dimanche 14 octobre 2018

Homélie du 28ème Dimanche année B


Homélie du 28ème Dimanche année B
Carmel de Saint-Maur —Père Maurice Boisson

            « Que dois-je faire pour hériter de la vie éternelle ? »
            Qui se préoccupe, aujourd’hui, d’hériter de la vie éternelle ? Dans les héritages, les préoccupations sont habituellement ailleurs, plus bassement matérialistes, comme on dit !
            Cet homme, arrivant tout essoufflé devant Jésus, avait tout ce qu’il lui fallait. Il n’avait pas besoin d’un héritage financier mais d’un héritage d’une autre valeur, qui n’a pas de prix : un trésor intérieur, la vie éternelle ! Non seulement qui dure toujours mais qui, dès ici-bas, nous rend heureux d’exister, d’être. Non pas à la surface mais dans le plus profond de ce que nous sommes, de ce que nous cherchons comme un trésor intérieur : un plus à la vie, un meilleur à ce que nous sommes et à la société dans laquelle nous vivons, une valeur ajoutée au vivre ensemble. Au fond, un ajustement à ce pourquoi et à Celui pour qui nous sommes faits. « Tu nous as faits pour Toi, Seigneur, et notre coeur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi. » (St Augustin, Confessions, I,1). Notre coeur, notre vie ne sont-ils pas sans cesse à la recherche d’un mieux et d’un meilleur ? Sinon, nous restons embourbés dans les ornières de nos habitudes et de nos égoïsmes.


            Ce jeune homme, comme dit Saint Matthieu, était en règle, il faisait ce qu’il fallait. Il était en règle avec les commandements qu’il observait depuis sa jeunesse, dit-il. Cela ne suffisait pas. Cela ne comblait pas son désir de plus. Cela peut contenter les pharisiens qui veulent être en règle extérieurement mais pas ceux dont le désir d’être meilleur va au-delà des règles, des pratiques. C’est une question de coeur et d’esprit. C’est là que tout bascule pour cet homme, dans la rencontre avec Jésus : un regard d’abord, comme on en trouve si souvent dans l’Evangile, un de ces regards qu’on n’oublie jamais. Un regard aimant, qui aime, qui attire. Amour qui invite à faire un pas de plus pour un meilleur de soi.

            Jésus posa sur lui son regard. Il ne jette pas un coup d’oeil rapide, inquisiteur, qui colle tout de suite une étiquette sur l’autre. Il pose délicatement, avec tendresse et respect son regard sur lui et il l’aima d’un même mouvement du coeur, qui remue, alors qu’il y a tant de regards qui paralysent et qui enferment.
            De ce regard aimant peut alors venir une parole difficile, dure, comme c’est le cas ici. Cette parole ne peut être dite et entendue qu’en aimant : « Tu veux la vie, la vraie ? Une seule chose te manque : va, vends, partage et viens. Va en toi-même, fais le ménage, désencombre-toi de toi, déleste-toi de ce qui t’attache à ce qui n’est pas important, essentiel. Partage ce qu’il y a de meilleur en toi, ne le garde pas dans un coffre et viens vivre de mon esprit, des vraies valeurs de la vie, de ce qui vaut. Vis ce qui vaut la peine. »
            Ces paroles sont dures à entendre et à vivre. Il avait de grands biens, cet homme. On ne dit pas que c’étaient des biens matériels. Il y  d’autres « grands biens » qui nous ligotent et nous possèdent bien plus que nous les possédons. On a bien une petite liste en nous-mêmes.
            Sépare-toi de ce qui te retient d’être meilleur, plus humain, plus fraternel, plus près de Dieu et des autres, de ce qui te sépare de la vraie vie que tu cherches. Il ne s’agit pas d’en faire plus que tu ne fais déjà, dit Jésus, mais d’être ce que tu désires être et ce que Dieu désires que tu sois. Il s’agit d’être plus, meilleur et tu auras en héritage la vie, la vraie, pour toujours.

            C’était difficile pour cet homme sur le coup et il s’en alla tout triste, parce que cela lui paraissait trop. Et Jésus ne lui fait pas de reproches, il ne lui fait pas la morale, il continue de l’aimer, allumant en lui une espérance : c’est possible à Dieu, avec Dieu ! Rien n’est fermé, verrouillé dans nos vies. Personne ne sait ce qu’est devenu cet homme. Il gardait en lui ce regard aimant, inoubliable, posé sur lui. Peut-être était-il de ceux qui ont écouté les apôtres à la Pentecôte et ont été témoins de la vie selon l’Evangile du Ressuscité.

            Alors, si nous avons quelques airs de ressemblance avec cet homme, laissons Jésus poser sur nous son regard aimant afin que nous puissions poser le même regard sur les autres !

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