lundi 27 mai 2013

Thérèse d'Avila, 4° Demeures, 1 (traduction Marcelle Auclair), extraits


Thérèse d'Avila,  4° Demeures, 1 (traduction Marcelle Auclair), extraits
Avec l'Ordre du Carmel qui se prépare au V° centenaire de la naissance de Sainte Thérèse de Jésus (d'Avila) nous vous proposons une découverte du Livre des Demeures ou Château intérieur.
 
De la différence qu’il y a entre les contentements et tendresses dans l’oraison, et les plaisirs qu’on y trouve. En quoi la pensée diffère de l’entendement. Choses utiles à ceux qui sont distraits dans l’oraison.

1 Pour commencer à parler des Quatrièmes Demeures, j’avais grand besoin de me recommander au Saint-Esprit comme je l’ai fait ; je l’ai supplié de dire désormais à ma place quelque chose des Demeures suivantes afin que vous le compreniez, car nous commençons à entrer dans les choses surnaturelles, et il est extrêmement difficile de les faire entendre si Sa Majesté ne s’en charge point...
2 ... On croira que pour atteindre ces Demeures il faut avoir vécu très longtemps dans les autres, mais bien qu’à l’ordinaire il faille être passé par celles dont nous venons de parler, cette règle n’est pas absolue, comme vous l’avez sans doute entendu dire souvent ; car ces biens qui Lui appartiennent, le Seigneur les donne quand il veut, comme il veut, et à qui il veut, sans faire tort à personne.
3 Il est rare que les bêtes venimeuses pénètrent dans ces Demeures, et si elles y entrent, elles ne font pas de mal, l’âme y gagne plutôt. J’estime bien préférable qu’elles entrent et nous fassent la guerre à ce degré l’oraison ; s’il n’y avait point de tentations le démon pourrait se servir, pour nous leurrer, des plaisirs que Dieu accorde, et nuire plus grièvement à l’âme qui a moins à gagner lorsqu’elle n’est pas tentée ...
4 Mais je vous ai dit que je parlerais ici de la différence entre les contentements qu’on trouve dans l’oraison, ou les plaisirs. Je crois qu’on peut appeler contentement ce que nous obtenons nous-mêmes par la méditation et nos prières à Notre-Seigneur, cela procède de notre nature, avec, tout de même, l’aide de Dieu, car dans tout ce que je dis il faut comprendre que nous ne pouvons rien sans Lui ...
5 Je me rappelle soudain un verset que nous récitons à Prime à la fin du premier psaume ; la fin du verset dit : Cum dilatasti cor meum (Ps 118,32). Cela suffira à ceux qui ont une grande expérience de ces faveurs pour comprendre quelle différence il y a entre les unes et les autres ; mais un plus ample exposé est nécessaire à ceux qui ne l’ont point. Les contentements dont j’ai parlé ne dilatent pas le cœur...
7 ... Je veux absolument que vous sachiez que pour beaucoup avancer sur ce chemin et monter aux Demeures que nous désirons atteindre, il ne s’agit pas de beaucoup penser, mais de beaucoup aimer ; donc, tout ce qui vous incitera à aimer davantage, faites-le. Nous ne savons peut-être pas ce que c’est qu’aimer, je n’en serais pas très étonnée ; or il ne s’agit pas de goûter le plus grand plaisir, mais d’avoir la plus forte détermination de désirer toujours contenter Dieu, de chercher, autant que possible, à ne pas l’offenser, de le prier de faire toujours progresser l’honneur et la gloire de son Fils, et grandir l’Église Catholique. Telles sont les marques de l’amour, mais ne croyez pas qu’il s’agisse de ne pas penser à autre chose, et que si vous êtes un peu distraite, tout est perdu.
8 Ces tumultes de la pensée m’ont parfois bien oppressée ; depuis un peu plus de quatre ans, j’ai enfin compris, par expérience, que la pensée, ou, pour mieux me faire comprendre, l’imagination, n’est pas l’entendement ...il est habituel que la pensée s’envole soudain, Dieu seul peut la lier ...
9 ... De même que nous ne pouvons pas retenir le mouvement du ciel qui va vite, à toute vélocité, nous ne pouvons pas davantage retenir notre pensée, nous lui adjoignons toutes les facultés de notre âme, nous croyons que nous sommes perdues et que nous faisons mauvais usage du temps que nous passons devant Dieu. Mais l’âme, d’aventure, est tout unie à Lui dans les très proches Demeures tandis que la pensée, encore aux alentours du château, en proie à mille bêtes féroces et venimeuses, acquiert des mérites par ces souffrances ; cela ne doit donc pas nous troubler, ni nous inciter à abandonner ; car c’est ce que prétend le démon Pour la plupart, toutes nos inquiétudes et nos épreuves viennent de ce que nous ne nous comprenons pas.
11 ... Il n’est donc pas bon de nous laisser troubler par nos pensées, ni d’y accorder la moindre importance ; ainsi si elles nous viennent du démon, il y renoncera ; et si cela provient, comme c’est le cas, ainsi que d’autre conséquences, de la misère : où nous a laissées péché d’Adam, prenons patience, soufrons tout pour l’amour de Dieu ...
13 ... laissons aller ce traquer de moulin, contentons-nous de moudre notre farine sans que cessent d’agir la volonté et l’entendement.

 
 





 

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