Homélie du 5ème Dimanche de Carême
Carmel de Saint-Maur — Père Maurice Boisson
A une semaine
des célébrations des événements fondateurs de notre foi, nous sommes déjà dans
l’ambiance de la Passion du Christ. Passion comme souffrances et violences mais
aussi Passion comme Amour et don.
A vrai dire,
nous y sommes en permanence, dans les Passions actuelles de notre monde et dans
celles qui nous sont intérieures et personnelles. Ces combats, vécus et gagnés
par le Christ sont ceux de tout temps et de tout être humain : combats de la
vie et de la mort, de la douceur et de la violence, de la lumière et de
l’obscurité, du don de soi et de l’enfermement, de la tendresse et de la brutalité,
combats du bonheur de l’humanité et de sa destruction, de la méchanceté et de
la fraternité, du refus et de l’amour…
Comme dimanche
dernier, Jésus nous dit encore aujourd’hui un secret, un secret à vivre : qui
aime sa vie la perd et s’il s’en détache, il vivra en plénitude. Ça coûte, mais
c’est libérateur. C’est la condition pour gagner les combats sur toutes formes
et forces du mal.
C’est à Jérusalem, en pleine fête de Pâques,
au cours de laquelle Jésus vivra son procès, sa mort en s’en relèvera, qu’il
confie à quelques pèlerins ce qui habite au plus profond de son coeur en ces
moments difficiles. Qui sont ces pèlerins ? Ses apôtres, ses amis ? Non, car
ils ne peuvent pas entendre l’idée et la réalité de ce dénouement qui les
révolte. « Non jamais ! Pas ça ! » dit Pierre. Serait-ce des
compatriotes juifs ? Non, ils ne veulent pas non plus l’entendre et ils sont
décidés à tuer Jésus. Il s’agit de quelques grecs, des étrangers, des
non-juifs, qui se trouvent là et désirent voir Jésus. « Nous voudrions
voir Jésus. » C’est à eux, des désirants d’un peu de lumière, comme
Nicodème, disposés à chercher, à accueillir, à comprendre. C’est à eux que
Jésus ouvre son coeur, sa souffrance et sa confiance. Non seulement au sujet de
sa Passion à lui, mais des Passions de ses frères et soeurs dont il se sent
solidaire : « Qui aime sa vie la perd, s’il la donne il vivra en
plénitude. » C’est ce qu’il est lui-même en train de vivre. Il explique : ces
graines que l’on va bien bientôt semer dans les jardins, si elles se
transforment dans la terre, elles vont donner ce qu’elles portent en
elles-mêmes, des fruits, des fleurs. Si elles restent intacts, rien ne germera.
Celui qui se
donne lui-même, qui meurt à lui-même portera beaucoup de fruits. Celui qui se
referme sur lui-même ne donnera rien. Vivre, c’est se donner et aimer, c’est
mourir à soi-même, dit Jésus à ces quelques Grecs. C’est la signification de ce
qui va se passer. Et il ajoute aussitôt, comme s’il vivait déjà en lui ces
paroles qu’il venait de dire : « Maintenant, je suis bouleversé, au plus
profond de moi. Que dire ? Père, sauve-moi de ce moment, de cette Passion de
mort et de violence ? Mais non ! Glorifie ton Nom ! » « Dans ce que
je vais vivre, dans la souffrance, par Amour, manifeste que Tu me donneras
raison, que Tu donneras raison au don de l’Amour, à la Vie ! » Et, comme
au baptême de Jésus et à la Transfiguration, la voix de Dieu, du Père se
manifeste pour attester qu’il donnera raison à son Fils : « Je le
glorifierai ». « Le prince de ce monde, le démon, le mal, vont être
jetés dehors », tel sera le signe qui sera donné.
C’est la
Promesse de la Passion du Christ pour toutes les Passions. Promesse déjà
acquise, mais à réaliser dans l’aujourd’hui de nos vies et du monde, au
quotidien.
Qui aime sa vie
pour la garder pour soi la perd…
Qui la donne,
la gardera et vivra en plénitude…
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