Homélie du Jeudi Saint 2018
Carmel de Saint-Maur — Père Maurice Boisson
Les événements
de ces derniers jours nous ont déjà plongés dans les gestes et les paroles du
Christ que nous célébrons ce soir : le don de l’Amour, par l’offrande de sa
vie. C’est l’Eucharistie que nous rapporte Paul dans la 2ème lecture, et c’est
ce don redonné par le geste du lavement des pieds, attitude de charité et
d’amour. Pour les deux, Jésus nous dit : « Faites pareil, en mémoire de
moi ! » C’est son testament, l’héritage qu’il laisse à ses amis - ses amis
que nous sommes ce soir autour de lui. « Ayant aimé les siens, il les aima
jusqu’au bout. » Ces deux gestes sont à l’opposé de ce qui se passe pour
lui, dans la nuit : l’arrestation et la suite, les violences… l’étalage de l’épicerie
du malin.
Passion comme
souffrance, Passion comme Amour, passionné, hier, et aujourd’hui.
En pleines
méchancetés et violences surgit l’Amour, le don de soi, désarmé… « Quand
on n’a que l’amour… » « Faites de même, en mémoire de moi. »
« Le pain
et le vin partagés, c’est mon corps livré, mon sang versé par et pour l’Amour
! »
« Je vous
ai lavé les pieds, faites pareil ! »
C’est le même
cadeau de l’héritage : celui du don de l’Amour, donné, offert, à accueillir et
à re-donner.
Ces deux cadeaux
constituent la communauté et les communautés des disciples de Jésus. Ils en
sont le coeur et l’ossature. L’un ne peut être vrai sans l’autre. Le sacrement
de l’Eucharistie implique le sacrement du frère et de la soeur, signes efficaces de la présence et de l’amour
du Christ. Communier au corps et au sang du Christ sans vouloir, ni au moins
chercher à vivre la charité au vrai sens du mot est illusoire.
Ce geste du
lavement des pieds peut sembler aujourd’hui désuet et peu parlant. Il était un
geste d’accueil et d’hospitalité, de soins bienveillants lorsque les gens se
déplaçaient, pieds nus ou en sandales par des chemins poussiéreux. Avant le
repas, un esclave ou un serviteur, le dernier arrivé, lavait les pieds des
invités. Cette tâche, humble et basse, confiée au moins considéré, Jésus la
prend à son compte. Le Maître et Seigneur se fait dernier serviteur. Le pouvoir
se fait service. Jésus s’abaisse, se baisse, ce qui n’est pas facile quand on a
quelques difficultés d’articulations. C’est encore bien plus difficile quand
l’arthrose ou les rhumatismes se logent dans le coeur ou dans la tête ! Nul
n’est trop bas qu’il ne soit rejoint par Dieu ! Nul n’est trop bas, y compris
nous-mêmes, que nous ne puissions rejoindre. « Ce que je viens de faire,
dit Jésus, c’est l’exemple, pour que vous fassiez vous aussi comme j’ai fait
pour vous. » C’est un exemple, faites comme… Il s’agit bien de faire
aujourd’hui ce que signifie ce geste, dans nos relations quotidiennes :
l’attention, l’accueil, le service, tous les gestes et attitudes de charité qui
nous sortent de nous-mêmes, en nous abaissant, dans l’esprit de Jésus.
Nous sommes
unanimes à admirer le don que le Colonel Arnaud a fait de sa vie pour arrêter
la mort. Que cette admiration et ces hommages rendus soient autant de semences
au quotidien, dans le concret de la vie, des relations. Semences d’un monde
autre pour lequel Jésus est mort.
Un très beau
chant du Jeudi Saint et de l’Ascension de notre ami Claude Duchesneau nous
rappelle ce « Faites pareil, faites cela en mémoire de moi ! » :
« L'homme qui prit
le pain n'est plus devant nos yeux
Pour saisir en ses mains
le don de Dieu.
C'est à nous de prendre
sa place aujourd'hui,
Pour que rien de lui ne
s’efface. »
« Ubi
caritas et amor, Deus ibi est », « Où sont amour et charité, Dieu est
là. » Elle est là aussi et surtout la présence réelle que nous allons
adorer tout à l’heure.
Faisons
maintenant ce que Jésus nous a dit de faire, en mémoire de lui, jusqu’à ce
qu’il revienne…
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