Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Josué 24,1-2a.15-17.18b ; Psaume 33 ;
Ephésiens 5,21-32 ; Jean 6,60-69
« Faites
le bon choix ! » Il ne s’agit pas d’un slogan commercial, ni
électoral - bien choisir - mais faire le bon choix devient difficile tellement
les sollicitations, les courants de pensées, les opinions, les modes de vie,
les slogans, font partie de notre paysage habituel et peuvent nous écarteler
intérieurement.
Quelqu’un
me disait ces jours : « Je suis pris dans un tel tourbillon d’idées,
d’opinions contraires, que j’ai du mal à me retrouver moi-même. » Tout
choix est un chemin.
« Faites
le bon choix ! » C’est ce que dit Josué au peuple dans la première
lecture. « Arrêtez de zapper vers les idoles » - « Choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir (Josué
24,15) : le vrai Dieu, celui de vos pères, ou les dieux païens du pays où
vous êtes. Vous voulez servir quel Dieu ? Celui qui vous a libérés de
l’esclavage, qui vous protège, qui vous accompagne ? Ou les idoles, « ouvrages des mains humaines… qui ont
des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas, une bouche et ne
parlent pas » (Psaume 113) ?
C’était
tentant – ça l’est toujours- les veaux d’or, en tout genre. « Moi et les miens, dit Josué, nous voulons servir le Seigneur »
(Josué 24,15). Pas facile d’affirmer ce choix dans une société où on voudrait
évacuer toute référence aux valeurs religieuses !
« Faites
le bon choix », dit Paul aux chrétiens d’Ephèse dans la deuxième
lecture ; le choix des relations mutuelles dans l’amour, le respect, le
soin de l’autre, le don de soi - comme le Christ - et non le choix de
l’égoïsme, de la domination ou de la supériorité.
On
se bloque toujours sur ces quatre mots : « Que les femmes soient soumises à leur mari » (Ephésiens
6,22). C’était une grande avancée pour la libération de la femme, en ce temps
ou les femmes étaient en situation d’esclaves, soumises à des maîtres.
Paul
dit : « Soyez soumises à votre mari – et pas à vos maîtres. » Ça
change de situation et de relation ; et sur les quinze lignes de ce texte,
il y en a dix pour les hommes qui doivent aimer leur femme comme leur propre
corps, en prendre soin, ne pas les mépriser ; les aimer comme le Christ,
c’est-à-dire dans le don de soi. Bref : « Faites le bon choix, dit
Paul, celui de vous aimer réciproquement dans le don de vous-mêmes, vous êtes
reliés les uns aux autres. »
« Faites
le bon choix », suggère Jésus à ses proches amis, dans cet Evangile.
Il
avait dit des paroles dures sur le pain vivant qu’il est lui-même, sur sa chair
à manger… Beaucoup s’en retournaient et cessaient de l’accompagner. Ils ne
croyaient pas que ce charpentier, qui plus est, venant de Nazareth, pouvait
avoir une telle proximité avec Dieu, au point de l’appeler son Père, et de s’identifier
à Lui.
Et
voilà que l’hostilité des responsables religieux envers Jésus contaminait ses
propres amis, jusqu’aux plus proches. « Ce serait plus prudent
d’arrêter-là, se disaient-ils, de retourner au lac, de reprendre la
barque… »
L’Evangile
est toujours d’une grande actualité. Ce moment qui nous est rapporté ici est un
des plus durs et des plus émouvants de l’Evangile : la tentation de s’en
retourner, comme les amis d’Emmaüs tournant le dos à Jérusalem sur la route du
retour, après la mort de Jésus.
Ne
plus croire à demain, ne plus voir la suite… A ce moment, Jésus sentait bien
ces sentiments dans le cœur de Pierre, de Jean et des autres : « Ils
ont eux aussi envie de partir, d’arrêter. »
Jésus
dit aux douze, avec beaucoup de douceur, de calme et d’émotion :
« Voulez-vous partir, vous aussi ? Choisir de partir ? »
Jésus
ne fait pas de chantage et ne les contraint pas : « Vous n’allez
quand même pas m’abandonner ? » Il ne dit pas :
« Voulez-vous rester ? », mais : « Voulez-vous partir,
vous aussi ? Soyez libres… »
Cet
appel à la liberté provoque le choix. Alors que beaucoup retournent à leur
sécurité et à leur vérité, Pierre s’engage, avec ses amis, dans l’incertitude,
vers le bon choix, celui de la vie… « Tu
as les paroles de la vie… A qui irions-nous, Seigneur ? » (Jean
6,69).
Le
regard appelant et le cœur aimant de l’ami de la première heure les invite à
poursuivre la route, certes inconnue, mais grosse de promesse de vie.
C’est
aussi notre expérience, la route de nos vies : nous retourner, nous arrêter,
zapper, voir ailleurs, ne pas savoir, ne pas pouvoir choisir… C’est bien
normal.
Jésus,
comme Josué, comme Paul, nous invite doucement à ouvrir librement, paisiblement
et patiemment des chemins vers la vie, vers le don de soi, vers l’amour, vers
l’Evangile - « A qui irions-nous,
Seigneur ? Tu as les paroles de la Vie » - vers le Dieu vivant et
vrai, et les vraies valeurs – un chemin de liberté.
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