Homélie 3°DIMANCHE DU TEMPS DE L’AVENT
Carmel de Saint-Maur - Père Farel Nance Djembo de Pointenoire, Congo
Bien chers frères et sœurs peuple de Dieu nous célébrons
le III dimanche de l’Avent. Le dimanche de la joie. La joie du message de Noël,
d’un monde nouveau. Pour méditer avec vous les textes de ce dimanche j’ai
choisi de m’appesantir sur trois mots : l’Amour, le temps, les signes.
Il était une fois sur une ile où vivaient tous les
sentiments et les valeurs des hommes : la bonne humeur, la tristesse, le
savoir… avec tous les autres inclus l’amour. Un jour on annonça aux sentiments
que l’ile devait être engloutie par les eaux et il fallait la quitter immédiatement ;
alors ils préparèrent tous les bateaux et partirent et seul l’amour voulut
attendre jusqu’au dernier moment. Et quand l’ile fut sur le point de couler, l’Amour décida de demander de l’aide. La Richesse passa près de lui sur un
bateau luxueux et l’Amour lui
demanda si elle pouvait l’aider, elle répondit que le bateau était plein d’or
et d’argent et il n’y avait pas de place pour lui. Et l’amour demanda à l’Orgueil qui répondit que tout était
parfait et craignant que son bateau soit détruit par sa présence refusa de lui
apporter de l’aide ; et l’Amour demanda
à la Tristesse qui répondit qu’elle
était si triste et avait besoin de rester seule ; et même la Bonne humeur passa tout près mais comme
elle était si joyeuse, elle ne put entendre les cris de l’Amour. Mais, subitement, une
voix lui dit vient je t’emmène avec moi. Et c’était une personne âgée qui avait
parlé. L’Amour se sentit si
reconnaissant et dans l’euphorie oublia de demander le nom du vieux, et le
vieux s’en alla. Et l’Amour alla
demander au Savoir le nom de celui qui
l’avait donc aidé. Et le Savoir lui répondit que c’était le Temps. Et l’Amour demanda pourquoi est-ce le Temps l’avait aidé et le Savoir
rempli de Sagesse lui répliqua « seul
le Temps peut comprendre combien l’Amour est important dans la vie».
Du récit que j’ai raconté aux allures de récits
d’enfants, est ce que nous ne le sommes pas pour le Père céleste, on comprend
que seul dans le temps on peut comprendre l’amour. Mais quel amour ? et
dans quel temps ? Dans le temps et avec le temps notre vie est rythmé.
C’est le temps des hommes. C’est le temps d’une rencontre, le temps d’un
mariage, le temps d’une vocation, le temps d’une épreuve mais toujours temps de
l’histoire des hommes. Toutefois c’est un temps incomplet qui est appelé à se
mettre au diapason du temps de Dieu. Le temps de Dieu c’est le temps de l’Amour
vrai, un amour qui ne se gonfle d’orgueil, un amour qui se veut joyeux et non
triste, un amour des petits. C’est toujours un temps qui reste incompréhensible
aux yeux des hommes. L’amour de Dieu qui
vient côtoyer nos chemins et notre histoire ne peut se comprendre qu’avec son
temps.
Dans le temps des hommes il nous arrive de se poser des questions, de
douter de tout et de rien. C’est le lieu d’une insécurité sans merci. Combien
de fois nos préjugés, nos convictions personnelles, nos prérequis nous ont fait
passer à côté des choses essentielles ? Combien il nous a fallu du temps
pour nous apercevoir que le regard négligé d’un voisin était aimable parce que la
haine ou les préjugés avaient obscurci notre jugement ? Combien de fois il
nous a été difficile de déceler et accepter le talent d’un autre, la sincérité
d’un amour ? Combien de fois nous avons tâtonné à choisir notre chemin ?
Combien de fois on a cru s’être trompé après beaucoup d’années de
mariage ? Quelle a été l’attitude d’un chrétien après la venue du nouveau
curé qui a tout changé ? Combien de questions nous nous posons sur
l’Eglise et ses querelles de clochers ? Et pourtant même le précurseur
Jean le Baptiste dans la prison de Macheronte a dû se résoudre à demander si le
temps de Jésus était celui du Messie : es-tu celui qui doit venir ?
Et si nos doutes sont forts, le Seigneur répond par un Amour qui croit toujours
en nous et son témoignage est plus fort. Jésus envoie un message qui respire
l’amour de Dieu à travers les signes qui désormais vont accompagner les temps
nouveaux inaugurés par lui. Et il ne peut que rappeler la grande prophétie d’Isaïe
que je déclinerai en ces réponses de Jésus aux disciples de Jean comme étant
les 6 signes du nouveau monde de l’Amour et du temps de Dieu et du Messie. Si
ces signes ne sont pas visibles dans la communauté, le Messie n’a pas encore
fait irruption dans notre vie, dans nos diocèses, dans nos familles, dans notre
histoire. Là où arrive le Messie de Dieu tout change. Nous verrons le
changement non avec des raisonnements philosophiques mais avec des signes
concrets.
