Carmel de Saint-Maur – P Maurice Boisson
Textes du jour: Is 43, 16-21; Ps 125; Ph 3, 8-14 ;
Jn 8, 1-11
Elle est jetée là !
au milieu de cercle d’hommes gardiens de la Loi de Dieu ; accablée du
poids de leurs regards violents, et pervers, elle est meurtrie de honte…
« Ces femmes-là, Moïse nous ordonne de les faire mourir en leur jetant des
pierres ! » Cet ordre s’adressait aussi aux hommes dans la même situation, mais celui
avec qui elle était, n’était pas là ! Elle est seule, au milieu de ce
cercle d’accusateurs, enfermée, et enfermée en elle-même dans sa culpabilité et
sa faute.
En fait, elle sert de
prétexte pour en accuser un autre : Jésus qu’on veut piéger et accuser… Et
toi ? Que dis-tu ? Moïse nous a dit de lapider ces femmes-là !
La ficelle est grosse : si Jésus dit : Oh non ! Ne la tuez pas.
Il est contre la loi de Moïse et lui aussi mérite la mort ! S’il dit, oui,
oui, appliquez la loi, allez-y… Il dit le contraire de son message et de ce
qu’il fait. Il n’est plus crédible…
Il y a des positions,
des jugements, des regards, des paroles, qui enferment. Dans le mot enfer-mer,
il y a « enfer »-être enfermé en soi-même et au milieu des autres, être
enfermé dans sa méchanceté, dans sa vérité… La plus grosse pierre de la
lapidation de cette femme, c’est celle-là : le poids qui lui tombe dessus
de la part de ces hommes religieux et qui tombe sur le poids de sa faute.
Dans ce cercle de mort,
il y a quelqu’un qui n’est pas enfermé et qui n’enferme pas. Celui-là, Jésus,
casse et désamorce cette spirale qui allait conduire à la mort. Son attitude,
calme, paisible, silencieuse, enraye et bloque la roue de la surenchère et de
la provocation. La miséricorde est une force intérieure qui n’approuve pas le
péché, mais qui donne au pécheur la possibilité de sortir de son enfer
intérieur et celui des autres qui pèse sur lui.
Jésus se baisse, il
n’est plus à la hauteur des accusateur, mais au niveau de l’accusée, rabaissée.
C’est comme ça qu’il nous rejoint. Qu’il rejoint notre humanité : c’est la
lettre de Paul aux Philippiens. Il fait silence… il écrit par terre ;
fuyant leurs regards mauvais. Il renvoie chacun à sa conscience, eux et elle ;
chacun à son propre péché, celui de l’infidélité et de beaucoup d’autres, en
particulier celui qu’ils sont en train de commettre : l’infidélité à Dieu,
par leur attitude de ruse, de violence, de refus de Jésus.
« Celui de vous qui
est sans péché, irréprochable…, qu’il soit le premier à lui jeter une
pierre. » Cette parole les touche, nous touche au cœur même de notre
besoin de pardon… « Qui suis-je pour juger ? », répondait le
pape François à un journaliste. Ils s’en allèrent, en commençant par les plus âgés.
Quand on est plus âgé, comme nous, on est peut-être plus sensible à nos
fragilités, à nos faiblesses, et surtout à nos besoins de miséricorde, parce
qu’on se rend compte que des pesanteurs demeurent, même si l’ardeur de notre
jeunesse pouvait nous laisser croire qu’on allait vite revenir parfait et
saint ! Cette parole de Jésus a changé la donne, elle a brisé les cercles,
les enfermements. Jésus reste seul avec cette femme. Saint Augustin dit :
c’est le face-à-face de la misère… et de la miséricorde. Un face-à-face des
faiblesses de l’humanité et des grâces de la divinité. Jésus ne dé-visage pas
cette personne comme les voyeurs accusateurs, il en-visage de lui redonner un
nouveau visage, un cœur nouveau, une vie nouvelle. « Voici que je fais
toutes choses nouvelle !, c’est la 1re lecture.
VA. Avance, relève-toi, reprends la route, ta
vraie vie, ton amour, et ne pèche plus. Jésus n’approuve pas ce qu’elle a fait.
Je ne te condamne pas, VA, retrouve ta dignité. Les pierres sont restées sur le
tas de pierres, mais la pierre qui pesait sur son cœur est ôtée. Ce message de
ce 5e Dimanche nous invite nous aussi à passer, de la condamnation
au pardon, de nous jeter des pierres à construire ensemble, d’enfermer à ouvrir.
Dans les enfermements où nous tiennent nos péchés, Dieu ouvre des espaces… pour
aller… repartir, nous relever. « A défaut de pardon, notre vie est un
enfer », dit saint Ignace. Si nous ne prions pas Dieu pour recevoir, puis
redonner le pardon, la haine, le remords nous habitent, nous enferment, nous
coupent des autres, nous placent en enfer. »
Et toi, que
dis-tu ? Je ne te condamne pas, va, et désormais ne pèche plus.
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