dimanche 9 février 2014

Homélie 5e dimanche A 2014

Homélie 5e dimanche A 2014
Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Il n’est pas rare qu’au cours d’un repas quelqu’un dise : « Peux-tu me passer le sel, s’il te plaît ? »

Il est courant, en entrant dans une pièce sombre, d’allumer la lumière, comme on dit -, « pour voir clair ».

Un grand savant, à peu près au temps de Jésus, disait : « Rien n’est plus utile que le sel et le soleil. »

Toute la Bible témoigne du rôle important du sel et de la lumière pour la vie. Pour donner du goût, conserver les aliments – avant le congélateur -, il y avait le saloir ! On a connu ça !

Le sel exprimait aussi l’accueil, l’hospitalité, l’amitié. Ne dit-on pas des Jurassiens, considérés comme d’un abord un peu froid, qu’il faut manger un demi sac de sel avec eux pour que les relations soient chaleureuses, confiantes et solides ?

Il en est de même pour la lumière : rappelez-vous, si les pommes de terre sont attirées par la lumière, à plus forte raison nous autres, les humains. Dans la Bible : lumière, feu, ce qui est lumineux -, sont des signes forts (cf. 1° Lecture).

Ce n’est pas étonnant que Jésus, dans l’Evangile de ce matin, ait repris ces deux éléments importants : le sel et la lumière, pour nous dire : « Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde (Matthieu 5,13-14), vous qui êtes mes amis, baptisés, qui essayez de vivre « à la chrétienne ». C’est votre signe distinctif, de donner du goût et de la clarté. »


Jésus ne dit pas : « Soyez le sel, la lumière » -, mais : « Vous êtes sel et lumière. Vous êtes ça ; soyez ce que vous êtes, ce que font de vous le baptême et votre amitié avec moi. »

Jésus ne dit pas : « Vous êtes des lumières ! – Vous êtes les meilleurs. » - Non, il connaît bien nos fragilités et nos obscurités.

« Vous êtes lumière parce que vous êtes branchés à une source. »

« Je suis la lumière du monde. » (Jean 8,12 ; 9,5)

Au temps de Jésus, il s’agissait de lampes à huile, qui ne donnaient pas une super puissance comme nos projecteurs, nos spots ou autres leds qu’on cache dans les coins - ça fait trop de lumière.

« Vous êtes la lumière douce, qui aide à se diriger dans l’obscurité, quand on n’y voit rien, pour ne pas tomber ou se prendre une porte ou un coin de table ; qui aide à trouver la sortie, qui redonne espoir lorsque, dans une nuit d’insomnie à l’hôpital, la petite veilleuse combat l’angoisse de la nuit et qu’au petit matin un faible rayon pénètre à travers le rideau pour annoncer le jour et libérer de la nuit. » C’est l’expérience intérieure de nos vies.

« Vous êtes le sel. »

Quand on n’a plus de goût à rien, ou que plus rien n’a de goût, c’est important de donner du goût, de l’intérêt, du sens.

Autrefois, quand le feu commençait à baisser, les parents disaient : « Mets une poignée de sel ! » - pour raviver la flamme. Et ça repartait !

Que de flammes, de braises - en commençant par les nôtres -, n’avons-nous pas à raviver ? Pas avec le prestige des grands discours -, dit Paul dans la deuxième lecture (1 Corinthiens 2,1-5), mais avec la faiblesse de la petite flamme alimentée à la puissance d’amour du Christ.

La lumière n’attire jamais le regard sur elle-même – sauf pour les décorations, les fêtes -, mais vers ce qu’elle met en valeur, ce qu’elle permet de voir. Elle est au service de ce qu’il est important d’éclairer. De même qu’on ne mange pas du sel pour lui-même, tout seul, mais avec des aliments qu’il « relève », comme on dit. Le sel est dans la soupe, dans la terre, dans la vie – dit Jésus. La lumière est là où elle peut éclairer, pas à côté, pour faire bien !

Etre sel et lumière, c’est « vivre à la chrétienne », humblement, au quotidien de nos vies : un style de vie, de penser, d’agir, de réagir, d’être en relation -, qui donne un peu de clarté et de goût de l’Evangile, d’une lumière douce, d’un goût agréable, qui donne envie.

« Les âmes trop sûres d’elles-mêmes font trembler » - disait le fondateur des Rédemptoristes, Saint Alphonse de Ligori. Alors qu’il s’agit de faire aimer la belle clarté et le bon goût de la vie selon le cœur de Dieu, cette vie marquée aussi par les pannes de courant et le goût à rien.

« Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde. »

« C’est notre tour – écrit François Mauriac – d’entretenir, autant que nous le pouvons, ce feu, cette lumière qui éloigne les bêtes, mais qui attire tant les âmes qui ont froid. »

 

 

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