l’heure la plus chaude de la journée. Il leur permet de
refaire leurs forces. Ces voyageurs étaient des envoyés de Dieu (cf. Genèse
18,1-10a).
Puissions-nous offrir à toute personne, comme à Jésus, dans
cet Evangile, le dévouement de Marthe et l’écoute de Marie.
Puissions-nous offrir, sans rien opposer, à la fois nos
cœurs et nos mains, l’affection et la table, les fleurs et le pain.
Et merci aux « Marthe » qui ont ou qui vont
préparer le repas tout à l’heure, et merci aux « Marie » qui nous
permettent de prendre ce temps de prière et d’Eucharistie.
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