Carmel de Saint-Maur - Père Maurice Boisson
Ezéchiel 17,22-24 ; Psaume 91 ; 2
Corinthiens 5,6-10 ; Marc 4,26-34
Dans
un groupe de caté, au Carême, il y avait au programme la parabole de l’enfant
prodigue. En commençant, j’ai eu l’idée (qui n’était pas très bonne !) de
poser la question : « Savez-vous ce qu’est une parabole ? »
D’un seul mouvement, toutes les mains se sont levées ! Tous avaient une
réponse. « Et alors, c’est quoi une parabole ? » Et
unanimement : « C’est pour regarder la télé ! Pour avoir les
chaînes ! »
Si
Jésus était là à notre époque, il aurait de quoi dire beaucoup de paraboles à
partir de la parabole.
« Par de nombreuses paraboles,
Jésus leur annonçait la Parole »
(Marc 4,33) – c’est la fin de cet Evangile. C’était une façon de parler, avec
des histoires du temps, des comparaisons, observations de la nature, pour faire
comprendre des réalités qu’on ne peut pas enfermer dans des définitions de deux
lignes.
C’est
le cas du « Royaume de Dieu » que Jésus annonce : le Royaume,
« c’est comme »… le semeur qui sème du grain,… c’est comme du levain
qui fait lever la pâte,… c’est comme un trésor caché dans un champ,… c’est
comme la semence jetée en terre et qui pousse toute seule, c’est tout petit
mais ça devient un grand arbre.
Ce
sont les deux paraboles que nous venons d’entendre.
Les
grains, les semences, ont une énergie vitale intérieure qui les fait
croître ; elles poussent sans nous, malgré nous parfois, et aussi avec
notre aide pour préparer le terrain, le nettoyer, et donner un coup d’arrosoir
quand c’est trop sec.
Mais
on ne tire pas sur les haricots ou les salades pour qu’ils poussent plus vite.
Notre
monde, nos vies, sont ensemencés de Dieu. Le Bien est en germe en chacun, mais
l’ivraie, les mauvaises herbes, peuvent étouffer ces semences.
Le
Royaume, le monde de Dieu, sa présence et tout ce qu’elle représente, c’est
déposé en nous, en chacun, pour que ça se développe jusqu’à la moisson.
La
deuxième parabole de cet Evangile nous dit que cette croissance, on ne la voit
pas toujours : seulement quelque temps après. On voit surtout ce qui ne va
pas - c’est souvent plus visible - et il arrive que l’on découvre, à un moment
ou à un autre, que ces semences, ces grains de Dieu, ont grandi, qu’elles se
voient et qu’elles font le bonheur de ceux qui profitent de leurs fruits et de
leur feuillage, comme les oiseaux de notre parabole.
J’entendais
des parents, l’autre jour, dire à propos de leur fils : « On ne l’a
pas vu grandir. » On découvre à un moment qu’il est grand.
Cet
Evangile nous appelle à la confiance : le Royaume de Dieu grandit dans l’invisible
- c’est la deuxième lecture : « Nous
ne sommes pas dans la claire vision, mais dans la foi » (2 Corinthiens
5,7).
Gardons
toujours confiance en cette énergie ensemencée en chaque personne comme au cœur
de l’humanité : elle grandit dans l’invisible mais notre regard, notre
esprit, sont tellement pleins de tout ce qui ne va pas que, souvent, nous ne
pouvons pas voir, apercevoir, deviner, cette petite fleur qui sort de la broussaille,
ce petit arbre qui se fait une place dans les buissons.
Croyons
aux germes, aux semences de vie, de justice, d’amour, de paix, de vérité, de
recherche de fraternité ; soyons attentifs à ce qui naît, à ce qui pousse,
à tout ce qu’on appelle – nous - des « petites choses », ces petits
gestes, ces paroles, qu’on dit banals, ces actions qu’on croit inefficaces, ces
présences qui semblent sans importance, ces regards qui nous paraissent être
rien, ce temps apparemment perdu : ce sont des petites semences du monde
nouveau de Dieu - qui est déjà là - appelées à grandir.
Le
Père Congar, un des artisans du Concile Vatican II, écrit dans son
journal : « Entre cent grammes de blé vivant et une tonne de bois
mort, je n’hésite pas ! »
C’est
vrai qu’on entend un arbre qui tombe, ça fait du bruit ; mais on n’entend
pas la forêt qui pousse. On entend un pan de mur qui s’écroule – il y en a
quelques-uns – mais on n’entend pas le blé qui lève dans le silence… Et
pourtant, le Royaume de Dieu, c’est comme de la semence semée en nous et dans
notre monde, pour le bien de tous.
A
nous d’en prendre soin.
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