Les aveugles voient ou mieux ceux qui marchent
dans le noir, ceux qui souvent perdent l’orientation se font mal et font mal
aux autres, ceux qui sont sur la route et ne sont pas toujours aidés et ne
voient pas la réalité, la beauté de la vie, de la création, ceux-là voient
désormais et peuvent aller vers leur but, leur idéal. Là où arrive la lumière
de l’Evangile les aveuglent voient quel est le destin de l’homme. Les sourds entendent, le sourd c’est
celui qui n’a pour seul repère sa propre personne, il vit dans son carcan, il
n’écoute personne ou seulement la voix de ses passions, les sourds ne pouvaient
pas écouter la parole de Dieu, le cri de celui qui souffre, l’Evangile de la
vie, maintenant avec le Messie ils peuvent écouter la Parole du Maitre et
peuvent aller sur les routes de la vie. Désormais ils peuvent écouter un message
authentique des temps nouveaux. Les boiteux marchent ou mieux ceux qui
vivent des expédients, des subterfuges, des mensonges des gens et ils sont
toujours aidés par les autres, ceux qui ne réussissent à rien faire dans la
vie, ceux qui se contentent de peu et toujours mendient la charité des autres.
Eux aussi peuvent marcher et devenir protagonistes de leur destin, désormais en
contact avec la Parole du Messie ils peuvent marcher dans la direction juste.
Combien de peuples ne demandent que cela.
Les lépreux sont purifiés ou mieux ceux
qui éprouvent une honte personnelle de leur vie, de leur histoire, ce sont
aussi ceux qui sont rejetés par la communauté, ils sont l’image du pécheur qui
a pris le mauvais chemin et pour qui tous veulent s’éloigner, ils ne sont pas
beaux à voir, mais avec le Messie ils retrouvent aujourd’hui la joie de vivre
en communauté, leur beauté et deviennent présentables.
Les morts ressuscitent, ceux qui vivent
seulement de la vie biologique mangent, boivent et se marient comme au temps de
Noé et ne pensent pas à la vie de l’Esprit, mais ceux qui sont morts à la vie
donnée par Christ, celui qui vit de l’amour pour les autres, celui qui vit cet
échange avec les autres et s’éloigne de l’égoïsme, aujourd’hui ils ressuscitent
et vivent pour Dieu et pour le ciel. Les
pauvres reçoivent l’annonce du Règne de Dieu ceux que personne ne pouvait
voir, personne ne pouvait avoir pitié et aujourd’hui le Christ mange avec eux,
leur pardonne et ils retrouvent leur dignité. Personne ne doit se sentir
refuser de Dieu. Chacun reçoit le soleil de l’amour de Dieu. Et Jésus conclut
Heureux celui qui ne se scandalise c’est-à-dire celui qui ne trébuche pas
devant la bonté miséricordieuse de Dieu. Car nous vivons les temps nouveaux, le temps
de l’amour vrai.
Et à la fin Jean-Baptiste devient le grand signe qui doit
parler à la vie du croyant, du disciple. « Qu’êtes-vous allés voir au
désert ? Un roseau agité par le vent ?... ». Eh bien non.
Jean le Baptiste est un homme droit et constant,
il a les raisons de sa foi, il ne se plie pas à la direction du vent, il n’est
pas un opportuniste qui s’adapte à toutes les situations et s’incline devant
les puissants. Saint Paul le rappelle dans la seconde lecture Jean Baptiste est
un homme cohérent et constant. Certains disent que les temps ont changé on ne
vit plus dans le moyen Age.
Chers frères et sœurs, peuple de Dieu, nous devons
apprendre à distinguer ce qui vient du Maitre et ce qui vient de nos critères
humains de raisonner. Comme chrétiens et père de famille et responsables de
communauté quand on est convaincu des choix dignes il faut avoir le courage de
les promouvoir même quand tout le monde prend une direction peu digne. Les jeunes
en font les frais à l’université, ils sont appelés à rester cohérents. Le
Baptiste est loin de ceux qui ne pensent qu’à se divertir. Et quand nous voyons
clairs, nous devons être constants et cohérents.
La réponse du Maitre, au final, rassure et reste le
témoignage plus beau et éloquent sur Jean-Baptiste et partant sur l’homme. Personne
n’est plus grand que jean Baptiste mais celui qui entre dans le Royaume est
plus grand que lui. Qui est entré dans le Règne de Dieu se trouve dans une
position privilégie. Car qui a accueilli le visage du Christ, le temps de
l’amour, le Messie, celui-là voit plus que Jean Baptiste. Ce que nous voyons
aujourd’hui Jean avait seulement eu l’intuition, il est resté au seuil. Mais
nous, nous avons eu la possibilité de le contempler ; Et aujourd’hui nous
pouvons nous réjouir de ce que Jean-Baptiste nous apporte. Voilà le motif de
joie de ce dimanche. L’amour de Dieu a un sens seulement dans le temps que le
Messie nous introduit à travers les signes qui parlent au cœur du monde. Jean-Baptiste
aujourd’hui est la figure du vrai disciple du Christ qui doute pour connaitre
mieux. Et pour suivre Jésus il faut voir clair. Et la vie en communion avec la
Parole de Dieu est ce voyage d’où la beauté et la profondeur ne consistent pas
simplement à voir des nouveaux paysages mais à avoir des nouveaux yeux, des
nouveaux regards sur l’homme, l’Eglise et la société.
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