Homélie, Fête de la Trinité
Carmel de Saint-Maur - P. Maurice Boisson
Les plus anciens parmi nous - et aussi les moins anciens - ont
vu changer beaucoup de choses ces dernières décennies, dans tous les
domaines : la technique, la communication, les idées, le ménage, les comportements,
l’Eglise, la famille ; et sans doute aussi la vie religieuse. Tout un
bouleversement - et ça continue - marque nos façons de faire, de vivre, de
penser, de travailler.
Est-ce qu’on a vu changer la manière dont une mamie ou un
grand-père tenaient la main de leurs petits enfants en se promenant ? Est-ce
qu’on a vu changer la façon, pour une maman, d’embrasser son bébé ? Pas
plus qu’on a vu changer la manière de serrer la main d’un proche qui va mourir
ou ces petits gestes discrets d’attention mutuelle. Des gestes, des signes, de
tous les temps, venus du meilleur du cœur humain - c’est-à-dire : de ce
que nous sommes, de qui est Dieu, puisque nous sommes faits à son image. Dieu
est comme ça. Il nous a faits pour être comme lui. Il est Trinité pour que nous
soyons Trinités. Ce mot nous a peut-être rebuté, parce qu’on le confondait avec
un problème ou une équation mathématique, parce qu’il paraissait compliqué,
ennuyeux, déconnecté.
On la fête aujourd’hui, la Sainte Trinité, l’être même de
Dieu et de nous. Tout le contraire d’un problème - quand on aime, on ne compte
pas.
Nous fêtons la carte d’identité de Dieu et la nôtre, puisque
nous sommes faits à sa ressemblance: des êtres en relation, qui apprennent à
communiquer, à s’aimer chacun dans ce qu’il est. De cet échange jaillit comme
une source, une force qui nous est donnée pour que nous vivions sur ce modèle,
qui est notre original. On ne le reconnaît plus: les copies sont tellement
déformées…
C’est ce modèle de l’être même de Dieu que nous sommes
invités à suivre. Pour nous-mêmes, pour nos relations, notre société, nos
familles, nos communautés. La Parole de Dieu de ce dimanche ne nous parle pas
de théorie mais de personnes : Dieu le Père avec qui Jésus, le Fils, a des
liens de partage, d’affection. « Tout
ce qui appartient au Père est à moi. » (Jean 16,16). Elle nous parle
de l’Esprit de vérité qui nous guide vers la vérité et qui répand l’amour de
Dieu dans nos cœurs ; c’est la deuxième lecture. Ces relations sont un
mouvement réciproque vers l’autre, dans l’accueil et le don. Un beau clin d’œil
pour la fête des mères ! Ca tombe bien. Au cœur de l’être même de Dieu, au
cœur de ce que nous sommes - à son image - au cœur de ce qu’il y a de plus
beau dans l’humanité : le cœur d’une maman. La preuve, c’est que Dieu
lui-même a voulu en avoir une. Et on sait bien que la maternité, comme la
paternité, n’est pas seulement biologique ou physique. Il y a tant de manières
de donner vie, de faire grandir, d’aimer, de faire naître. Nous fêtons
aujourd’hui ce don que Dieu fait de ce qu’il est : Créateur et Amour.
Pour résumer, un geste, un signe: le signe de la croix, que
nous faisons trop souvent machinalement. Nous portons sur nous ce mouvement
vertical qui nous relie à Dieu et à la terre, et ce mouvement horizontal qui
nous ouvre aux autres, à tous. Le centre, la jonction de ces deux mouvements,
c’est le cœur, le centre de notre être. Ces deux mouvements sont inséparables,
au risque de nous déséquilibrer.
Ce geste prend tout notre corps, notre être, pour l’irradier
d’une Présence d’Amour. En nous rappelant qui est Dieu, il nous dit qui nous
sommes, qui sont les autres, quel est le modèle de la vie sociale. Il nous
indique les deux directions fondamentales de nos vies, sur le rond-point de
notre cœur: vers Dieu, vers nos frères et sœurs.
Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire