Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
« Voilà c’que c’est, mon vieux Joseph,
d’avoir pris la plus jolie parmi les filles de Galilée, celle qu’on appelait
Marie ! Tu aurais pu prendre Sarah, ou Déborah, et rien ne serait arrivé, mais
tu as préféré Marie ! »
Ces
quelques lignes de la chanson de Moustaki – « Joseph » -, nous
mettent au cœur de l’Evangile d’aujourd’hui et de l’attente de Noël.
Qu’est-il
donc arrivé ? D’accueillir l’inattendu de Dieu dans une situation
difficile, douloureuse, pour Marie et Joseph : un projet de mariage
brutalement brisé.
En
voyant revenir Marie de chez sa vieille cousine en Judée, Joseph voit qu’elle
est bien enceinte ; il n’y est pour rien. Que faire ? Obéir à la loi
et renvoyer publiquement Marie ? C’est la solution en ce temps là, mais ce
n’est pas l’idée de Joseph. Il aime tant Marie. Joseph est bon. Comment peut-il
la livrer à la honte publique et aux jugements des hommes ? Non ! Il
décide de la renvoyer, mais en secret. C’était l’idée de Joseph dans la nuit de
sa souffrance.
« Tu
aurais pu, mon vieux Joseph, te séparer de Marie. »
Ce
n’était pas l’idée de Dieu. Ca aussi, ça nous rejoint : nos projets, nos
idées qui ne sont pas ceux de Dieu, on connaît !
« Joseph, n’aie pas peur de prendre
chez toi Marie, ton épouse. »
(Matthieu 1,20)
Chez
toi, pas dans un appart du quartier, pour sauver la face ! Chez toi.
« L’enfant qui est engendré en elle
vient de l’Esprit Saint. » (Matthieu
1,20)
« Et c’est toi qui donnera le nom à
cet enfant : ‘Jésus - le Seigneur sauve ! » (Matthieu 1,21)
Il
revient au père de donner le nom à l’enfant. « Tu seras père
autrement. »
Il
n’y a pas que les paternités et les maternités du sang qui donnent la vie, qui
font grandir.
Joseph,
cet homme tout simple, avec son rabot, sa scie, son mètre et son marteau, n’est
pas un beau parleur : il est écoutant ; il écoute la voix intérieure,
comme il écoutait chanter sa varlope. Une présence intérieure à lui-même dans
sa conscience, exprimée par la parole de l’ange – porte-parole de Dieu la nuit.
Dieu
parle dans le secret de notre conscience, au plus profond de nous-mêmes, si
nous savons faire taire les bruits de fond et de l’autour. Dieu parle dans nos
situations les plus difficiles – c’est souvent là qu’il est.
« Eh
oui, tu aurais pu – mon vieux Joseph -, écouter le règlement, la loi, les
commérages, les habitudes, l’orgueil de ta réputation ; mais tu as préféré
écouter le discret murmure de ta conscience chuchoté par l’ange pendant ton
sommeil – la nuit porte conseil ! »
« Quand Joseph se réveilla – c’est la fin de cet Evangile -, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait
dit : il prit chez lui Marie, son épouse. » (Matthieu 1,24-25)
Sans
parole, il obéit – il écoute. Ca ne veut pas dire « sans sentiments et
sans questions ».
Joseph
change son idée, son projet de renvoyer Marie, pour s’ajuster à l’idée de
Dieu : un juste, un ajusté. Réaliser le projet de Dieu : devenir père
autrement, vivre avec Marie, accueillir l’enfant, le faire grandir, lui
apprendre un métier, et surtout, l’essentiel, lui apprendre ce qu’est un père
aimant.
Ce
n’est pas étonnant que Jésus parlera après, avec passion et amour, de son Père
du ciel. Il l’aura appris près de Joseph, ce qu’est un père -, comme il aura
appris près de Marie les premiers gestes et les premiers mots de la tendresse
dont il saura si bien faire profiter celles et ceux qu’il rencontrera.
La
présence de Dieu venu à Noël n’est pas dans les nuages mais au cœur même de nos
situations humaines. Ces jours, les lumières sont dans les rues, dans les vitrines,
dans les arbres, sur les façades des édifices et des maisons ; les
lumières sont au-dehors. Est-ce qu’elles sont aussi à l’intérieur ? dans
nos cœurs ? Sont-elles même dans nos impossibles humains, là où ce qui
paraît sans issue peut être déverrouillé ?
« Tu
aurais pu, mon vieux Joseph, cette nuit-là, mettre des boules Qiès à ta
conscience et à ton cœur. Apprends-nous ta bonté et ton écoute.
‘Ne crains pas de prendre chez toi
Marie.’
Merci
Joseph, grâce à toi on peut accueillir dans nos cœurs celui qui sans cesse
vient. »
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