Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Exode12,1-8.11-14 ; Psaume 115 ; 1
Corinthiens 11,23-26 ; Jean 13,1-15
Au
temps de Jésus, on marchait pieds nus ou en sandales sur des chemins
poussiéreux. Celui qui arrivait chez quelqu’un, dans une maison, se faisait
laver les pieds, avant le repas, par le domestique - l’esclave - muni d’une
bassine d’eau et d’un linge pour essuyer. C’était un geste élémentaire
d’hospitalité, accompli par la personne la moins importante de la maison, un
geste d’abaissement.
Quelle
surprise chez les douze amis de Jésus, réunis autour de la table pour le
dernier repas ! Le moment est grave, angoissant, il y a de la trahison et
de l’arrestation dans l’air. Jésus avait eu beau les prévenir, ils ne voulaient
pas y croire.
Voilà
que Jésus lui-même - « Maître et
Seigneur » (Jean 13,13) - se fait le dernier des domestiques. Il
accomplit le geste de l’esclave au service. Il prend une bassine d’eau, un linge,
et se met à laver les pieds des amis, et à les essuyer.
Il
aurait pu laver les mains, en se tenant debout devant chacun… trop facile. Il
lave les pieds, et, pour le faire, il faut se mettre à genoux, se baisser,
s’abaisser, regarder vers le bas.
Lui
« de condition divine, ne retint pas
jalousement le rang qui l’égalait à Dieu, mais il s’est abaissé, prenant la
condition de domestique » (Philippiens 2,6).
« Ce
que j’ai fait pour vous, faites pareil. Lavez-vous les pieds les uns aux
autres » (cf. Jean 13,14-15).
Aujourd’hui
on a des douches, des chaussures, la voiture. Il ne s’agit pas de reproduire
tel quel le geste de Jésus - « C’est
un exemple que je vous ai donné » (Jean 13,15) – mais il s’agit de
faire ce que signifie ce geste d’accueil, de service, d’abaissement, de
dessaisissement de soi pour rencontrer l’autre sans le regarder de haut, mais
du bas, avec sa poussière et ses pieds sales.
Il
y a tant de manières de faire comme Jésus a fait pour nous. Laver les pieds est
un exemple du temps de Jésus. Quels exemples prendrait-il aujourd’hui pour nous
dire la même chose ?
Chacun
et chacune de nous entrevoit sans doute à quoi peut correspondre le geste de
Jésus dans sa vie quotidienne, ses relations, la vie ensemble. Il s’agit tout
simplement de la charité fraternelle, de notre capacité à servir, à aimer, à
revêtir cette attitude intérieure du christ : le don de soi.
« Ayant aimé les siens qui étaient
dans le monde, il les aima jusqu’au bout » (Jean 13,1).
« Ceci est mon corps livré, mon
sang versé. Vous ferez cela en mémoire de moi » (cf. Luc 22,19-20).
« C’est un exemple que je vous ai
donné afin que vous fassiez, vous aussi, ce que j’ai fait pour vous » (Jean 13,15).
Ces
deux gestes sont inséparables : le lavement des pieds - geste du service,
et l’Eucharistie - geste du don de l’Amour.
Ces
gestes constituent la communauté des disciples de Jésus ; l’un ne peut se
maintenir sans l’autre ; on ne peut pas communier au Corps et au Sang du
Christ - don de l’amour - sans pratiquer la charité fraternelle. On ne peut pas
réaliser la charité et l’amour sans être branché à la source : le comme ; « Aimez-vous comme je vous ai aimés – comme j’ai fait pour vous »
(Jean 13, v. 34 et v.13) – « jusqu’au
bout » (Jean 13,1).
« Pas de plus grand amour que de
donner sa vie pour ceux qu’on aime » (Jean 15,13).
Tout
est dans le signe de l’amour. C’est le but final de nos vies qui prend corps
dès maintenant et ici par ces deux gestes inséparables : « Faites ceci en mémoire de moi »
(Luc 22,19), et « ce que j’ai fait,
faites-le vous aussi » (Jean 13,15).
Sainte
Thérèse d’Avila rejoint ce cœur de toute charité fraternelle :
« Tout, ou presque tout, consiste à cesser de nous soucier de nous-mêmes
et de notre bien-être, et à mettre tout ce que nous sommes au service des
autres » (Chemin de perfection 12,2). Pas seulement d’abord ce que nous avons, mais ce que nous sommes.
Il
s’agit de nous donner nous-mêmes. Comme le Christ.
« Ubi carités et amor, Deus ibi
est. »
« Où sont amour et charité, Dieu
est là. »
Une
présence réelle : « Ceci est
mon corps, livré, mon sang versé. »
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