Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Apocalypse 11,19a ; 12,1-6a.10ab ; Psaume
44 ; 1 Corinthiens 15,20-27a ; Luc 1,39-56
En
ce jour du 15 août, qui pourrait prétendre rassembler des millions de personnes
dans tous les coins du monde, pas pour être à la page, mais pour fêter
quelqu’un ?... les pèlerins des grands sanctuaires comme les fidèles du
petit oratoire de village abritant une statue de Notre-Dame, les frères et
sœurs réunis dans la peur et la clandestinité au Moyen-Orient comme le malade
dans sa chambre égrenant son chapelet, et le prisonnier dans sa cellule,
balbutiant ces quelques mots d’appel : « Notre-Dame de… », etc.
Ce
n’est ni une star ni une divinité, ni une personnalité puissante qui nous
réunit ce matin comme ces millions de fidèles : c’est une jeune fille,
Myriam – Marie - née il y a un peu plus de deux mille ans dans un village de
mauvaise réputation - Nazareth.
Une
femme dont on n’a rien dit, ou presque, et dont on ne rapporte que quelques
paroles… entre autres celle d’avoir dit « oui » à la proposition de
Dieu de collaborer avec lui pour redonner au monde la beauté, la santé, le
bonheur, abîmés et détruits par l’affreux dragon dévoreur, figure du mal,
décrit dans la première lecture.
Parce
qu’elle est l’une d’entre nous, en connivence profonde avec Dieu, en
correspondance avec ses frères et sœurs - notre humanité - tant de personnes
blessées par la vie, les événements, les découragements, et aussi reconnaissantes
des grâces reçues - trouvent près de la Vierge Marie apaisement, soutien,
force, écoute - comme Elisabeth dans cet Evangile – toute cette humanité, dans
ses misères et ses espoirs, que Marie rejoint, s’est exprimée tout au long des
siècles dans la sculpture, dans le bois ou la pierre, dans le marbre ou autre
matière, dans la peinture, dans la musique, la poésie, les prières… dans la
plus grandiose cathédrale comme dans la petite statue à la croisée de chemins
au plus profond de la campagne.
Chantée
par Brassens – « Je vous salue Marie… », célébrée par Péguy, dessinée
par le petit garçon représentant la Vierge ouvrant son manteau pour le mettre à
l’abri, priée par le général Leclerc traversant la Loire à la nage pour
échapper aux Allemands – se sentant couler il priait le chapelet…
Nous
pourrions nous mettre aussi dans cette liste. Quand on ne peut plus dire :
« Notre Père », il nous reste de pouvoir nous tourner vers une maman
à qui on peut confier : « Prie pour nous, maintenant… »
En
évoquant cet attachement affectueux, fidèle, simple à Marie, nous sommes bien
au cœur de cette fête de l’Assomption. Assomption :
prendre avec, « assumer », avec.
Marie
est morte, bien sûr, comme tout le monde, mais son fils l’a prise avec lui, l’a
« assumée », pour qu’elle ne connaisse pas la dégradation de la
tombe. Il l’a prise avec lui, avec son corps et son esprit, tout son être, pour
la conduire dans la présence rayonnante de Dieu.
C’est
ce qu’a déclaré le Pape Pie XII en 1950 comme étant vérité de foi :
« Au terme de sa vie terrestre, la Mère de Dieu a été prise (« assumée »)
au ciel corps et âme, dans la gloire de Dieu. »
Ce
n’est pas extraordinaire : c’est la suite logique et normale de la vie de
la Vierge Marie ; tant de fois elle l’a pris dans ses bras et par la main,
ce bébé, cet enfant, cet ado fugueur, ce jeune à Cana, cet homme, son fils mort
que les soldats lui remettent en le détachant de la croix.
Il
lui devait bien ça à sa mère : la prendre à son tour avec lui pour la
conduire dans la présence de Dieu.
Ce
qui est arrivé à Marie, c’est ce qui nous attend, c’est ce qui attend
l’humanité : la réussite possible de nos vies. A son tour elle nous prend
avec elle.
Cette
fête, aussi simple que belle, comme la fête d’une maman, aussi proche de nous -
de nos vies - qu’ouverte sur l’avenir, aussi humaine que remplie de Dieu… cette
fête touche les cœurs parce qu’elle dégage un parfum d’espérance et de
tendresse.
On
ne peut pas vivre sans se relier, sans s’accrocher à plus qu’à nous-mêmes, dans
tous les domaines, à plus forte raison en fermant les yeux sur le sens de nos
vies, de notre société, sur notre avenir final.
« Regardons
l’Etoile, dit Saint Bernard ( « Marie » signifie « étoile de la
mer » ), en la priant tu ne désespère pas… si tu te sais vacillant sur les
flots de ce monde, parmi les bourrasques et les tempêtes, regarde l’Etoile,
appelle Marie – Etoile de la mer. »
Bonne
fête, bonne route !
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