Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
En
cette année 2013, la famille a été au cœur de l’actualité sociale et politique,
elle a fait l’objet de décisions, de manifestations, de passion aussi. Toucher
à la famille, c’est atteindre un des points les plus sensible de l’être humain
et de la société ; c’est atteindre les fondamentaux de la grande et unique
famille humaine, - la complémentarité homme-femme, l’enfant, le don de la vie
et son développement, la vie ensemble, la sexualité, l’amour, les conditions de
vie.
On
n’a pas inventé ces réalités : elles ont été données à l’humanité, elles
sont aujourd’hui fragiles, fragilisées.
C’est
une banalité de dire que la famille - les familles -, sont affrontées à des
turbulences, qu’elles sont malmenées, éboulées parfois ; mais elles
restent une valeur sûre, souvent un refuge pour les jeunes, les « grands
jeunes », qui ont du mal à les quitter.
Comme
l’écrit le Pape François : il s’agit de la cellule fondamentale de la
société, du lieu où on apprend à vivre ensemble dans la différence, et à
appartenir aux autres.
Alors,
c’est particulièrement grave quand ces liens se fragilisent.
On
fête aujourd’hui la Sainte Famille : peut-elle nous apporter quelques
lumières pour aujourd’hui ?
On
a tellement idéalisé la Sainte Famille - sans problèmes et sans histoires -,
qu’elle peut paraître bien loin de nos préoccupations actuelles ; pourtant,
c’est le contraire : la famille de Jésus, avec Marie et Joseph, n’a pas
été un fleuve tranquille. Ca commence mal : par des questions sur l’origine
du bébé qui va naître. Puis une naissance dans la précarité, l’inconnu, dans
une mangeoire d’animaux, au cours d’un déplacement. Quelques jours après, voilà
le bébé en danger de mort ; le pouvoir politique veut le faire mourir par
peur de perdre son propre pouvoir. Il faut vite partir, de nuit, la maman, le
bébé, Joseph, vers un pays d’asile : l’Egypte – c’est le récit
d’aujourd’hui, la situation étant toujours d’actualité. Cette famille ne peut
revenir dans le pays, ils s’installent à Nazareth. La violence et la haine
étaient déjà au cœur de l’amour, l’amour toujours menacé. C’est pas
nouveau !
La
suite est celle aussi des autres familles : le métier, les clients, la
maison, quelques difficultés avec le jeune ado Jésus qui trompe la vigilance de
ses parents lors d’un pèlerinage ; retrouvé trois jours après, il entend
les reproches de son père et de sa mère, à qui il répond quelque chose
d’incompréhensible. Et puis, un beau jour, comme beaucoup, le grand fils quitte
la maison, les parents, l’atelier, le village, les amis, pour habiter au bord
du lac, où il commence à parler en public et à regrouper quelques compagnons.
Ca
ne se passe pas très bien non plus, du côté familial, puisque sa mère et sa
famille veulent aller le chercher et le ramener à la maison : « Il a perdu la tête » (Marc
3,21). Lui, continue : « Ma vraie famille, ce sont ceux qui font la
volonté de mon Père » (cf. Matthieu 12,46-50).
On
connaît la fin : sa mère, Marie, reste seule ; elle recevra dans ses
bras le corps mort de ce fils pendu comme un bandit.
La
Sainte Famille : mon Dieu ! (C’est le cas de le dire.) Pas un roman à
l’eau de rose !
On
croirait un récit d’aujourd’hui. On est bien au cœur des soucis, de la vie, des
joies des familles – saintes familles -, chacune affrontée aux événements.
Dieu,
qui est lui-même famille – et non pas « le grand solitaire des
mondes » -, a pris famille : comme nos familles, une famille à
risque. « Le Verbe s’est fait chair. »
(Jean 1,14) Dieu a habité parmi nous – pas « pour du beurre », comme
on dirait, - mais dans nos situations les plus attachantes et les plus
fragiles, là où précisément se réalisent, comme ce fut le cas pour Jésus,
les apprentissages de la vie ensemble,
de l’amour, des relations, de la différence, de la responsabilité, de la
participation - peut-être aussi du pardon ! Et ce n’est pas seulement vrai
pour la famille de sang, bien sûr ! Une communauté religieuse est aussi
une famille à sa manière - sinon on ne s’appellerait pas Sœur ou Frère.
Cette
fête de la sainte Famille nous apprend à ne pas idéaliser la famille, mais à
essayer de la réaliser.
Marie,
Joseph, Jésus, au cœur même des turbulences qui les secouaient, - mère, père,
fils -, chacun a su écouter au plus profond de lui-même, de sa conscience, de
la présence de Dieu, un murmure, une parole, leur indiquant leurs routes,
différentes.
C’est
cet ajustement au désir de Dieu qui les a mobilisés et conduits.
Seigneur,
à la prière de la Vierge Marie et de Saint Joseph, affermis nos familles dans la
grâce et la paix.
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