Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Je ne sais pas si Saint
Joseph aurait aimé qu’on parle de lui !
Les Evangiles ne rapportent
de lui aucune parole ; ça ne veut pas dire qu’il n’ait rien dit. On n’a
pas éprouvé le besoin de retenir quelques mots de lui. C’est dommage. Joseph le
silencieux ; il a plus agi que parlé !
Quand on parle de Joseph,
c’est toujours en référence à Marie. C’est le début de l’Evangile : « Jacob engendra Joseph, l’époux de
Marie, de laquelle fut engendré Jésus » (Matthieu 1,16).
Dans la prière eucharistique,
il est resté comme l’époux de la Vierge Marie : « avec Saint Joseph,
son époux… ». Comme s’il n’existait pas pour lui-même ! -alors qu’en
ce temps c’était la femme qui était reconnue en référence à son mari.
Pourtant Joseph a une
existence clef par rapport à la venue de Dieu parmi nous. Il a permis que les choses se fassent, comme on dit, et
qu’elles se fassent le mieux possible (les choses : les choses de Dieu). C’est un rôle très important, essentiel,
pas forcément au premier plan médiatique. Et Joseph nous apprend ce
service : permettre que les choses
se fassent et se fassent le mieux possible ; permettre, à notre toute
petite place, que le désir de Dieu se réalise là où on est.
Joseph a permis – au sens de
faciliter, de coopérer - avec Marie, son épouse -, à ce grand événement de
l’Incarnation.
Joseph, le silencieux, écoute
sa conscience, éclairée par le murmure de la voix de Dieu, par l’ange, dans un
songe. Il écoute, au sens d’obéir, animé par l’amour pour Marie et la confiance
en ce qui le dépassait, le concret d’une situation humaine, et l’intuition
intérieure d’une Présence.
Joseph, le silencieux, ne
s’est pas laissé prendre dans la vague des bavardages, des rumeurs, des
médisances, qui auraient pu coûter la vie à Marie, si Joseph l’avait renvoyée
publiquement.
Joseph aime Marie, il fait
confiance, il décide de la renvoyer sans que ça se sache.
Pour préserver Marie,
finalement il la prend chez lui. « N’aie pas peur de la prendre chez toi,
avec toi. L’enfant qui est en elle vient de l’Esprit Saint (et pas d’un autre
homme). » (cf. Matthieu 1,20)
On n’a pas idée du drame
humain qu’ont pu vivre, en ces moments-là, Marie et Joseph. On est tellement
habitué. Cette page d’Evangile ne nous fait peut-être plus guère d’émotion, on
le transpose tout de suite à l’action de Dieu. Les propositions de Dieu à
Marie, puis à Joseph, évoquées par les interventions de l’ange - envoyé de Dieu
-, se greffent sur les situations humaines, sur leur conscience, leur amour,
leur disponibilité, sur la capacité qu’ils ont à voir plus loin que le drame
qu’ils vivaient.
Dans cette expérience, ils
ont perçu, deviné, - Oh, pas comme une évidence, comme peuvent dire facilement
certains discours, mais comme un appel à faire confiance, à avancer sans savoir
où ils allaient, un peu comme Abraham -, appel à rester ensemble et à assumer
l’avenir.
Ce que Joseph a fait avec
Marie : la naissance à Bethléem, se réfugier en Egypte, chercher le gamin
perdu dans la foule et rien comprendre à ce qu’il disait en parlant des
affaires de son Père, en apprenant à ce fils un métier, des relations, l’amour,
la prière.
Si ce fils a si bien parlé du
Père, s’il a eu les gestes et les mots de l’amour envers tous, ça ne lui est
pas tombé du ciel : il l’a appris avec Marie et Joseph, et dans l’intimité
de la relation avec Dieu, son vrai Père. Dieu, Marie et Joseph ont appris la
vie humaine à Jésus, notre vie, avec ses heurs et ses bonheurs ;
Ils ont permis que cette vie
humaine, la vie du monde, la vie des hommes, la nôtre, devienne vie de Dieu.
Si Joseph le silencieux a peut-être pas beaucoup parlé
« officiellement », dans les Evangiles, il est un homme de l’écoute ;
son oreille est d’une grande finesse. Il écoute ce qui bruit en son esprit, ce
qui remue en son cœur. Il y répond par des gestes, par des actes, dans l’ombre
où se tient le veilleur, le passeur.
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