Carmel de Saint-Maur - P. Maurice Boisson
Textes : Gn 18, 1-10a ; Ps 14 ; Col 1,
24-28 ; Lc 10, 38-42
Comme le Samaritain de
dimanche dernier, Marthe et Marie ont, elles aussi, traversé les siècles et les
frontières. Elles sont toujours bien vivantes et d’actualité, en chacune de
nous. Elles en font dire, des paroles, pour justifier ou opposer nos manières
de vivre : nous réaliser dans l’activité débordante qui peut nous faire
fuir de nous-mêmes, ou nous désintéresser des tâches matérielles qui nous font
décoller des réalités de la vie. « Heureusement qu’il y a Marthe et des
Marthe ! Sinon, qu’est-ce qu’on mangerait à midi ! » Jésus lui-même
en a bien profité, de ces bons repas, dans la maison de Béthanie… Et
pourtant ! Il n’y a pas que les choses matérielles qui comptent ! On
a besoin de nous arrêter, de réfléchir, de prier, de nous poser dans le
tourbillon de la vie ! Marthe, Marie, que l’on étiquette trop vite !
« Marthe au fourneau, Marie au salon » !
Elles sont chacun,
chacune de nous, en nous, pour nous rappeler l’essentiel : le message de
Jésus de ce Dimanche.
L’impatience de
l’accueil, de prendre le temps de la disponibilité, d’écouter, de nous asseoir,
et le temps de prendre soin, de réconforter… c’est notre Samaritain de dimanche
dernier : il voit, il s’arrête… il prend soin, tandis que les autres,
occupés a leurs affaires, passent leur chemin.
Jésus ne fait pas de
reproche a Marthe. Par deux fois, il l’appelle, dans une douce proximité :
Marthe, Marthe… comme pour l’apaiser dans son agitation : « Marthe…
Ne fais pas compliqué ! » Dans le texte original, traduit par
« tu te donnes du souci, tu t’agites pour bien des choses ! Ne
fais pas compliqué », pour prendre le temps d’être avec nous, assieds-toi,
5 minutes, j’ai des choses importantes à partager… Et Dieu sait- c’est le cas
de le dire- si Jésus, ce jour-là, avait besoin de se confier, pensant à ce qui
allait lui arriver. Il ne voulait pas faire de sermons ! Cette maison de
Béthanie était un endroit de paix, d’amitié, de réconfort… Dans les moments
difficiles, on a besoin d’écoute, de confiance… Marie, assise, écoutait sa
parole. Saint Jean dans son Évangile, nous dit que « Jésus aimait Marthe,
et sa sœur, et Lazare (11,5). »
Bien sûr que les affaires
matérielles, c’est important. On ne peut pas les négliger. Jésus ne dit pas le
contraire. Il ne s’agit pas de jouer aux anges ! On sait ce que ça donne…
Votre Mère sainte Thérèse, mes sœurs, dit des choses importantes sur le sujet.
Quand elle parle des casseroles, je crois, ou qu’elle dit que les sœurs qui
préparent le repas s’estiment heureuses de servir comme Marthe ! Jésus
nous invite toujours à la même vigilance : qu’est-ce qui est essentiel,
premier, dans ta vie… Par quoi tu te laisses prendre, accaparer, au point de ne
plus écouter, de ne plus prier, de ne plus savoir t’arrêter pour te retrouver toi-même,
retrouver l’Autre, l’autre. La vie d’aujourd’hui nous entraîne dans une
accélération qu’on a parfois du mal à maitriser. On est pris, très pris, occupé
comme on dit d’un téléphone qu’il est occupé, « pas joignable ». La
disponibilité intérieure peut se boucher, cette meilleure part dont parle
jésus, le meilleur de nous-même, pour nous-même, pour les autres, pour Dieu,
pour vivre, et pour quoi ?
Un compagnon de saint
Bernard était devenu Pape- Eugene. Quand on est Pape, on doit être très occupé.
Saint Bernard lui écrit avec fermeté : « J’ai peur qu’au milieu de
tes occupation sans nombre, tu finisses par t’y faire et t’endurcir le cœur au
point de ne plus en ressentir les dangers : un cœur fermé à l’amour de
Dieu et des hommes… si tu te laisses absorber entièrement dans les occupations,
sans rien réserver de toi-même ! » Puissions-nous unifier et pacifier
nos vies en étant à la fois Marthe et Marie : offrir, sans rien opposer, a
la fois notre cœur, nos oreilles… et nos mains, et nos bras, offrir l’amitié et
la table… Les fleurs et le pain, le dévouement de Marthe et l’écoute de Marie…
chercher l’essentiel, la meilleure part de nous-mêmes.
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